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BLACKWATER : L'INTERVIEW





C'est une première pour moi et une première pour Why Not, avec cette interview de Blackwater. Pas la dernière j'espère. Alors un grand merci à Gäël Rutkowski, fondateur du groupe, d'avoir pris le temps de répondre à mes questions. Bonne lecture.



Why Not : De par le style musical que vous vous êtes choisis, vous êtes forcément un peu à part dans le monde musical français. En qualifiant vous même votre style en « irish énervé », vous êtes même carrément seuls en piste. Est ce que ce n’est pas un peu difficile de se faire entendre en France quand on joue un type de musique qui sort tant des sentiers battus ? Comment le vivez vous ?

Gaël Rutkowski : Il est vrai que lorsqu'on joue de la musique irlandaise en France, on s'adresse à un public plus ou moins "initié",même s'il y a un certain effet de mode en ce moment autour des musiques dites "celtiques".
Du fait que nous avons choisi de nous orienter sur une manière particulière d'arranger notre musique (que nous qualifions effectivement "d'irish énervé") nous pouvons nous adresser à un plus large public que si nous jouions  une musique purement traditionnelle. Nous voulons nous démarquer de ce qu'on peut entendre généralement en musique irlandaise en donnant à nos arrangements une direction plus "rock accoustique" .
De ce fait, on entend régulièrement des gens présents à nos concerts dire qu'il ont aimé notre musique parce qu'elle diffère d'une musique irlandaise traditionnelle . Nous avons également de bons contacts avec des gens plus "traditionnalistes" qui apprécient la maniere dont nous nous approprions ces thèmes irlandais.
Cette ouverture nous permet de trouver beaucoup de concerts (environ 80 par ans).
Notre musique sort effectivement des sentiers battus (culture TF1 et compagnie) et ça marche (c'est plutôt rassurant),donc nous vivons ça très bien!



Gaël

WN : D’une manière générale, comment voyez vous le métier de musiciens, est ce un rêve de gosse ou plus un concours de circonstances ? Est ce d’ailleurs votre métier, arrivez vous à en vivre, où faites vous d’autres métiers à côté ?

GR : Tous les 6 (avec Thierry notre sonorisateur) nous avons fait de la musique notre métier. Nous faisons partie des fameux "intermittents du spectacle" (qui mangent le pain de l'unedic).
On arrive à vivre plutôt bien de notre musique et nous faisons la majorité de nos cachets avec Blackwater.(certains membres du groupe jouent également dans d'autres formations ).
Le fait que nous soyons musiciens professionnels est effectivement un rêve de gosse car nous pratiquons tous la musique depuis longtemps , mais aussi un concours de circonstances car nous nous sommes lancés dans l'intermittence avec des groupes qui tournaient assez pour nous permettre de bénéficier du statut.
Nous avons tous, en tout cas, la grande chance de pouvoir vivre de notre passion.



Live

WN : Quelles sont vos influences musicales majeures ? Qui vous a donné l’envie de jouer un jour d’un instrument et de monter sur scène ?

GR : En ce qui me concerne , mes parents sont à l'origine de mon intérêt pour la musique traditionnelle , car ce sont eux qui m'ont emmené dans les bals trad et qui m'ont mis une cornemuse dans les mains.
Le fait de monter sur scène est venu ensuite progressivement avec la pratique musicale en groupe.
Toujours en ce qui me concerne , mes influences musicales majeures sont diverses et variées: j'écoute évidemment beaucoup de musique irlandaise , (nécessaire pour parfaire ma pratique musicale ) , mais aussi beaucoup d'autres musiques traditionnelles (bretagne,europe de l'est,inde...) et du jazz ,du rock, de l'electro (un peu).

Sébastien l'accordéonniste a commencé dans sa région natale ( le Morvan) par un apprentissage musette puis est venu rapidement à pratiquer la musique tradionnelle du Morvan (qui est une région où la musique trad a gardé une grande importance ).
Notre pratique de la musique irlandaise est née de notre rencontre à l'occasion de boeufs dans les bistrots et autres festivals morvandiaux. Nous avons alors créé un groupe qui s'appelait Scariff et nous avons ensuite joué en duo accordeon et uilleann pipes sous le nom de Blackwater avant de rencontrer le restant de la troupe. 

Didier (le plus expérimenté d'entre nous, puisqu'il est intermittent depuis une vingtaine d'années) a commencé son apprentissage musical au conservatoire de Besançon (en violon alto), il a ensuite empoigné  violon , bouzouki et mandoline puis a joué dans une multitude de groupes tels que Susan and the visitors , Neil , Faubourg de boignard , Les infidèles , les half brothers ... Nous l'avons rencontré à l'occasion de l'enregistrement d'un album duo avec Seb sur lequel nous l'avons invité à venir jouer un morceau, il a ensuite completé le duo sur scène.

