31 mai 2004
Après sept longues années de silence, la sortie d'un nouvel album de Morrissey est forcément un évènement. Et quand en plus cet album est bon, que demander de plus ? Peut être un autre bel album lumineux d'une débutante nommée Sia.
Morrissey : You are The Quarry
Titres
America Is Not The World
Irish Blood, English Heart
I Have Forgiven Jesus
Come Back To Camden
I'm Not Sorry
The World Is Full Of Crashing Bores
How Could Anybody Possibly Know How I Feel?
The First Of The Gang To Die
Let Me Kiss You
All The Lazy Dykes
I Like You
You Know I Couldn't Last
Le moins qu’on puisse dire est que Morrissey a pris son temps avant de sortir You Are The Quarry. Sept ans c’est long. J’en était même arrivé à me demander si son spleen chronique et son dégoût affiché pour ses contemporains n’avait pas fini par prendre le dessus sur son envie de mettre tout ça en musique. Bonne nouvelle, le Morrissey est de retour. Toujours aussi rabat joie et grinçant. Certainement même encore un peu plus qu’avant. Je dirais même qu’il affiche aujourd’hui un petit côté aigri et acerbe qu’on ne lui connaissait pas vraiment jusque là. J’imagine que ce petit préambule ne donne sûrement pas envie de se pencher plus sur le cas Morrissey. Et bien, et c’est comme d’habitude, ne pas le faire serait une erreur.
Aussi agaçant et grinçant, aussi foncièrement anglais et fier de l’être, aussi tête à claque qu’il soit parfois, Morrissey reste toujours aussi unique et incomparable. A mon sens, il personnifie à lui seul l’anglais, avec toutes ses contradictions, ses passions, sa fierté nationaliste d’ex plus grand empire du monde, ses phobies et ses rejets multiples. Une Angleterre aujourd’hui en voix de disparition, mais que des gens comme lui continuent de perpétuer, contre vents et marées.
Et dans mon cas, il n’y a rien à faire, à chaque nouvel album de Morrissey, je succombe. Tout comme je succombais déjà à chaque nouvelle livraison des Smiths. J’ai moi aussi mes propres contradictions : Morrissey personnifie à peu de choses près tout ce qui m’agace le plus dans le tempérament anglais, mais en même temps, je ne peux pas m’empêcher d’adorer sa musique et ses textes. Allez comprendre…
Revenons à You Are The Quarry. Même s’il n’atteint pas les mêmes sommets que Your Arsenal ou surtout Vauxhall And I, qui reste pour moi son plus bel album, pas loin d’être parfait, son petit dernier est loin d’être ridicule. Il est à classer parmi les bons crus, à peu près dans le même style que ces deux albums là justement. Et quand je dis que Morrissey me parait encore plus grinçant, on peut le constater dès le premier morceau America Is Not The World, dont le titre résume à lui seul le propos. On découvre là un Morrissey carrément cassant et agressif. Ca tape plutôt fort. Et les « I Love You » qui terminent la chanson (faut pas se fâcher avec un si gros marché) ne réussissent pas à adoucir tout ça. Irish Blood, English Heart qui fait référence à ses origines irlandaises est une vraie belle réussite de cet album et un excellent single. On est là très proche de la période Your Arsenal. Et c’est plutôt normal finalement, puisque c’est toujours le fidèle Alain Whyte qui compose les musiques, comme à la grande époque. Tout est donc réuni pour que You Are The Quarry soit une réussite et que le plaisir des retrouvailles soit entier. I Have Forgiven Jesus et Come Back To Camden sont deux autres chansons magnifiques et sensibles comme seul Morrissey semble en avoir le secret. Comme à l’habitude, le style des chansons oscille entre popsongs un peu musclée et ballades émotives. Et dans ce deuxième genre, je vous conseille I’m Not Sorry.
Mais comme d’habitude, le principal sujet d’intérêt de Morrissey, ce sont les tourments de Morrissey (un peu comme pour tout le monde me direz vous), d’où des chansons au titres aussi évocateurs que How Could Anybody Possibly Know I Feel ? ou You Know I Couldn’t Last. Normalement quand quelqu’un vient à parler de ses malheurs, on a plutôt tendance à prendre la fuite. Ce qui est amusant, c’est de voir que quand c’est mis en musique, on en redemande. Surtout quand c’est Morrissey. Let Me Kiss You est une belle chanson Pop toute simple comme Morrissey en a fait trop peu et I Like You a toutes les qualités d’un prochain single d’envergure.
Après sept longues années d’attente, You Are The Quarry ne déçoit pas. Il est un digne successeur des tous meilleurs albums de Morrissey. D’accord, au niveau du style, il n’y a rien de neuf à l’horizon. Mais franchement, ce n’est surtout pas ce qu’on attend de quelqu’un comme lui.
