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12 septembre 2005


Coincidence visuelle cette semaine avec deux photos de femmes couchées, mais deux albums pourtant radicalement différents l'un de l'autre.




Antony And The Johnsons : I Am A Bird Now



Titres

Hope There's Someone
My Lady Story
For Today I Am a Boy
Man Is the Baby
You Are My Sister
What Can I Do?
Fistful of Love
Spiralling
Free at Last
Bird Guhl


J’ai finalement redécouvert ce disque par hasard, après en avoir entendu parler il y a quelques mois et l’avoir laissé passer sans y faire trop attention. Et aujourd’hui je l’entends enfin. Et c’est un vrai choc. Ou plutôt un bouleversement, parce qu’après l’écoute de I Am A Bird Now, on ressort différent. Si on prend la peine d’y entrer, c’est le genre d’album dont on ne ressort pas totalement indemne.
C’est typiquement le genre de disque qui divise les gens en deux grandes catégories : ceux qui adoreront cette musique pour longtemps et ceux qui vont la rejeter dès les premières notes et le premier contact avec la voix si surprenante d’Antony. Antony a une voix rare, étonnante, presque androgyne. En fonction des morceaux, on a tantôt l’impression d’entendre chanter une femme ou un homme. C’est la première chose qu’on retient, cette voix rare. Un puis, au fur et à mesure que coulent les chansons, on entre dans son univers. Et là on ne sait plus si on doit rire ou pleurer, si c’est beau ou simplement pathétique. Ce type qu’on ne connaît pas et qui nous déballe son intimité, c’est assez dérangeant. Parce qu’il faut savoir qu’Antony est plutôt mal dans ses pompes. Ou plus exactement mal dans son corps. Un corps d’homme qu’il n’aurait pas choisi si il avait eu le choix. Et par extension, son univers est forcément différent de celui du commun des mortels. Ses interrogations et ses doutes, sur lui-même et sur les autres, sont le centre de cet album. Avec en pièce centrale un For Today I Am A Boy qui ne cache rien : « One day I’ll grow up, I’ll by a wonderful women. One day I’ll grow up, I’ll by a wonderful girl. But for today, I am a child. For today, I am a boy (Un jour je grandirai et je serai une superbe femme. Un jour je grandirai et je serai une superbe fille. Pour l’instant je suis un enfant. Pour l’instant je suis un garçon)”. Mais il n’y a pas que les thèmes des chansons, il y a aussi cette façon de chanter, cette voix qui vous transperce. On est bien au-delà de la mélancolie, on est dans un univers parallèle à la fois incroyablement beau et touchant mais aussi parfois triste comme la mort. Du coup, on ne sait plus où on habite, on ne sait plus quoi penser. On est tout entier plongé dans son monde. Et c’est à la fois délicieux et presque malsain. Chacun ressentira ça à sa façon. Mais tous ceux qui entreront un jour dans ce disque partageront un moment d’intimité unique. Et des disques capables de vous bouleverser comme celui là, c’est simple, je n’en connais pas. Des disques que j’ai trouvé esthétiquement beaux, des albums qui m’ont touchés, il y en a eu. Mais des disques qui réunissent les deux aussi magnifiquement que ce I Am A Bird Now, je n’en connais pas d’autre.
La musique des Johnsons est avant tout au service de la voix d’Antony et ne fait que la mettre en valeur. C’est une musique qu’on pourrait qualifier de romantique, comme savent en faire Maximilian Hecker ou les Tindersticks. Mais la voix d’Antony est tellement plus habitée qu’on n’écoute pas seulement sa musique, on la vie de l’intérieur. Cette voix là est la voix la plus Soul que j’ai entendu depuis longtemps, comme sur ce Fistfull Of Love qui nous remet en mémoire ce que devrait toujours être un morceau Soul : une élévation de l’âme. Et là, c’est le cas.
On trouve ici des invités de marque qui ont apparemment tous succombés aux charmes uniques de ce personnage : Devendra Banhart, Boy George, Lou Reed, Rufus Wainwright sont tous venus donner de la voix. Et quand vient le moment de quitter Antony, au bout de seulement 35 petites minutes, c’est avec un Bird Guhl qui nous emmène sur un battement d’aile. A ce moment, on ne sait pas si il faut se réjouir de quitter un univers si torturé ou être triste de sortir de quelque chose de si beau. Alors on le réécoute pour être sûr. Encore et encore.


