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9 mai 2005


Uun bon paquet d'années séparent E et Kami. C'est sûrement pour ça que l'un en est à l'heure des bilans alors que les autres ne regardent que vers l'avenir.




Eels : Blinking Lights And Other Revelations



Titres

CD1
Theme From Blinking Lights
From Wich I Came / A Magic World
Son Of A Bitch
Blinking Lights (For Me)
Trouble With Dreams
Marie Floating Over The Backyard
Suicide Life
In The Yard, Behind The Church
Railroad Man
The Other Shoe
Last Time We Spoke
Mother Mary
Going Fetal
Understanding Salesmen
Theme For A Pretty Girl That Makes You Believe God Exists
Checkout Blues
Blinking Lights (For You)

CD2
Dust Of Ages
Old Shit / New Shit
Bride Of Theme From Blinking Lights
Hey Man (Now You're Really Living)
I'm Going To Stop Pretending That I Didn't Break Your Heart
To Lick Your Boots
If You See Natalie
Sweet Li'l Thing
Dusk: A Peach In The Orchard
Whatever Happened To Soy Bomb
Ugly Love
God's Silence
Losing Streack
Last Days Of My Bitter Heart
The Stars Shine In The Sky Tonight
Things The Grandchilden Should Know


Je suis tombé sous le charme de Eels depuis le superbe Beautiful Freeks et depuis, j’ai toujours trouvé que Mark Oliver Everett, alias E était assez unique, en tous cas bien différent de la plupart de ses contemporains musiciens. Déjà par le ton de ses chansons, toujours légèrement à côté de ce qu’on attend, toujours un peu en marge, comme si le monde qui est le nôtre n’était pas tout à fait le sien. J’ai toujours trouvé que ses chansons lentes avaient un petit air de comptines ou de berceuses. Mais des comptines plutôt noires, une sorte de version pour adultes. Et puis il y a cette voix et ses textes. Une voix toujours voilée, éraillée, comme usée et fatiguée depuis longtemps déjà, qui nous raconte des histoires jamais très drôles, mais toujours touchantes.
Maintenant, je ne sais pas ce qu’a vécu E ces dernières années, depuis Shootennany, mais il a dû s’en passer des pas drôles. Ces Blinking Lights (lumières clignotantes) ont certainement beaucoup plus à voir avec celles des ambulances et des premiers secours que celles d’une fête foraine. En fait, ce disque est certainement ce que E a écrit de plus personnel et de plus noir. Blinking Lights est un double album, un album fleuve, comme on dit un roman fleuve. Et il ressemble trait pour trait à une sorte d’exutoire, un peu comme si il fallait absolument que tout ce que son auteur avait sur le cœur sorte enfin, peu importe sous quelle forme et peu importe en quelle quantité. Ca donne 33 morceaux tenant sur 2 CD. Une longue suite de morceaux courts (la plupart tournent autour des 2 ou 3 minutes), avec de nombreux ponts instrumentaux. Presque une sorte de concept-album qui nous parlerait de la vie en général, de la difficulté de vivre comme on le voudrait et de ces quelques rares moments de grâce qui réussissent quand même à la rendre si belle, parfois. Surtout une sorte de bilan de la vie de E qui semble être la conséquence d’évènements personnels que j’aime mieux ne pas connaître. En tout cas, jamais E (et peu d’autres avant lui) ne s’était raconté de cette façon là, sans aucun fard et avec autant de détails personnels. Il nous parle de sa naissance (From Wich I Came/A Magic Word), de sa mère qui n’a pas su l’aimer et de son père avec qui le contact n'était pas facile (Son Of A Bitch), de son enfance avec trop peu d’amour et beaucoup trop de rêves (Blinking Lights, Trouble With Dreams), de sa vie d’adulte pas facile non plus (Suicide Life), de ses doutes(il en a plein ses cartons), de ces déceptions (Last Time We Spoke, Old Shit/New Shit), des années qui passent (Dust Of Ages), de la mort (If You See Natalie), mais aussi et surtout de cet amour de la vie qui le fait tenir debout. Tout ça avec un livret agrémenté de vieilles photos personnelles de sa famille (grands parents, parents, frères et sœurs ou lui même ?  On ne sait pas trop), ce qui ajoute encore au côté mise à nu. Un peu comme s’il avait vidé les vieux cartons du grenier familial pour en ressortir tous ces vieux souvenirs. Ca laisse une impression un peu bizarre. Sûrement parce qu’il est plutôt inhabituel de voir quelqu’un se livrer aussi totalement devant son public. Au lieu de se payer une analyse, E a enregistré Blinking Lights. Je ne sais pas si c’est aussi efficace, mais on prend un plaisir certain à l’écouter et à jouer le rôle du psy.
Et le long voyage commence par Theme From Blinking Lights, une petite mélodie toute simple, presque enfantine, comme E en a le secret. Je ne passerai pas dans le détail tous les titres du disque, je me contenterai de vous indiquer les étapes principales, à commencer par From Wich I Came/A Magic Word, chanson type de Eels, toujours ce délicieux mélange de grâce délicate et de spleen aérien. C’est à l’écoute de ce genre de morceau fragile qu’on s’aperçoit que ce type là, on l’aime. Juste parce qu’il sait écrire des petites choses comme celle là, qui vous restent scotchées au cœur. En écoutant Blinking Lights (For Me), on a réellement la sensation de voir défiler un paysage aussi triste que sa voix. Heureusement la mélodie plus enjouée de Trouble With Dreams vient nous remettre le sourire aux lèvres. Et puis entre les morceaux chantés, on trouve de petites pièces instrumentales, toujours délicates, toujours belles, qui servent de lien. In The Yard, Behind The Church est un autre exemple de chanson que seul Eels est capable de rendre écoutable. Chez tout autre, ce serait une chanson larmoyante et insupportable. Là, c’est juste beau. Là, je suis en train de me rendre compte que si je continue à ce rythme, je vais quand même vous parler de presque tous les morceaux du disque. Parce que si je me laisse aller, je vais aussi vous parler de The Other Shoe, chanson qui aurait presque pu figurer dans un film d’Ennio Morricone, sans oublier l’enthousiasmant Going Fetal avec son orgue Hammond très 70’s. Mais il y a aussi toutes ces petites pépites qui vous trouent littéralement le cœur (Understanding Salesmen, Theme For A Pretty Girl That Makes You Believe God Exists). Et là on se prend à regretter que les chansons soient si courtes, parce qu’on aurait bien repris encore un peu de cette poésie là. Mais bon, faut peut être pas exagérer, on en est encore qu’au premier des deux CD.
Et le deuxième est exactement dans la même veine, avec toujours ces sortes de mini-tubes que je trouve proprement irrésistibles (Old Shit/New Shit et ses chœurs synthétiques qui nous rapprochent du paradis, le joyeux foutoir d’influences qu’est Hey Man (Now You're Really Living) et surtout Losing Streak). Et on trouve encore de ces ballades crève-cœur, comme Ugly Love et le poignant The Stars Shine In The Sky Tonight. Et puis surtout, pour finir il y a ce Things The Grandchilden Should Know, miracle de franchise et de vérité mise à nue où E nous explique pourquoi ce disque existe. Le genre de chanson qui vous donne le frisson. Essayez donc de traduire les paroles pour voir…
Cet album est sûrement un peu trop long, un peu trop dilué aussi. On peut se dire qu’un choix un peu plus restreint de chansons aurait certainement donné un très grand disque. Mais tel qu’il est, il contient suffisamment de grâce et de belles chansons pour être largement recommandable. Je ne sais pas si cet album a aidé E à se sentir mieux, mais il a su me toucher comme peu d’albums avant lui. Juste pour ça, merci.


