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27 février 2006


Deux fortes personnalités et deux univers très personnels cette semaines. Eels se met à nu pendant qu'Olivia Ruiz impose son univers délicieux.




Eels : With String Live At Town Hall


Titres

Blinking Lights (For Me)
Bride Of Theme From Blinking Lights
Bus Stop Boxer
Dirty Girl
Trouble With Dreams
The Only Thing I Care About
My Beloved Monster
Pretty Ballerina
It'S A Motherfucker
Flyswatter
Novocaine For The Soul
Girl From The North Country
Railroad Man
Like Birds
If You See Natalie
Poor Side Of Town
Spunky
I'm Going To Stop Pretending That I Didn'T Break Your Heart
Suicide Life
Losing Streak
Hey Man (Now You'Re Really Living)
Things The Grandchildren Should Know


Eels With Strings, je ne sais pas pourquoi mais connaissant l’humour noir et décalé de Mister E., cet humour qu’il cache si bien sous une épaisse carapace dépressive, ce titre là me fait un peu penser à un gag. En référence à des choses du genre Coca avec des bulles ou Nutella avec des noisettes. Et pourtant, cette association là a tout pour faire rêver les admirateurs du monsieur. Dont je fais partie. Parce que la musique de Mark Oliver Everett (Alias E. pour ceux qui ne sauraient pas encore), bien que très « produite » et très enrobée de trucages sonores divers m’a toujours donné l’impression de ne tenir qu’à un fil, d’être fragile et légère comme une plume. Alors, juste soutenue par un quatuor à cordes (plus quelques instruments divers et assez improbables, quand même), ça fait forcément saliver. J’ai toujours été persuadé que les chansons de Eels seraient superbes sans habillage, maintenant je peux le vérifier.

Ce live n’est pas à proprement parler un disque unplugged comme la mode actuelle semble l’exiger. Ici, il y a de l’électricité. Peu, mais il y en a quand même. En fait, les chansons sont ici retravaillées, pas seulement débranchées. Et puis parce que Eels ne serait plus Eels sans une dose raisonnable de bizarrerie, on a droit à des instruments inhabituels sur scène, comme le piano jouet, la scie musicale ou d’autres que j’ai plus de mal à identifier (sur le livret on parle aussi de poubelle, de valise, etc…). Pour les reconnaître tous, il faudra plutôt se diriger sur la version DVD de ce disque qui doit elle aussi être très recommandable.

Cet album correspond finalement à tout ce que j’avais déjà fantasmé concernant la musique de Eels. Le dépouillement lui va à merveille et les chansons ici présentes sont pour la plupart des bijoux. C’est sûr, c’est plus facile quand elles sont excellentes dès le départ dans leur version originale, mais quand même. Et puis il y a toujours cette voix brumeuse et voilée, qui ici atteint des sommets dans le rocailleux. Sur scène, la voix de E. paraît encore plus enrouée et fatiguée, genre Tom Waits en moins guttural. Ce qui colle parfaitement à l’atmosphère intime du concert et aux orchestrations délicates. Autre qualité, rare sur un live, le public ferme sa gueule pendant les morceaux et se contente de s’exprimer bruyamment entre, comme s’il était lui aussi happé par l’ambiance, tous les sens en éveil et attentif pendant les chansons. Ou plus sûrement est-il tout simplement sous le charme.

Concernant le choix des morceaux, il s’agit quand même de la tournée de promotion de l’excellent double album Blinking Lights (voir mon best of 2005), même si c’est ici en version unplugged. On a donc droit à une majorité de titres tirés de ce disque. Mais comme toujours en live, il en faut pour tout le monde, alors on trouve aussi de plus vieux morceaux (on trouve même The Only Thing I Care About, une antiquité qui date de 1993, quand Eels n’existait pas encore et que Mark Oliver Everett sévissait en solo). Et ce sont justement ces morceaux là qui ont été le plus profondément chamboulés lors de ces concerts. Les chansons les plus récentes restent par contre assez fidèles aux originaux, comme ce Blinking Lights (For Me) d’ouverture. Et dès le départ, on est instantanément sous le charme de ce clown triste qu’est Mark Oliver Everett. La beauté de cette chanson si simple est assez renversante. Sa douce mélancolie devient la nôtre. Je ne vous infligerai pas le détail des 22 titres (quand même) de cet album, mais cette ballade en compagnie de Eels est un vrai bonheur. Un peu comme toutes ces petites choses toutes simples, tous ces petits moments uniques, qui rendent la vie belle à vivre, malgré tout. Pour ma part, sur ce disque j’ai quand même un petit faible pour ce passage qui voit se succéder des chansons comme Dirty Girl et son steel guitar, Trouble With Dreams qui donne un petit coup de fouet et The Only Thing I Care About, carrément bouleversant. Tout comme It’s A Motherfucker, sublime de délicatesse, contrairement à ce que son titre laisse toujours supposer. Il y en a pas mal d’autres qui sont aussi capables de vous donner le frisson (If You See Natalie, I’m Going To Stop Pretending That I Didn’t Break Your Heart où les violons déchirent le cœur et puis surtout Things The Grandchildren Should Know qui me semble de plus en plus être une des chansons essentielles de son répertoire).

