31 janvier 2005
Et encore une fois, on assiste à la renaissance d'un groupe qu'on pouvait croire mort depuis longtemps. Trisomie 21 nous offre ici son meilleur album, pendant que Mercury Rev met un peu plus de Rock dans sa Pop précieuse.
Trisomie 21 : Happy Mystery Child
Titres
Red Or Green
She Dies For Love
No Search For Us
The Sweet Running Over
Come In Paradise
The Touch Of Any Flame
No Works Of Words
Personnal Feelings
Midnight Of My Life
Forsaken Mysteries
Ce
groupe là, je l’avais lâchement abandonné il y a une bonne dizaine d’années, à
la suite de quelques disques pas vraiment indispensables et surtout au détour
d’un album que je considère comme raté (Plays The Picture) qui m’avait
poussé à croire que c’était fini pour de bon. Panne d’idées, panne
d’inspiration, panne d’identité même, qui avait poussé le groupe à changer son
nom en un T21 passe partout et nettement plus consensuel. Pour moi, tout était
dit. On pouvait passer à autre chose sans remords, tout en continuant à écouter
de temps en temps et avec nostalgie leurs premiers albums et des morceaux aussi
inoubliables que Last Song, La
fête Triste, Il Se Noie ou Jakarta.
Et
pourtant, ce groupe là, je l’ai aimé comme peu d’autres groupes français. Passions
Divisées et Chapter IV reste pour moi des exemples de ce que ces
lillois ont fait de mieux, de ce que la New Wave made in France (ou plutôt Cold
Wave dans leur cas) a produit de plus intéressant et de plus personnel, malgré le dédain affiché de
tout le petit monde parisien branché de l’époque ainsi que des médias en
général. Une musique sombre, presque inquiétante, en tous cas toujours
déstabilisante et dérangeante, tout comme leur nom. Des lignes de basse
lancinantes qui vous vrillent le cœur, des guitares acides et un chant à la
limite de l’incantation. Des ambiances lancinantes à couper le souffle. Voilà
ce qu’était Trisomie 21 à son meilleur niveau. C’était il y a longtemps. Alors
franchement, ce n’est pas un nouvel album de Trisomie 21 sorti fin 2004, en
plein revival 80’s, qui allait me faire changer d’avis sur eux, surtout après
un silence discographique de 7 ans ressemblant franchement à une sorte de mort
clinique. Jusqu’à ce qu’on me dise que peut être, malgré tout, je devrais quand
même essayer de tendre une oreille, d’écouter ce Happy Mystery Child. Et
je l’ai fait. Et j’ai pris une belle claque. Comme quoi, il ne faut jamais
enterrer définitivement un groupe talentueux. Certains ne perdent jamais leurs
qualités, elles peuvent parfois se diluer ou donner l’impression de disparaître
à force d’usure, de routine et de lassitude, mais elles sont bien toujours là,
seulement endormies. Il suffit souvent de laisser les batteries se recharger
pour que ça reparte de plus belle. Et dans le cas de Trisomie 21, ça redémarre
comme aux plus beaux jours. Ceux de Chapter IV par exemple.
Le son
de Trisomie 21 est immédiatement reconnaissable, mais pourtant quelque chose a
changé. Je ne dirais pas que leur son est devenu joyeux (il y a encore de la
marge, ils sont toujours les mêmes « optimistes contrariés » comme
ils se qualifient eux même), mais il est en tous cas plus aéré et moins noir.
Plus facilement accessible aussi, mais sans sacrifier quoi que ce soit à sa
personnalité inimitable. Cette évolution dû en grande partie au chant de
Philippe Lomprez, à la fois plus présent et plus clair que sur leurs
productions passées. Mais c’est aussi l’ensemble de leur musique qui a su
évoluer en s’imprégnant de toutes les sonorités actuelles pour ensuite les
digérer. Le son de Trisomie 21 en est devenu étonnement actuel. Bien qu’il
repose toujours sur cette même fantomatique basse Cold Wave, les synthés se
taillent la part du lion et les guitares claires ne se cachent plus. Le
résultat est magnifique, parfois même lumineux (les aériens She Dies For
Love et No Works Of Words,
intro magnifique puis montée en puissance de Midnight Of My Life), évident (les puissants et tubesques No
Search For Us et Personal
Feelings , le très clair The Touch Of Any Flame). Les
atmosphères sont à la fois incroyablement denses et souvent flottantes, les
mélodies vous caressent, vous enveloppent juste avant de vous devenir
indispensables.
C’est bien simple, dès la fin de ce disque, on est pris par une
irrésistible envie d’appuyer à nouveau sur la touche Play. Trisomie 21 ne fait
pas que revenir sur le devant de la scène, il nous offre un Happy Mystery Child qui n’est pas
seulement son meilleur album depuis longtemps, mais son meilleur album tout
court. Le plus accessible et aussi le plus beau.