Pour plus d'nformations, le site officiel :
www.morrissey-solo.com
Sia : Colour The Small One
Titres
Rewrite
Sunday
Breathe Me
The Bully
Sweet Potatoe
Don't Bring Me Down
Natalie's Song
Butterflies
Moon
The Church Of What's Happening Now
Numb
Where I Belong
Il existe des chansons qui sont capables de vous emplir tout entier, de vous capturer pour ne plus vous lâcher. Des chansons qui vous hantent littéralement, que vous avez envie d’écouter en permanence, au delà de toute logique. Et il existe des albums qui contiennent des chansons comme ça. Et bien vous savez quoi ? J’ai bien l’impression que l’album de Sia fait partie de ceux là. En ce sens, il ressemble un peu au dernier album de Lhasa, au premier abord agréable, caressant, envoûtant, puis après quelques écoutes, qui deviennent forcément plus attentives, il vous devient indispensable. Un compagnon de route comme on en trouve peu.
C’est sûrement dû en grande partie du à la voix de Sia (en entier, Sia Kate Isobelle Furler, australienne de son état), une voix qu’on a déjà côtoyé sur l’album de Zero 7. Une voix amie, touchante, émouvante, à fleur de peau, qui d’abord vous séduit pour ensuite devenir amie. Amie intime. Ensuite on n’a plus envie de la perdre de vue, plus envie de ne plus l’entendre. Bref, Colour The Small One est un vrai piège. Vous êtes prévenus. Mais un piège dans lequel on tombe (et retombe) avec délice.
La première référence à laquelle on pense lorsqu’on écoute ce disque, c’est Tori Amos, autre femme capable de vous tenir tout entier en son pouvoir à travers quelques notes de pianos et sa seule voix. Sia est capable de ça aussi. Quand on l’écoute ça a l’air évident et on en arrive à se demander pourquoi ce n’est pas toujours comme ça. Pourquoi une voix de femme qui chante ne nous fait pas toujours cet effet la ? Pourquoi ce n’est pas toujours aussi agréable et beau ? On est même parfois presque gêné, tellement on a l’impression d’entrer dans l’intimité de la dame (rien de sexuel la dessous, évidemment !). En même temps, les chansons de Sia ne sont pas forcément des havres de paix, ni des histoires optimistes. Au contraire. Et c’est sûrement pour ça que c’est si beau et touchant. Mais contrairement à celle de Tori Amos, la musique de Sia n’est pas toute entière basée sur des compositions au piano. Chaque chanson a sa propre identité musicale et la variété des ambiances fait aussi partie des qualités principales du disque.
Au moment ou j’écris ses lignes, j’écoute Don’t Bring Me Down, sublime, et j’ai presque envie d’arrêter d’écrire pour pouvoir l’écouter tranquillement. Et la majorité de ce disque me fait cet effet là. L’envie de tout laisser tomber pour pouvoir déguster au mieux. Colour The Small One est un album qui demande à être écouté, c'est-à-dire en ne faisant rien d’autre que ça. Il se déguste par petites touches. Et chaque écoute supplémentaire fait découvrir et ressentir encore des sensations nouvelles. Certains commencent à comparer Sia et ce disque à Dido. Sachez que ceux qui disent ça sont forcément sourds comme des pots. Rien en commun, à part le timbre de voix tout aussi caressant et agréable. Le frisson, lui, n’appartient qu’à Sia. Dans ce disque, on a droit à des chansons comme le très intimiste et touchant Rewrite, l’inoubliable Breathe Me, le très doux et réussi The Bully (co-écrit avec Beck), le déjà cité Don’t Bring Me Down qui me fait totalement craquer ou le très Soul Where I Belong. D’accord, tout n’est pas parfait sur ce disque. Je trouve même que certains morceaux tombent à plat et sont carrément oubliables (Moon et The Church Of What's Happening Now surtout) et n’ont pas vraiment leur place ici, mais ils côtoient de tels bijoux que Colour The Small One passe très facilement l’obstacle.
Sia n’a vraiment l’air ni joyeuse, ni très bien dans ses pompes, si on en juge par les thèmes de ses chansons (l’abandon, le regret, le poids de ses fautes, entre autres…), mais franchement si elle peut continuer à nous offrir des chansons aussi inoubliables que Don’t Bring Me Down ou Breathe Me, je n’ai vraiment aucune envie qu’elle aille mieux.
Pour plus d'informations et pour écouter des extraits de toutes les chansons du disque, le site officiel :
www.siamusic.net
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