Gilles est originaire également du Morvan, il a débuté en pratiquant la cornemuse du centre de la France et s'est ensuite mis à la basse électrique. Il a fait également partie avec Didier du groupe Faubourg de boignard. Il a donc ensuite rejoint tout naturellement Blackwater pour apporter la basse qu'il manquait en trio.C'est à cette occasion qu'il s'est mis à la contrebasse.

L'arrivée de Gilles et Didier a alors amené à Blackwater le côté "irish énervé". Nous avons ensuite enregistré notre premier album à 4:"J'ai enterré ma femme et j'ai dansé sur sa tombe".



Sébastien

WN : Jo Macera est un invité parmi d’autres sur votre dernier album, mais il est présent avec vous sur scène. Fait il aujourd’hui réellement partie du groupe ?  Si oui, est ce une volonté de vous orienter progressivement vers une musique moins instrumentale ? Plus rock aussi ?

GR : Nous avons invité Jo Macera à l'occasion de l'enregistrement de "Don't relax,do it".
Nous voulions apporter une certaine progression dans cet album par rapport au premier et l'arrivée du chant marquait une évolution. Jo fait maintenant partie intégrante du groupe (même si nous continuons à jouer régulièrement à 4 car il n'est pas tout le temps disponible ).
Ainsi nous nous orientons vers une musique un peu moins instrumentale, tout en voulant garder sur les chants l'énergie qui est la notre.  Jo est également guitariste, donc nous continuons à faire une majorité de thèmes uniquements instrumentaux.
La venue du chant nous permet d'avoir un rapport plus facile avec le public, et apporte une plus grande diversité à notre répertoire.
On s'oriente peut être  vers une démarche un peu plus rock mais c'est une volonté de notre part et je ne pense pas que cette démarche dénaturera l'esprit de notre musique.


Didier / Gilles

WN : A l’écoute de votre dernier album, on note une ouverture vers des sons nouveaux et un certain mélange des genres. Est ce votre future direction musicale ? Allez vous continuer à élargir l’horizon ?

GR : Sur l'album "don't relax,do it" nous avons effectivement ouvert la porte à des sons nouveaux sur le titre "pint of mint tea" et sur l'intro de "commun day". Nous voulions essayer d'intégrer les samples et la programmation sur quelques titres pour ouvrir davantage notre champ musical.On ne peut pas réellement dire que ce sera notre future direction musicale, mais on continuera à créer quelques titres dans le même registre. Sur un album, ils permettent d'assurer une ouverture vers d'autres horizons et sur scène, ils permettent d'apporter plus de diversité au concert. Depuis l'enregistrement, nous avons créé un autre morceau dans la lignée de "pint of mint tea",il se nomme "radio Bagdad Kemper", c'est un mélange entre des rythmes orientaux et un thème que l'on pourrait qualifier de légèrement "Bretonnisant" (d'où le titre du morceau...). Nous avons sorti ce morceau sur une compilation qui s'appelle "Salon oriental 4" et il figurera sur le prochain album de Blackwater.
Nous n'avons pas une réelle volonté d'orienter notre musique essentiellement dans cette direction, mais nous allons continuer à utiliser ces mélanges avec parcimonie.



Gaël

WN : J’ai eu du mal à trouver votre dernier disque. Est ce une volonté de votre part de rester dans une petite structure d’édition indépendante proche de vous ? Est-ce important pour vous de garder une liberté musicale totale ?

GR : Cela n'est pas une volonté du groupe de rester totalement indépendant puisque l'année dernière nous avons longuement enquêté à la recherche d'un distributeur. Nous en avons trouvé un en Bretagne, mais cette entreprise (dont je tairai le nom...mais les initiés la reconnaitront certainement) est actuellement en liquidation judiciaire!
Nous avons donc très rapidement effectué un retour à la case départ.
Le fait de ne dépendre d'aucune structure de prod (ou autre) est d'un certain côté un avantage car cela nous laisse une totale liberté dans nos créations musicales et cela nous permet de gagner un pourcentage plus important des recettes des ventes d'albums.
Par contre, nous avons un sérieux manque de distribution pour nos disques. Nous en patissons dans le fait que l'album est du coup assez difficile à trouver et que quand on ne dépend pas d'une maison de disques, certaines portes s'ouvrent plus difficilement (magazines , certains festivals...). C'est également plus difficile de se faire connaître.
Donc nous prospectons à nouveau pour trouver une autre maison de disques.



Gilles

WN : Vous êtes originaires de l’est de la France, n’est ce pas trop difficile de faire vivre et faire connaître votre style de musique dans votre région ?