Pour plus d'nformations, le site officiel :
www.trisomie21.com
Mercury Rev : The Secret Migration
Secret For A Song
Across Yer Ocean
Diamonds
Black Forest (Lorelei)
Vermillion
In The Wilderness
In A Funny Way
My Love
Moving On
The Climbing Rose
Arise
First-Time Mother'S Joy (Flying)
Down Poured The Heavens
Mercury
Rev est vraiment un cas à part. Il fait partie de ces groupes qui ne remueront
jamais les foules. Ils ne rempliront jamais les stades. Mais ils s’en foutent.
Eux, leur paradis est ailleurs que dans la popularité ou le star-sytem. Eux,
ils créent de la musique. Comme ils la veulent et comme ils l’entendent.
C'est-à-dire pas comme les autres. Bien loin des formats et des modes, ils
suivent leur route qui les mène vers un ailleurs qui leur est propre. Et c’est
ça qui est si rassurant avec eux. Je trouve rassurant de pouvoir constater
qu’un groupe peut prendre plus de 6 ans pour donner une suite au sublime Deserter’s Songs. Rassurant de voir
qu’un groupe est capable de se payer son propre studio juste pour ne plus avoir
à subir la tyrannie et la contrainte du coût horaire d’un studio professionnel.
Juste pour pouvoir prendre son temps, tenter des choses, attendre de voir si
telle association de sons ou d’harmonies serait mieux que telle autre. Bref,
prendre le temps de créer la musique et pas de « faire » de la
musique.
Et le
pire avec eux, c’est que même si j’avais envie de découvrir leur nouvel album, je
n’étais pas impatient. Juste sûr que ce serait beau, c’est tout. Je suppose que
leur façon de vivre la musique sans stress doit déteindre sur ceux qui l’écoutent.
Et dès Secret For A song, le premier
morceau, on sait que The Secret Migration
sera beau. Et on se rend aussi compte que bien qu’ils aient été absents pendant
6 ans, leur musique est restée bien présente, aux travers de groupes qui ont
largement puisés leur inspiration chez eux. Je pense surtout aux Polyphonic Spree, tout récemment. La
musique de Mercury Rev est toujours cette sorte de Pop obsédée par la musique
symphonique ou l’inverse. Les Mercury Rev n’ont jamais vraiment choisis leur
camp, à la manière du Divine Comedy de Neil Hannon. Mais on n’a vraiment pas
envie de leur reprocher ce trait de caractère. Surtout quand on entend des
bijoux comme Diamonds, Vermillion ou My Love. Mais si le groupe de Jonathan
Donahue continue à voyager entre les mondes, il a pourtant décidé cette fois ci
de se rapprocher un peu plus du monde du Rock. Les guitares sont plus présentes
que sur Deserter’s Songs. Les
chansons y gagnent en spontanéité et en facilité. Elles y perdent en revanche
un peu en délicatesse. Mais ce n’est pas forcément un défaut. La preuve ?
Ecoutez The Climbing Rose ou Arise. Si vous connaissez bien le
groupe, vous ne pourrez qu’être surpris par ce nouveau Mercury Rev,
reconnaissable entre mille, mais tellement plus joueur que par le passé. Les
guitares sont aujourd’hui de sortie. Les orchestrations sont toujours aussi
fouillées et parfois complexes, mais les chansons sont nettement plus pêchus et
immédiates.
Deserter’s Songs avait un côté hivernal,
c’est en tous cas comme ça que je le ressens. Il avait cette sorte de chaleur
qu’on peut ressentir en entrant dans un endroit chaud et douillet alors qu’à l’extérieur
le vent vous glace jusqu’aux os. Il m’a toujours fait penser à l’hiver. Je l’ai
réécouté il y a quelques jours et il collait parfaitement à la météo du moment.
Idéal pour regarder la neige tomber au dehors. The Secret Migration est tout différent. Lui, c’est au printemps qu’il
me fait irrésistiblement penser. Dans ce disque, il y a une sorte d’éclosion,
au sens où Mercury Rev semble naître ou plutôt renaître. Sans rien renier du
passé, le groupe laisse exploser ses idées et ses envies. Il laisse libre court
à ses inspirations du moment, qui sont juste un peu plus proches du Rock que
par le passé. Et ça donne des petites chansons Pop qu’on a même envie de
fredonner (Across Yer Ocean) et ça
aussi c’est assez nouveau. Mais ce qui est parfait, c’est que ça n’enlève pourtant
rien au côté précieux de leur musique. Ca reste leur marque de fabrique quoi qu’il
arrive.
Alors,
même si The Secret Migration n’atteint
pas les sommets de Deserter’s Songs (mais
arriveront ils à reproduire un jour ce miracle là ?), ça reste un bel album qui gravite nettement au dessus de la moyenne
de la production discographique actuelle. Quel que soit le disque par lequel on
découvre ce groupe, le principal est de ne pas passer à côté. Parce que comme d'habitude
ce n'est ni sur les radios ni à la télé que vous risquez de les entendre.
Pour plus d'nformations, le site officiel :
www.mercuryrev.net
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