Un Peu de Lecture

 

 L'HISTOIRE DE LA SCIENCE-FICTION

      

  De tous temps les écrivains ont imaginé un ailleurs, inventé d'autres lieux. Au IIème siècle le grec Lucien de Samosate est le premier à imaginer un voyage sur la lune dans sa fable intitulée l'histoire vraie. Plus tard Cyrano de Bergerac, avec son Histoire comique des Etats et Empires de la lune, nous entraîne aussi sur la lune à la rencontre de personnages pittoresques et de situations caricaturaux . Au travers de ces récits de voyage imaginaire ces auteurs critiquent leur époque, évoquent les problèmes politiques, religieux ou philosophique de leur temps. L'ailleurs pour les auteurs du XVII eme et XVIII eme siècle est un monde idéal une société parfaite. Les récits d'utopie se font leur apparition.. En 1516 dans Utopia, Thomas More décrit une île dont l'organisation politique et sociale extrêmement rationnelle assure le bonheur de tous les citoyens sans exception. En 1759 Voltaire fait découvrir l'Eldorado au héros de son Candide de Voltaire. Ces auteurs mettent en scène la perfection absolue (utopie) ou le mal absolu (contre utopie) épinglant les travers du monde réel. Tous ces récits leur permettent de critiquer plus ou moins férocement leur époque. Les oeuvres ont une portée politique ou philosophique, l'humour et la satire y sont utilisées comme une arme contre la société. Mais ils posent aussi les premières pierres qui serviront à la construction de la SF : les extra-terrestres font leur apparition dans un roman très populaire d'un pasteur anglais nommé Francis Godwin " l'homme dans la lune " et ceux de Voltaire dans Microméga portent un regard acerbe sur l'humanité. En 1770 Louis Sébastien Mercier donne naissance à l'anticipation avec l'an 2440 ou le rêve s'il en fut jamais. Dans ce récit le narrateur rêve qu'il est en 2440 et qu'il observe les progrès accomplis par les hommes après la chute de la monarchie. Un futur radieux s'ouvre devant l'humanité grâce aux apports de la philosophie et des techniques du siècle des Lumières. Mais le progrès peut aussi être source de malheurs, la science devenir dangereuse. Le thème du savant fou, ivre de contrôle et de pouvoir prend toute son importance sous l'influence du roman noir venu d'outre manche. Dans le roman de Marie Shelley Frankenstein ou le Prométhée moderne un savant, le Dr Frankenstein, donne, grâce à l'électricité, la vie à une créature qui lui échappe pour le malheur de tous. Le progrès scientifique a des limites qu'il faut bien se garder de franchir.   

      

  Les pères fondateurs    

      

  Tous ces auteurs ouvrent la voie aux pères fondateurs de la SF que sont H.G. Wells et Jules Verne. Fasciné par les découvertes de la science et par l 'évolution des techniques Jules Verne dévore les travaux des chercheurs dans lesquels il puise son inspiration pour écrire des romans d'anticipation tels que Voyage au centre de la terre en 1863 ou De la Terre à la Lune en 1865. Herbert George Wells explore dans ses romans l'impact de progrès scientifiques imaginaires sur la société dans La machine à explorer le temps en 1895, l'île du Docteur Moreau en 1896, L'homme invisible en 1897 ou encore La guerre des mondes en 1898.   

      

  Les débuts du genre   

      

  La fin du 19eme siècle voit la naissance de la SF. Les extraterrestres refont leur apparition dans les récits de J. H. Rosny (les Xipéhuz en 1887) et la France d'avant guerre se passionne pour les romans scientifiques de Maurice Renard (le Péril bleu en 1910) ou de Gustave Le Rouge (le prisonnier de la planète mars en 1908). Le genre reflète les aspirations et les espoirs de la société européenne place dans les progrès de la science et des techniques. La première guerre mondiale fera évoluer le genre vers une plus grande méfiance à l'égard du progrès. La vague déferle aussi sur d' autres régions du monde comme les Etats Unis où Edgar Rice Burroughs fait un carton avec son Cycle de Mars , la Russie où Evgueni Zamiatine publie Nous autres en 1921 ou la Tchéquie qui voit Karel Kopek introduire en 1921 pour le première fois le terme Robot dans sa pièce de théâtre RUR. Robot signifie " travail pénible " en tchèque. Karl Capek désigne par ce terme des machines crées par les hommes et destinées à les soulager des travaux pénibles.   

      

  L'essor   

      

  La SF trouve aux Etats Unis un terreau fertile grâce à Hugo Gernsback qui ouvre les pages de son magazine de vulgarisation scientifique aux récits de science fiction. Puis il lance Amazing Stories un magazine entièrement consacrée au genre. La SF trouve alors dans les pulps un support parfait pour une large diffusion populaire. Les pulps sont attractifs. Peu onéreux , imprimés sur un papier de mauvaise qualité à base de pulpe de bois, leur prix est modique et leurs couvertures, racoleuses et bariolées, sont attrayantes. Hugo Gernsback baptise le genre " scientification " en 1924 puis " science fiction " en 1929. La SF doit beaucoup à Hugo Gernsback. Le plus célèbre prix littéraire de Sf lui rend hommage en pourtant son prénom : le prix Hugo. Dans les pulps le pire côtoie le meilleur et les thèmes se multiplient. Edward Elmer Smith popularise le space opera avec sa série sur les Fulgurs pendant que Robert Ervin Howard relate les aventures d'un guerrier solitaire dans un monde médiéval imaginaire dans Conan le Cimmérien.   

