12 juillet 2004
Deux belles façons de vous toucher le coeur, avec le retour de Monsieur Arno, toujours aussi vrai et lucide et la Pop acoustique de The Magnetic Fields, outil mélodique de l'américain Stephin Merrit.
Arno : French Bazaar
Titres
Chic Et Pas Cher
La Vie Est Une Partouze
Françoise
Fais Gaffe
Chanteur De Charme
Lili
Femme Riche
In Love Avec Une DJ
40 Ans
Vide
Bonbons
Voir Un Ami Pleurer
La Fête
Knowing Me Knowing You (Bonus Track)
Back Door Man (Bonus Track)
Je Danse Et J'oublie (Bonus Track)
Sarah (Bonus Track)
Pour moi, chaque nouvel album d’Arno ressemble à des
retrouvailles avec un vieux pote. Le genre de copain qu’on voit peut être peu
souvent mais régulièrement. Le genre d’ami qu’on est sûr d’avoir pour la vie,
de ne jamais perdre de vue quoi qu’il arrive, quelles que soit les obstacles
que la vie mettra sur notre chemin. L’important n’est pas la fréquence des
rencontres mais plutôt l’intensité du plaisir qu’on peut avoir à se
retrouver.
Vous dire pourquoi j’ai cette affection toute particulière
pour Arno ? Franchement je n’en sais trop rien. Je pense qu’il suffit de
voir au moins une fois sur scène ce grand type tout déglingué et si attachant
pour ne plus jamais vouloir le lâcher. Cet homme là est une sorte de condensé
d’Humanité, de résumé de ce qui fait que l’Homme peut parfois rester
fréquentable malgré tous ses défauts. Le genre d’homme qui arrive au détour
d’une chanson ou d’une petite phrase plus ou moins volontairement malhabile, à
vous convaincre qu’on peut encore laisser parler son cœur sans arrière-pensée.
Bref, j’adore ce type là et sa musique avec. Pourtant, il
faut un certain courage pour avoir réussi à suivre son itinéraire pour le moins
tortueux. Mais ces dernières années, Arno s’est assagit musicalement et s’est
tourné de plus en plus ouvertement vers la France et la langue française. Ce
Flamand d’origine a vu sa carrière s’orienter de plus en plus vers nous,
sûrement par obligation commerciale au départ et de plus en plus par goût de la
langue aujourd’hui. Ce qui fait sa particularité c’est cette façon unique qu’il
a de malaxer le Rythm & Blues qui reste encore et toujours sa première
source d’influence musicale et la langue française. Il réadapte l’un et l’autre
à sa propre sauce. Autant dire que l’un et l’autre feront fuir les puristes.
Mais peu importe, grâce à ça ses chansons ont un style et un charme unique. Son
français très « à peu près » et son Blues très « roots mais
belge » sont sa force.
Alors cette fois, Arno nous offre un album entièrement en français
(à l’exception des morceaux bonus sur l’édition limitée que je vous conseille
vivement). Et c’est tant mieux, parce que ça nous permet de goûter à ses mots
si particuliers. Comme d’habitude, le désenchantement et les déchirures de la
vie planent au dessus de ce disque. Mais jamais on ne sent la moindre
agressivité ni la moindre rancœur dans ses paroles. La vie est comme ça, elle
casse les corps et les âmes, mais malgré tout il reste toujours cette petite
étincelle, cette petite lueur, qui incite à continuer la route. Toujours ce
sourire, cette main tendue qui permet de voir un peu plus loin. La musique
d’Arno ressemble à cette main tendue, à ce petit supplément d’âme qui devient
si rare. C’est ce qui en fait le prix et le rend si unique et indispensable.
Ca commence par un faussement joyeux Chic Et Pas Cher qui dans la critique de la superficialité fait
penser au Be Yourself d’Avril, pour
se poursuivre par un triste et beau La
Vie Est Une Partouze, sorte de regard sur la vie agitée de certains. Rien de
sexuel, juste un constat lucide sur une certaine agitation vaine et stérile. Voilà,
le décor est déjà planté et il est à la fois triste et beau, comme d’habitude. Chanteur De Charme nous permet de
retrouver Arno sous la forme d’un crooner second degré et (très) fatigué et
c’est imparable.
Et puis doucement le ton de l’album s’oriente doucement vers
des chansons de plus en plus intimistes et touchantes. Des chansons qui parlent
juste de petites choses, de petites gens. Avec des sommets absolus : 40 ans et Vide qui vous touchent directement comme un grand coup de poing au
ventre. On se retrouve le souffle coupé et les larmes aux yeux. Les mots d’Arno
sont magnifiques quand ils sortent comme ça et avec cette voix écorchée, sur
des mélodies simples à l’extrême ( « Et dans le vide je te cherche toi, je
suis tes pas, ton cœur qui bat. C’est dans ce vide que je me perds parfois. Je
me tue comme ça, j’en deviens gaga »). Ca ressemble à l’essence même du
Blues, cette musique qui vient tout droit de l’âme. Voir Un Ami Pleurer est une autre de ces chansons qui vous donne la
chair de poule, un ce ces petits chefs d’œuvre qui s’ignorent.
