19 avril 2004
Le principal c'est de finir par prendre le train, même si pour ça il faut le prendre en marche. C'est ce qui m'arrive avec le deuxième album de Luke qui prouve que le Rock en français a encore de beaux jours devant lui. A l'inverse, après s'être essayé au Rock, Divine Comedy revient à ses premières amours Pop symphoniques.
Luke : La Tête En Arrière
Titres
Comme Un Homme
Soledad
La Sentinelle
Le Reste Du Monde
Hasta Siempre
L'espèce Humaine
Seveso
Petite France
Tout Va Bien
Ressource Humaine
Zoé
Je ne connais pas La Vie Presque, premier album de Luke à la belle réputation. La Tête En Arrière est le disque par lequel je découvre ce groupe. Et pour moi, ça ressemble à une belle révélation. Même si on sent que ce groupe n’a pas les moyens de se payer la production qu’il mériterait, il compense largement par les idées et la force de ses chansons. Du coup, leur son est brut et tranchant, ce qui n’est pas forcément un défaut dans leur cas. Leurs chansons n’ont pas besoin de plus de fioritures pour être efficaces. Et ce type de son leur va plutôt bien au tein.
Curieusement, la première référence qui vient à l’esprit quand on écoute La Tête En Arrière est Noir Désir. Pas le Noir Désir énervé, les nerfs à vif et la violence en étendard, non. Une sorte de variante apaisée de Noir Désir, un peu plus introvertie, mais toute aussi enragée sous le calme apparent de la surface. Mais cette comparaison est peut être un peu forcée, tellement il est vrai que j’ai envie de trouver un palliatif à l’absence de Noir Désir. Si un groupe pouvait prendre leur place, ce serait idéal. Mais même si personne n’est irremplaçable, chacun est unique, alors n’insistons pas. Et pour en revenir à Luke, ce groupe a suffisamment de personnalité pour exister par lui même. Et même si le phrasé du chanteur rappelle souvent Bertrand Cantat, même si leur musique vous donne le même coup de poing dans l’estomac, les mêmes décharges d’adrénaline, Luke est un vrai groupe, surtout pas un ersatz.
Luke possède cette même énergie brute, cette même évidence dans les mélodies. Et j’arrêterai là avec les comparaisons. Luke sait écrire des chansons Rock comme peu de groupes chez nous savent encore le faire. J’ai fait connaissance avec leur musique au travers de Comme Un Homme, une chanson qui sait vous donner un bon coup de pied au cul. Un vrai bon Rock donc, dans le genre Eiffel ou Blankass. Mais ce n’est que le premier de toute une série. Soledad est encore plus efficace dans le genre brûlot. Cette chanson est tout simplement une vraie réussite qui sait mêler paroles fédératrices et énergie mélodique. Un tube, si les radios… Mais ça c’est un autre débat. Les paroles intelligentes sont une autre caractéristique marquante de ce disque. Ecoutez La Sentinelle ou Petite France, vous comprendrez ce que je veux dire. Mais Luke, ce n’est pas seulement cette énergie Rock qui fait sa force. Le Reste Du Monde réussi le tour de force de mêler le monde du Rock pur et dur et celui de la chanson qu’on a envie de chanter à tue tête, pendant que L’espèce Humaine ou Seveso, échappées acoustiques, prouvent que ce groupe est à l’aise partout et dans toutes les configurations. A l’aise et même carrément facile. Ce groupe là donne même l’impression d’avoir encore une belle marge de progression. Il n’y a aucun remplissage dans ce disque, rien de trop, et c’est à ça qu’on reconnaît ceux qui ont ce qu’il faut pour aller plus loin. Et Luke fait bien partie de ceux là.
La fin du disque souffle le chaud brûlant et le frais, avec Tout Va Bien et Ressource Humaine, énergiques et tranchants à souhait, suivis de Zoé, idéal acoustique pour retomber doucement sur terre. La Tête En Arrière est un album très prometteur, en français dans le texte, à la fois urgent, nerveux, chaleureux, touchant et enthousiasmant. Essayez donc de vous rappeler depuis quand vous n’avez pas rencontrer tout ça dans un seul et unique album français. Ca fait longtemps, forcément. Finalement, le seul reproche que je trouve à formuler à propos de ce disque, c’est sa durée. A peine plus d’une demi-heure, c’est franchement un peu court. Mais aucune minute de ce disque n’est inutile, ça compense largement.
