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10 janvier 2005


Direction Montréal pour démarrer 2005. Une ville où les idées et les innovations se bousculent, avec une nouvelle expérience musicale qui nous vient du label Constellation et une énorme révélation qui a pour nom The Arcade Fire.




The Arcade Fire : Funeral



Titres

Neighborhood #1 (Tunnels)
Neighborhood #2 (Laïka)
Une Année Sans Lumière
Neighborhood #3 (Power Out)
Neighborhood #4 (7 Kettles)
Crown Of Love
Wake Up
Haïti
Rebellion (Lies)
In the Backseat


The Arcade Fire est la sensation du moment au Canada. Plus précisément la sensation Montréalaise du moment. Et contrairement aux anglais qui s’enthousiasment facilement pour des feux de paille, les canadiens ne se bougent pas pour rien. Et là, on peut leur donner pleinement raison de s’extasier devant Funeral et devant ce nouveau groupe qui n’avait jusque là produit qu’un EP 7 titres. The Arcade Fire dégage quelque chose de rare.
Dès la première écoute de ce disque, on est immédiatement saisi par cette musique fêlée aux éclairs fulgurants. Les sensations diverses et contradictoires se bousculent au portillon sans qu’on réussisse à en faire le tri. Mais rien ne laisse indifférent. On sent dans la voix de Win Butler une déchirure, une faiblesse, qui ne se referme sur aucune chanson et donne un petit côté fragile profondément humain. La structure des chansons parait parfois aléatoire, parfois cabossée ou hasardeuse. Mais au final, on se rend compte à quel point elles sont toutes mûrement réfléchies, pensées et soupesées jusque dans le moindre détail. Cette impression de foutoir musical est totalement trompeuse. The Arcade Fire puise ses idées à des sources tellement variées qu’elles en deviennent quasiment non identifiable, à peine reconnaissable. Et le résultat est complètement bluffant.
La musique de The Arcade Fire navigue entre Rock débordant d’urgence, Pop élégamment tordue et mélopées aux cordes ultra sensibles, lente montées d’adrénaline et furieuses retombées sur terre, entre purs moments de bonheur et grosses déprimes. Tout ça pour vous dire qu’avec eux, on ne risque jamais l’ennui ou l’uniformité. Ils donnent l’impression de fuir comme la peste des choses comme la routine ou l’habitude. Ce n’est pas moi qui vais le leur reprocher. Ce genre de disque est devenu tellement rare.
Ca commence de façon fulgurante avec un Neighborhood #1 (Tunnels) qui manie l’urgence musicale avec le même art que d’autres pratiquent l’urgence médicale. Pour continuer avec un Neighborhood #2 (Laïka) un peu plus expérimental et aventureux, mais tout aussi réussi. On note déjà ici la multitude d’instruments utilisés autour des traditionnels instruments électriques (violons de toutes sorte, xylophones, accordéons et j’en passe). Chaque son est étudié pour faire partie du tout final. Comme pour leurs influences, il est difficile de reconnaître tous les instruments qui composent un morceau. Une Année Sans Lumière est une belle ballade, qui comme son titre l’indique, est juste triste comme il faut, mais qui se termine dans un crescendo  de guitares. Neighborhood #3 (Power Out) est un autre exercice de style totalement personnel, oscillant entre joyeux sautillements à la Talking Heads et atmosphères brumeuses façon Cure. Un de mes préférés sur ce disque. Neighborhood #4 (7 Kettles) est une sorte de ballade Folk des plus classique, mais de celles qui vous trouent le cœur. Et ça continue comme ça, avec cette même diversité de ton et ce même débordement d’idées : Wake Up et ses grosses guitares noisy sur nappes de violons et chœurs à la Polyphonic Spree, le décalé et quasi enfantin Haïti, chanté par Régine Chassagne, seconde voix du groupe, le très Pop et presque tubesque Rebellion (Lies), le magnifique In the Backseat et le chant à fleur de chair de poule de la même Régine Chassagne.
Ce Funeral dégage cette sorte de lumière qu’on ne peut voir que quand on se sent perdu, quand il ne reste plus rien à quoi se raccrocher. Une lumière un peu blafarde, un peu triste, mais une lumière grâce à laquelle on peut enfin retrouver son chemin, retrouver la vie. Une lumière forcément belle parce que tellement désirée et attendue.