Pour plus d'nformations, le site officiel :
www.antonyandthejohnsons.com




Team Sleep : Team Sleep


Titres

Ataraxia
Ever (Foreign Flag)
Your Skull Is Red
Princeton Review
Blvd Nights
Delorian
Our Ride To The Rectory
Tomb Of Liegia
Elizabeth
Staring At The Queen
Ever Since Ww1
King Diamond
Live From The Stage
Paris Arm
11/11



Ce disque là a bien failli ne jamais voir le jour. Ca aurait pu être l’histoire d’un malentendu, un rêve qui tombe à l’eau.  Parce ce que ce disque là n’est pas le premier vrai album de Team Sleep. Il y a quelques années, une première expérience avait avortée. Un premier disque était en préparation lorsque le groupe avait découvert que les morceaux du futur albums, même pas encore terminés, étaient déjà disponibles sur les réseaux P2P. Du coup, dégoûtés par la tournure qu’avaient pris les évènements, le groupe a décidé de tout arrêter là et le projet Team Sleep est retourné dans les oubliettes de l’histoire. Dommage, puisque Team Sleep est quand même le projet solo de Chino Moreno (tout de même avec quelques copains, notamment Rob Crow des excellents Pinback), par ailleurs leader des Deftones. La rumeur disait la musique de Team Sleep radicalement différente de ce que Chino Moreno faisait avec ses Deftones. Son projet solo était parait il bien loin du Metal.
Et puis une autre rumeur arriva cette année. Le premier véritable album de Team Sleep était pour cette année. Un cette fois, c’était vrai. Et l’autre rumeur est tout aussi vraie. Ce disque est radicalement différent de ce que les Deftones nous proposent. Et on comprend que pour Chino Moreno, ce disque là soit si important. Il explore un univers musical qu’il n’avait jamais visité jusque là, mais qu’apparemment il adore aussi. A quelques exceptions près, Team Sleep est bien plus proche de l’Electro ou du Trip Hop que du Metal ou même du Rock tout court. C’est un voyage calme et lancinant. Souvent contemplatif et même presque planant. Bref, c’est l’autre côté, le côté apaisé du Chino Moreno qu’on connaissait. Et ce qui saute aux oreilles dès le premier morceau, c’est que sa voix est idéalement calibrée pour ce genre de musique, là où sa clarté et sa profondeur font merveille.
A l’écoute d’Ataraxia, rythmes Trip Hop sur lesquels flotte un genre de Metal planant, on se dit que Chino Moreno a inventé quelque chose de vraiment excellent. Mais le bonhomme ne souhaite ni refaire du Deftones, ni s’enfermer dans un autre genre, quel qu’il soit. Il est en vacances et laisse libre court à ses envies du moment. Ce qui donne un album aux multiples facettes. En fait, en dehors des tempos plutôt calmes qui sont le trait d’union entre les morceaux, Team Sleep est très varié au niveau des ambiances. Ever est une lente et triste mélopée, Your Skull Is Red est une autre variante d’un Metal liquide qui s’insinue partout comme une coulée de lave. Blvd Nights, le seul morceau ouvertement Rock est un monument de puissance sereine qui emporte tout sur son passage. Lentement, mais sûrement. King Diamond est un morceau mêlant l’Electro et le Rap, un peu à la façon d’un DJ Shadow, Live From The Stage démarre dans les limbes, comme un morceau typiquement Ambient, pour se terminer au milieu de vagues de guitares rageuses. La fin du disque est nettement contemplative, avec un Paris Arm et un 11/11 qui nous incitent à fermer les yeux pour déguster. Il y a vraiment de beaux moments sur ce disque qu’on se surprend à écouter de plus en plus souvent, pour regouter à une ambiance ou se replonger dans ce bain de douceur faussement inoffensive.
Et puis en plus sur ce disque, il y a un petit bonus qui s’appelle Rob Crow. Sur certains morceaux comme Our Ride To The Rectory ou Elizabeth par exemple, la voix de Rob Crow et les atmosphères si typiques de Pinback donnent une autre couleur aux compositions de Chino Moreno et ajoutent une fragilité finalement assez irrésistible.
Chino Moreno est en vacances, alors il se laisse aller, c’est normal. Ca donne parfois des chansons moins indispensables, forcément. Mais franchement, je ne vois pas comment on pourrait le lui reprocher, tellement ce Team Sleep dans son ensemble est attachant. Parce que Chino Moreno se montre sous un jour totalement nouveau et qu’il prend des risques en ne suivant que sa passion pour la musique et pas un quelconque plan marketing. Ce genre de parcours est suffisamment rare pour mériter le respect.


Pour plus d'nformations, le site officiel :
www.teamsleep.net



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