GR : Je ne pense pas que le fait de vivre dans l'est de la France soit un désavantage. Nous souffrons déja beaucoup moins de la concurence, car les groupes de musique irlandaise ne sont pas légions dans la région. Nous réussissons à trouver régulièrement des concerts chez nous car c'est une musique entraînante qui plaît à un public (comme je le disais tout à l'heure) pas forcément "initié".
Mais nous ne nous contentons pas de tourner uniquement dans notre région , ainsi nous jouons un peu partout en France et à l'étanger .



Didier

WN : Avez vous beaucoup tourné à l’étranger jusqu’à aujourd’hui ? Dans quels pays ? Quel a été l’accueil ?

GR : Nous n'avons pas tourné énormément à l'étranger mais nous y sommes allés régulièrement. Nous jouons assez souvent en Espagne car nous avons un tourneur là-bas, mais aussi un peu en Italie cette année ainsi qu'en Suisse.
Nous avons toujours eu un très bon acceuil.  Le public espagnol  est très attentif à notre musique , c'est également un public qui bouge facilement lorsque nous le sollicitons. En Suisse ,il en est de même. Le public Italien est également très attentif mais se manifeste moins facilement.



Sébastien

WN : Comme beaucoup d’autres groupes en France, vous êtes confrontés au silence des médias. L’un des seuls moyens de se faire connaître reste la scène et le bouche à oreille. Est-ce que vous sentez que le fait d’arpenter le pays et d’y jouer partout  commence à porter se fruits ?

GR : Notre musique n'est pas forcément celle qui passe le plus facilement en radio. Mais lorsque nous jouons dans un lieu, nous essayons de contacter, dans la mesure du possible, les journaux et radios locales.
Le fait que nous ayons beaucoup tourné a permis de nous faire connaître; il n'est pas rare aujourd'hui qu'un organisateur nous fasse venir jouer parce qu'il nous a vus ailleurs ou parce qu'il a entendu parler de nous.
De plus en plus , les gens nous contactent pour nous faire jouer, ce qui n'empêche pas qu'il reste toujours un énorme travail de démarchage de notre côté pour pouvoir tourner régulièrement. Nous travaillerons peut être l'an prochain avec un tourneur pour la France et l'étranger, chose qui nous permettrait de nous consacrer essentiellement à notre musique.



Groupe

WN : Vous êtes très à l’aise sur scène, quel est votre meilleur souvenir en live, la plus belle image que vous gardez en mémoire jusqu’à maintenant ?

GR : Nous avons énormément de bons souvenirs de concerts. Une des plus belles images que nous ayons gardée , parmis tant d'autres, est peut être le concert de sortie de l'album "Don't Relax , do it" au "Cylindre" à Larnod (à côté de Besançon). A cette occasion, nous avions fait une résidence de plusieurs jours dans cette salle pour préparer le concert avec tous les invités de l'album. Nous avions monté un bar sur la scène où les invités restaient entre leurs interventions pendant le concert. Tout le monde dansait, aussi bien dans le public que sur scène.
Nous avons gardé de très bon souvenirs de festival comme "les traversées de Tatihou" en Normandie où nous avons rencontré le groupe irlandais "Danù", mais aussi le festival "sur la route de Tullins", cet été, et bien d'autres.



Groupe

WN : Votre musique entre dans le cercle des musiques celtiques. De quels autres groupes vous sentez vous proches ? Qui aimez vous aujourd’hui, qui écoutez vous ? 

GR : Nous nous sentons proches de groupes irlandais tels que Lùnasa ou Solas (qui sont américains). Nous aimons leur musique et nous nous retrouvons dans leur démarche: ils ont un son très personnel (dû à leur manière d'arranger les morceaux). Il y a aujourd'hui beaucoup de jeunes groupes de musique irlandaise qui "dépoussièrent" la tradition (sans la renier).
Nous nous sentons proches également de musiciens comme Jimmy Page et Robert Plant (de Led Zep) (toutes proportions gardées!!!) pour l'énergie qu'ils dégagent et leur utilisation des musiques traditionnelles au sein de leur propre musique. Didier s'est inspiré de certains de leurs morceaux pour faire nos arrangements de violons sur l'album (surtout dans le premier).
Nous écoutons tous néanmoins beaucoup de styles de musiques différents où nous pouvons puiser notre inspiration.



WN : Comment voyez vous votre avenir proche (tournée, nouvel album, projets personnels ou annexes, collaborations, autres…)  ? 

GR : Dans les projets pour l'an prochain, il y a cette éventuelle collaboration avec un tourneur.
Sur le plan artistique nous sommes en train de travailler sur un projet de concert avec un quatuor à cordes bisontin et un percussionniste.
Et nous travaillons également sur les compositions qui figureront sur le prochain album que nous allons enregistrer; nous pensons déjà à quelques invités de marque...




Toutes les photos qui figurent sur cette page proviennent du site officiel du groupe.




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