Comme espéré, Eels With Strings est un disque qui permet de redécouvrir toutes ces chansons sous un jour encore plus magique, tellement le dénuement lui va bien.



Pour plus d'nformations, le site officiel : www.eelstheband.com




Olivia Ruiz : La Femme Chocolat

Titres

J'Traîne Des Pieds
La Femme Chocolat
I Need A Child
Non Dits
Thérapie De Groupe
La Petite Valse De Narbonne Plage
Quijote
Cabaret Blanc
Goûtez-Moi
Vitrier
La Petite Voleuse
La Fille Du Vent
De Toi A Moi Il


Et voilà, j’ai quand même fini par m’intéresser de plus près à Olivia Ruiz. C’est pas trop tôt diront tous ceux qui connaissent sa musique. Pour tous les autres, il est grand temps de tendre une oreille vers cette fille là. J’avais déjà entendu quelques chansons de son premier album, J’aime Pas L’amour et j’avais plutôt apprécié le style et surtout la voix, mais sans m’attarder plus que ça sur son cas. Et puis à force d’entendre dire par tout le monde que cette chanteuse là vaut le détour, et surtout de voir que les Weepers Circus la considèrent comme leur petite sœur, j’ai pris le temps d’écouter La Femme Chocolat. C’est pas trop tôt, d’accord. Mais surtout c’est pas trop tard.

Je savais déjà qu’Olivia Ruiz, c’était une voix qui sort des sentiers battus (entre Piaf pour l’aspect chanteuse réaliste et Betty Boop pour le côté léger), un univers vraiment personnel. Oublié La Star Ac’ dont on se demande bien ce qu’elle était allé y faire. Parce que si tous les pensionnaires de cette bouffonnerie avaient autant de personnalité qu’Olivia Ruiz, le paysage serait nettement plus beau dans la chanson française. Et pour vous dire à quel point cette chanteuse là fait l’unanimité autour d’elle, il n’y a qu’à voir tous les gens qui ont collaborés à ses deux premiers albums ou sur des projets annexes : Juliette, Philippe Prohom, Weepers Circus, Joseph Racaille, Mathias de Dionysos, Tryo, François Hadji Lazaro, les Têtes Raides et j’en passe. Rien à voir avec la Star Ac’, on en conviendra. Mais une belle brochette d’artistes au sens noble du terme. Alors forcément, l’écoute de La Femme Chocolat s’annonce bien. Et ce disque donne exactement ce que son titre laisse espérer. C’est délicieux. A commencer par J'Traîne Des Pieds qui a vraiment tout de la chanson à croquer. Petite et légère ballade Electro Folk aux faux airs de Manu Chao, qui marque bien plus l’esprit qu’il n’y parait à la première écoute. Ca se poursuit avec La Femme Chocolat, chanson écrite par Mathias Malzieu (Dionysos), petit bijou gourmand et poético-décalé typique du bonhomme aux accents presque Gainsbourguiens. Ca c’est le côté marrant et second degré d’Olivia Ruiz. Un peu plus loin, le très beau Non Dits, en duo avec Christian Olivier (Têtes Raides) présente l’autre versant de l’univers de la chanteuse, nettement plus mur et profond. Mais Olivia Ruiz sait aussi écrire et composer comme le prouve Thérapie De Groupe qui crée un beau décalage entre des paroles si dures sur une joyeuse mélodie sautillante ou encore le tonitruant Quijote, qui retourne vers ses racines espagnoles en sonnant presque comme la Mano Negra.

Et puis il y a cette voix qui ne ressemble à aucune autre, puissante et sensible. Sur le très beau Le Cabaret Blanc, écrit par Christophe Mali (Tryo), elle fait merveille en donnant à cette chanson un côté à la fois nostalgique et complètement optimiste. Sur La Fille Du Vent, elle se livre carrément en nous parlant d'elle. Finalement, quel que soit le style ou le thème, qu’il soit écrit par elle ou par quelqu’un d’autre, Olivia Ruiz se l’approprie et en fait sa création propre. C’est assez sidérant de voir à quel point le travail de la voix donne à chaque chanson une personnalité unique. Olivia Ruiz donne à ses chansons un style qui se rapproche de ce qu’on pourrait appeler la nouvelle chanson réaliste, finalement assez proche dans l’esprit de ce François Hadji Lazaro a fait avec le groupe Pigalle. Mais la sensibilité féminine adoucit nettement les angles et rend les choses plus belles, même si les thèmes abordés ne sont pas toujours marrants.

Comme son titre l’indique, La Femme Chocolat est un disque à croquer à pleines dents. Parce qu’Olivia Ruiz parle de la vie mieux que personne et qu’elle habite ses chansons d’une façon qu'on avait plus entendue depuis longtemps.



Pour plus d'nformations, le site officiel : www.olivia-ruiz.com


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