Allez, je vais arrêter d’écrire. En dire plus ne
servirait pas à grand-chose. Maintenant il faut passer à l’acte et écouter
Arno. D’urgence. Parce que c’est bon pour le cœur, parce que c’est bon pour
l’âme. Comme un souffle de vie.
Pour plus d'nformations, le site officiel où vous trouverez plein de choses en écouter et à voir pour apprécier le bonhomme :
www.arno.be
The Magnetic Fields : I
Titres
I Die
I Don't Believe You
I Don't Really Love You Anymore
I Looked All Over Town
I Thought You Were My Boyfriend
I Was Born
I Wish I Had an Evil Twin
If There's Such a Thing as Love
I'm Tongue-Tied
I'm An Operetta
Infinitely Late at Night
Irma
Is This What They Used to Call Love ?
It's Only Time
Cet album est mon
premier contact avec la musique de Stephin Merrit, leader et tête pensante des
Magnetic Fields. Ce groupe n’est pas le seul dont ce boulimique de la création
fait partie. En parallèle de ce projet, il collabore aussi à The 6ths, Future
Bible Heroes et Gothic Archies. Sans parler de ses albums solo sous son nom
propre. Mais Magnetic Fields me semble avoir tout ce qu’il faut pour être le
groupe qui va peut être le sortir d’une notoriété jusqu’à aujourd’hui finalement
assez underground.
Malgré son côté underground auto revendiqué, I a en effet tout pour plaire à un large
public. Si on suppose bien entendu que le grand public est curieux et ose
prendre des risques dans ses choix. Ce qui bien entendu n’est pas le cas. La
musique de Stephin Merrit a donc de fortes chances de rester réservée à un
public qu’on pourra qualifier d’averti. Mais pourtant, dans ce disque, comme
dans pas mal d’autres chroniqués ici, il y aurait de quoi toucher un public
beaucoup plus large.
Si on schématise, la musique des Magnetic Fields ressemble
un peu à une sorte de Divine Comedy débarrassé de ses enluminures et des ses
effets de manches. Un Divine Comedy light et donc encore plus facilement abordable
avec en plus un petit je ne sais quoi qui me fait penser aux Talking Heads (la
voix peut être). Une sorte de Pop totalement acoustique et légère, basée sur
des instruments comme le violoncelle, le piano, le banjo et la guitare et une
batterie discrète pour assurer la cohérence de l’ensemble. Vous conviendrez
qu’avec ce genre d’instruments, on ne risque ni le diabète ni le cholestérol.
Mais le petit miracle qui se produit ici est que ce mélange là n’est pas pour
autant austère ou pénible. I est un
petit condensé de popsongs enjouées et baladeuses. Des chansons Pop au style
forcément original, puisque les instruments qui les composent sont classiques,
mais pas vraiment habituels dans ce genre musical. Dans le genre, I Don’t Believe In You et I Don’t Really Love You Anymore sont
assez magiques et confirment que Divine Comedy n’est plus le seul groupe a
pouvoir nous enchanter de cette façon là.
D’après ce que j’ai pu apprendre sur Magnetic Fields, cet
album est assez différent de ce que le groupe a fait jusque là et un seul
morceau ressemble beaucoup à ce qu’ils faisaient par le passé. C’est I Thought You Were My Boyfriend,
irrésistible single et belle machine à danser totalement teinté de sonorités et
de synthés vintage 80’s. Mais à part cette sorte d’OVNI, tout le reste de
l’album est bien dans le style découvert dès le premier morceau. I Wish I Had an Evil Twin est un
magnifique travail entre un violoncelle et un piano très complices. I’m An Operetta est même un bel exercice
de style avec clavecin. Non, ne fuyez pas ! Je vous assure, c’est vraiment
bien. Tout comme It’s Only Time qui
termine le disque en beauté, avec toujours cette même grâce et cette même
légèreté mélodique.
Vous l’aurez peut être remarqué si vous avez jeté
un œil sur les titres de l’album, mais le nom de l’album vient du fait que
Stephin Merrit fait apparemment une petite fixation sur la lettre i en ce
moment. Tous les titres des morceaux commencent par cette lettre. Rien de bien
grave en fait. En tout cas, rien de suffisant pour vous dispenser de jeter une
oreille sur ce disque rempli de subtiles mélodies et d’harmonies parfaites. Si
on veut qu’un jour la musique de Stephin Merrit sorte de l’anonymat et atteigne
la notoriété qu’elle mérite, autant commencer maintenant. Et faites passer le
message, The Magnetic Fields c’est beau.
Pour plus d'informations, le site officiel de Stephin Merrit :
www.houseoftomorrow.com
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