      

  L'âge d'or   

      

  L'engouement pour la SF va connaître son apogée des années 30 à la fin des années 50. Le genre entre dans son âge d'or, période particulièrement riche en nouvelles publications et en nouveaux auteurs. Les pulps disparaissent progressivement au profit de revues plus professionnelles. John W. Campbell, écrivain sous le pseudonyme de Don A Stuart, devient rédacteur en chef du magazine Astounding SF en1937. Sous son impulsion la revue deviendra la revue majeure de l'époque accueillant de nombreux auteurs débutants qui se révèleront très talentueux tels Robert A Heinlein, Théodore Sturgeon, AE Van Vogt, Isaac Asimov et bien d'autres encore. La SF devient plus complexe en proposant une réflexion sur les problèmes sociaux ou politiques de son temps. Les thèmes se diversifient : la SF n'est plus seulement l'évasion vers des mondes inconnus mais permet aussi une réflexion critique sur la société et les peurs engendrées par les dangers d'un progrès scientifiques mal maîtrisé. Aldous Huxley dans son roman Le meilleur des mondes (1932) présente une véritable contre utopie issue d'une conception pessimiste du progrès humain. Ce pessimisme est présent chez d'autres auteurs Gorge Orwell (1984 en 1949), Clifford D Simak (Demain les chiens en 1944), Ray Bradbury (Fahrenheit 451 en 1953) ou en France Barjavel (Ravage en 1943).  De nouveaux courants naissent tels que celui de la hard science fiction : les auteurs, des scientifiques pour la plupart, spéculent sur les sciences exactes pour développer des théories élaborées, précises ou improbables. Hal Clement en est un exemple avec Question de poids (en 1953). L'âge d'or est aussi une période de renouveau pour la SF française. Des nouvelles collections dédiées au genre apparaissent : le Rayon fantastique en 1951 et Présence du futur en 1953. Elles se contentent dans un premier temps de publier des traductions.   

      

  La maturité   

      

  La SF est toujours en mouvement. La créativité des auteurs apporte sans cesse de nouveaux thèmes qui évitent au genre de s'essouffler. L'urbanisme à outrance et l'écologie inspirent des auteurs comme Robert Silverberg (Les monades Urbaines en 1971) ou Jean Pierre Andrevon (le Désert du monde en 1977). Le premier voyage dans l'espace en 1961 puis l'alunissage d'Armstrong et d'Aldrin en 1969 relancent le thème de la conquête spatiale et nourrissent des auteurs comme Arthur C. Clarke (2001 l'odyssée de l'espace en 1968). Frank Herbert enrichit la SF d'une réflexion mêlant histoire et religion avec son cycle de Dune . Kurt Vonnegut (et d'autres après lui) apporte une touche d'humour avec Le Cri de l'engoulevent dans Manhattan désert en 1976. La SF française connaît un nouveau souffle : les éditeurs publient des auteurs français tels que André Ruellan qui utilise le pseudonyme de Kurt Steiner (Menace d'Outre-Terre en 1958), Alain Dorémieux (Promenades au bord du gouffre en 1978), Phlippe Curval (Les Sables de Falun en 1970), ou Gérard Klein (Le Gambit des étoiles en 1958). La SF se nourrit toujours des progrès techniques ou scientifiques pour spéculer sur des avenirs plus ou moins proches et plus ou moins heureux.    

      

 Le renouveau  

 Dans les années 80 la SF continue à se diversifier. La technologie a envahi la vie quotidienne et bouleversé nos modes de vie. L'informatique, internet, la miniaturisation donnent naissance à de nouveaux courants comme le cyberpunk et le steampunk. Parallèlement la Fantasy connaît un succès sans précédent. La hard science fiction connaît de nouveau le succès grâce à des scientifiques comme Gregory Benford dans Un paysage du temps, Greg Bear avec sa série Eon, David Brin avec son cycle de l'Elévation et Greg Egan avec Isolation ou encore grâce à des écrivains tels que Kim Stanley Robinson (la trilogie de Mars) et, en France, Jean Michel Truong (Le Successeur de pierre en 1999). Le space opera connaît un regain d'intérêt grâce au cinéma (Star Wars) : il explore de nouvelles dimensions de la conquête spatiale. Il devient spirituel avec Pierre Bordage et sa trilogie les Guerriers du silence, parodique avec Douglas Adams et son guide galactique, militariste avec la série de Lois Mac Master Bujold sur Barrayar, épique avec le cycle de Honor Harrington de David Weber, politique avec Andreas Eschbach et son roman Des milliards de tapis de cheveux (1995). Il flirte avec le fantastique dans la trilogie de Peter F. Hamilton Rupture dans le réel. En France les écrivains se libèrent des modèles anglo-saxons et font preuve d'une grande originalité dans leur façon d'aborder des thèmes plus ou moins nouveaux. Jean Marc Ligny, Ayerdhal, Serge Lehman, Laurent Génefort, Jean Claude Dunyach, Pierre Bordage sont les têtes de file de cette nouvelle générations d'auteurs français.