Pour plus d'nformations, le site officiel :
www.arcadefire.com




Le Fly Pan Am : N'écoutez Pas


Titres

Brûlez Suivant, Suivante!
Ex Eleveur De Renards Argentés
Autant Zig-Zag
Buvez Nos Larmes de Métal
Pas à Pas Step Until
...
Très Très "Retro"
Vos Rêves Revers
Ce Sale Désir Éfilé Qui Sortant de Ma Bouche
Faux Pas Aimer Vous Souhaite d'Etre Follement Ami



Le label Constellation est vraiment un cas totalement à part dans le monde musical. Non seulement ce label basé à Montréal a permis à des groupes ou des collectifs de musiciens de vivre de leur art tout en gardant une liberté de création totale, mais il a aussi et surtout permis l’émergence d’un courant musical totalement original, avant-gardiste et novateur. C’est déjà beaucoup quand on démarre de rien. En partant d’un noyau central nommé Godspeed You Black Emperor dont les musiciens ont essaimés dans d’autres collectifs plus ou moins expérimentaux, aujourd’hui le foisonnement de groupes et de projets est impressionnant. Chaque projet est ouvert, chaque musicien apportant son idée, sa touche personnelle pour créer quelque chose de nouveau, une autre musique, sans format prédéfini et sans barrières.
L’idée est belle. Le résultat n’est pas toujours très facile d’accès, parfois trop expérimental ou hasardeux, mais il est toujours passionnant à découvrir. A tous ceux pour qui la musique doit être un truc facile et immédiat comme on en entend toute la journée sur les radios, je conseille de passer tout de suite à une autre chronique. Fly Pan Am n’est pas fait pour eux. Ceux qui connaissent Constellation seront déjà convaincus qu’il faut écouter Fly Pan Am, pour toutes les sensations nouvelles et improbables qu’il va procurer. Et pour tous ceux qui ne connaissent pas encore et qui se disent que la musique ne doit pas être une prise de tête, je répondrais que ça vaut quand même le coup de tenter l’expérience.
Pour en revenir à ce Fly Pan Am, c’est une branche de plus à ce tentaculaire projet musical. On y retrouve bien sûr ces titres de chansons à rallonge dont le sens profond m’échappera toujours autant, mais ce disque là est assez différent parce que plus Rock et plus agressif que le Post Rock habituellement produit par ce label. Fly Pan Am est bien plus expérimental que ça. Leur terrain de jeu, c’est l’art du collage. Dans ce disque on trouve de tout : de grosses guitares lancinantes, des bruits et sons venus de partout et d’ailleurs, qui effacent ou écrasent parfois la musique, des voix susurrés, scandés ou hurlés, mais surtout jamais chantés. Ici tout semble fait pour déstabiliser et créer l’inconfort. A peine on a réussi à s’habituer à une ligne mélodique qu’aussitôt elle tombe en morceaux, balayée par autre chose ou fracassée par une vague bruitiste. Vraiment pas facile d’expliquer la musique de ce groupe là, tellement il prend un malin plaisir à jouer avec ses propres créations au point de volontairement les casser ou les déstructurer dès qu’elles commencent à avoir visage humain. Allant même jusqu’à donner un titre non vendeur et négatif à son album. Mais le miracle avec tout ça, c’est que de cet inconfort naît une impression totalement nouvelle, celle d’être dans un monde musical vierge de tout repère, hors du temps et hors de toute mode. Je me suis surpris à me retrouver totalement ailleurs et déboussolé en écoutant ce disque dans la rue, les écouteurs dans les oreilles. Les longs passages tantôt hypnotiques tantôt déstructurés de ce disque (Brûlez Suivant, Suivante!, Pas à Pas Step Until, Autant Zig-Zag et le brillant Vos Rêves Revers surtout) sont carrément très réussis et parviennent à créer des atmosphères et des ambiances vraiment uniques. Au final, j’ai l’impression que ce disque là, comme la plupart de ces collègues de label, est une expérience vraiment personnelle. Je veux dire par là que chacun d’entre nous aura un rapport particulier avec cette musique, forcément différent de ce que son voisin aura ressenti. Cette musique là n’est pas faite pour créer l’unanimité autour d’elle, elle est faite pour faire réagir l’auditeur, le provoquer, le pousser vers ses limites, le faire bondir ou rêver. En ce sens, elle est passionnante parce que tellement organique, bouillonnante et vivante.
Le dernier titre du disque se termine par une voix d’enfant qui demande « Dis papa, c’est quoi Le Fly Pan Am ? ». Très bonne question. Question à laquelle chacun de nous trouvera une réponse différente.


Pour plus d'nformations, le site officiel de Constellation :
www.cstrecords.com



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