Pour plus d'nformations, le site officiel :
www.luke.com.fr
The Divine Comedy : Absent Friends
Titres
Charmed Life
Sticks & Stones
Leaving Today
Come Home Billy Bird
My Imaginary Friend
The Wreck Of The Beautiful
Our Mutual Friend
The Happy Goth
Freedom Road
Laika's Theme
Absent Friends
La dernière fois qu’on avait eu des nouvelles de Neil Hannon, c’était avec l’album Regeneration, très différent de tout ce qu’il avait produit jusque là. Le plus parfait exemple de dandy à l’anglaise (je sais, il est irlandais, mais du Nord, donc assimilé Britannique), bien élevé, propre sur lui, pas une mèche qui dépasse, pas une note plus haute que l’autre, avait changé son fusil d’épaule. Il avait délaissé sa musique si fine et délicate pour quelque chose qui se reprochait plutôt du Rock. L’essai m’avait paru assez réussi. Pas grandiose, mais plutôt pas mal. Apparemment, le principal intéressé a décidé que ce monde là, ce style là, n’étaient finalement pas les siens. Absent Friends marque un net retour vers ses premières amours, vers cette musique si ouvragée et si intelligemment écrite.
Depuis ses débuts, j’ai beaucoup d’affection pour la musique de Neil Hannon, même s’il n’a pas toujours su échapper à la grandiloquence. Cet obsédé du beau geste, de l’accord idéal, de la mélodie parfaite s’est parfois laissé emporter par sa propre exigence, jusqu’à en devenir par moment carrément imbuvable. L’exigence c’est bien, la prétention et les chevilles qui enflent, c’est nettement moins passionnant. A mon sens, son meilleur album à ce jour reste A Short Album About Love, disque magique où il est parvenu à laisser de côté tous les artifices symphoniques derrière il se cache souvent, pour se révéler à nu, tel qu’il est vraiment : un superbe compositeur et un songwriter pourri de talent. Mais ce petit miracle ne s’est jamais vraiment reproduit. En tout cas pas sur toute la durée d’un album. On a eu droit ici ou là à de grandes chansons, mais jamais à un vrai grand album.
Soyons clair tout de suite, Absent Friends n’est pas non plus le chef d’œuvre que Neil Hannon me semble capable d’écrire. Une fois de plus, cet album est assez réussi, mais égal à ce qu’il a déjà produit jusqu’ici. Pas plus. J’en attends peut être trop, mais puisqu’il est lui même aussi exigeant avec sa musique, on est en droit d’en attendre plus. On le sent ici un peu en roue libre, tranquille, ce qui chez lui est de toute façon largement suffisant pour faire un bon album. Il est de retour sur son terrain de prédilection : la Pop symphonique. C’est un peu comme si après avoir tenté de chausser des santiags trop petites pour lui il était content de retrouver ses pantoufles préférées. Si confortables et si familières. Ce disque me donne un peu cette impression là. C’est un retour aux sources. On est de nouveau en terrain connu, sans surprise. C’est l’avantage de l’inconvénient, ou le revers de la médaille si vous préférez. Aucune surprise à attendre, juste cette même tendance naturelle à composer des petites symphonies Pop qu’on aime tant. Finalement, en attendant son hypothétique chef d’œuvre qui reste encore à venir, on s’en contentera. Absent Friends est un album du niveau de ce que Neil Hannon nous a déjà offert. Dès le départ, Charmed Life nous permet de comprendre que le Divine Comedy des débuts est de retour. C’est une nouvelle fois cette subtile alliance entre musique classique et Pop classieuse, entre musique de film et chanson. Je trouve d’ailleurs étonnant que Neil Hannon n’ai jamais fait de bande son pour un film, tellement sa musique me paraît visuelle et cinématographique. Idéale pour mettre en valeur une image. Peut être plus tard, on ne sait jamais. Yann Tiersen, invité à jouer sur Sticks And Stones lui aura peut être donné des idées. En attendant, c’est le grand retour de l’orchestre symphonique pour accompagner ou magnifier les compositions de Neil Hannon, comme d’habitude très hauts de gamme.
Et même si j’ai l’impression qu’il se repose un peu sur ses lauriers, des chansons comme Sticks And Stones, magnifiquement orchestrée, le single Come Home Billy Bird qui renoue avec une Pop plus simple et accessible ou la superbe Our Mutual Friend, ma préférée sur ce disque, me font dire que même avec un bras attaché dans le dos, les yeux bandés et les oreilles bouchées, Neil Hannon est capable de composer de grandes musiques. Je ne parle même pas ici de chansons, ce serait réducteur, tellement son talent d’écriture est immense. Il est capable d’écrire de grandes musiques et j’ai même parfois l’impression que son désir de se cantonner à la chanson est une erreur, tellement il me paraît doué.
En fait, si vous avez aimé Divine Comedy par le passé, Absent Friends, qui porte très bien son titre, vous donnera l’impression de retrouver un ami cher, perdu de vu depuis un bon moment. Par contre si vous ne connaissez pas encore, précipitez vous plutôt sur A Secret History, qui retrace impeccablement la carrière et les divers bijoux musicaux de Neil Hannon durant la décennie '90.
Pour plus d'nformations, le site officiel :
www.thedivinecomedy.com
© Copyright 2004 Why Not ?