Pour plus d'nformations, le site officiel où l'album complet est en écoute :
www.eelstheband.com



Kami : This Is Make-Believe


Titres

Locked-In
The Doubty Screams Of Appearence
The Machineries Of Joy
Memory
Sad Lovers



Je me répète, mais je suis toujours aussi impressionné de voir à quel point Radiohead a pu frapper les esprits et enflammer les imaginations. C’est clair, c’est un des groupes majeurs des 90’s. Mais le plus important est le nombre de vocations qu’il a su faire naître à travers le monde. Kami par exemple. Les quatre de Kami sont français, de Hyères plus précisément. Ils sont encore aujourd’hui très jeunes, mais au plus fort de leur adolescence, juste au moment où on est le plus perméable à ce genre d’expérience intense, ils ont pris Radiohead en pleine tête et en plein coeur. Et apparemment ils ne s’en sont pas vraiment remis. A tel point que Kami est né. Et c’est plutôt une bonne nouvelle.
This Is Make-Believe est leur premier EP. Encore un CD autoproduit. Encore une preuve que l’idéal et le plus simple dans le monde merveilleux de l’industrie du disque est encore de se prendre par la main pour aller au bout de ses rêves. Pas d’attendre en espérant. Pour la suite, on verra plus tard. Et ils ont eu raison de franchir le pas pour faire vivre leur musique. Parce que comme dirait l’autre : ils le valent bien. Ce n’est pas tout d’être influencé par un groupe aussi influent et marquant que Radiohead, il faut encore et surtout savoir s’en démarquer pour vivre sa propre vie. Sinon, aucun intérêt. Et le plus beau, c’est que malgré une filiation évidente à la première écoute, jamais ça ne ressemble à un simple copier / coller. Ils ont su garder le meilleur, à savoir les brisures, ces ambiances entre deux eaux où on s’attend à tout moment à partir en looping, ces climats précieux et lancinants. Bref, tout ce qui fait le charme du maître. Mais l’élève a déjà su se créer son propre univers, juste proche et parallèle. Sur disque, ce groupe dégage déjà une maturité impressionnante, alors qu’il débute presque.
La production est minimale, forcément c’est un début. Mais à défaut d’un son flamboyant et d’une production 24 carats, ils ont des idées et savent les mettre en forme. Locked-In est une première approche plus que convaincante, le genre de morceau qui s’installe sur la durée, au fur et à mesure que la tension monte pour finir par se libérer dans un final où un violon lancinant vient clôturer l’histoire. The Doubty Screams Of Appearance est tout aussi puissant, nettement plus Pop et chantant, mais avec toujours en arrière plan cette sorte de tension indéfinissable, toujours palpable. Tension qui explose à nouveau sur The Machineries Of Joy où un chant décalé côtoie une mélodie vacillante. Tout le contraire de la facilité. Memory est sans doute la chanson qui rappelle le plus leurs maîtres Radiohead, par son climat lancinant qui n’est là que pour mieux préparer l’attaque sonique et par ses bruits de bidouillages électroniques à la Kid A. Et puis le groupe nous laisse sur un Sad Lovers digne des Girls In Hawaii. Même esprit, même talent pour la mélodie douce-amère et la nostalgie tenace. Kami a bien fait de prendre les choses en mains pour nous faire entendre sa musique. Ils en sont encore à la période des promesses, mais elles sonnent déjà presque comme une confirmation.
Pour en savoir plus sur eux, l’interview du groupe est
ici.


Pour plus d'nformations ou pour vous procurer le CD, le site officiel :
www.kami-fr.com



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