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9 février 2004


Le deuxième album solo d'une ex Dead Can Dance et l'un des groupes français les plus inventifs au menu de cette semaine.




Lisa Gerrard : Immortal Memory

Titres

The Song Of Amergin
Maranatha (Come Lord)
Amergin’s Invocation
Elegy
Sailing To Byzantium
Abwoon (Our Father)
Immortal Memory
Paradise Lost
I Asked For Love
Psallit In Aure Dei


Ceux d’entre vous qui connaissent Dead Can Dance savent déjà qui est Lisa Gerrard. Ceux qui sont passés à côté de ce groupe incomparable peuvent encore rattraper le temps perdu. En musique, il n’est jamais trop tard pour ça. Dead Can Dance était un groupe, un duo plutôt, basé sur la complémentarité et surtout sur la concurrence entre la très évanescente et classique Lisa Gerrard et le barde moyenâgeux Brendan Perry. L’un et l’autre étant deux brillant compositeurs et chanteurs. Sur chacun des albums de Dead Can Dance, les deux acolytes se partageaient les honneurs. En gros, la moitié des morceaux étaient composés et chantés par Brendan Perry, l’autre moitié par Lisa Gerrard. Quelques autres seulement étaient composés et chantés par les deux. Un peu comme si ces deux fortes personnalités avaient des difficultés à partager l’écriture et le chant en commun. Pourtant dans les quelques rares occasions où ils l’ont fait, le résultat a été fabuleux. Je crois que je garderais à vie le souvenir de la première fois où j’ai entendu et vu Rakim, dans Toward The Within, la seule trace visuelle en concert de leur carrière. Un de mes plus beaux souvenirs musicaux. L’association de ces deux talents là au sein de Dead Can Dance a réussi à créer l’un des groupes les plus inventifs et surprenants des années ’90. Leur culture musicale hors norme et leur savant mélange de musiques Ethniques, Classiques et Rock reste unique.
Depuis leur séparation en 1998, on n’est pas loin du calme plat. Un seul album solo (l’assez moyen Eye Of The Hunter) pour Brendan Perry et un seul véritable album pour Lisa Gerrard (plutôt réussi celui là), The Mirror Pool. Lisa Gerrard a tout de même été la plus prolifique en composant quelques musiques de film, en participant notamment à la bande son de Gladiator et en s’occupant de l’intégralité de celle de Whale Rider. Pas de quoi crier au génie, ces musiques résistant assez mal à l’absence d’images.
Immortal Memory est en fait le deuxième véritable album solo (tout de même épaulée par un certain Patrick Cassidy) de Lisa Gerrard, la grande prêtresse à la voix exceptionnelle. Mais la seule voix ne fait pas tout, on l’a vu, la qualité des chansons reste indispensable à tout bon disque. Dès The Song Of Amergin, on est déjà dans l’ambiance générale du disque, fait de larges et belles nappes de claviers sur lesquelles la voix de Lisa Gerrard peut prendre son envol. Marantha est du même genre, mais beaucoup plus grandiose et réussi. On reste carrément sans voix devant une telle beauté. L’alchimie entre les synthés et la voix à plusieurs octaves de la diva atteignent ici des sommets. La frontière entre musique classique et musique dite populaire semble ici bien mince. Mais finalement, peu importe, c’est juste magnifique. Amergin’s Invocation prend la suite de belle façon. Elegy est jolie mais un peu soporifique, tout comme Sailing To Byzantium. On est ici assez proche d’une sorte de musique New Age pas spécialement passionnante. C’est agréable à écouter, c’est beau, très beau même par moments, la voix est superbe, mais bon… On est alors bien loin de l’inventivité et de la tension contenue dans les chansons de Dead Can Dance. Il ne suffit pas de faire beau, il faut aussi y mettre de la vie et de l’émotion pour que ça continue à être passionnant. Ici, ça manque. On trouve tout de même encore des chansons capables de nous toucher au cœur, comme Immortal Memory, l’autre réussite de ce disque, ou encore Paradise Lost.
C’est vrai, je ne suis sûrement pas vraiment impartial avec cet album, tellement Dead Can Dance m’a apporté de grands moments par le passé. J’ai donc juste l’impression aujourd’hui que Lisa Gerrard se contente de gérer son héritage sans prendre de risque. J’ai aussi l’impression que la prise de risque et l’invention ne sont plus sa tasse de thé. L’aiguillon qu’était Brendan Perry n’étant plus là pour la pousser à faire plus et mieux, elle se contente de faire ce quelle sait faire. C’est beau, c’est même carrément magnifique pour deux morceaux au moins, mais quand on sait de quoi elle est capable par ailleurs, c’est forcément un peu court et décevant. Pourtant, malgré ces réserves, je crois que je n’ai pas fini d’écouter Marantha en boucle, pour me tenir chaud.


Pour plus d'nformations, le site officiel :
www.lisagerrard.com




Wig A Wag : Douar Iskis

Titres

Brest Bombezet
Konskried Sant-Nikolaz
An Inkane Gwenn
La Groée De Nouae
Kannen Kanak
Peizant
An Hent Ruz
Ann Purcell
Sarah (Ha Safar)
Le Fourmilier
Va Où Le Vent Te Mène



J’ai succombé à la magie de Wig A Wag dès leur premier album qui date déjà de 1999. Si vous cherchez un groupe qui ne ressemble à personne d’autre, si vous cherchez un groupe qui a réussi à faire tomber toutes les barrières pour inventer son propre monde musical, Wig A Wag est fait pour vous.
Leur musique est tellement unique qu’il est toujours aussi difficile de la classifier ou de lui mettre une étiquette. A la base, c’est toujours la même musique traditionnelle bretonne (leur nom vient d’ailleurs du bruit que sont sensées faire les roues usées de la charrette de l’Ankou, équivalent local de la Faucheuse personnifiant la mort), mais les ajouts d’influences diverses et variées sont toujours aussi nombreux et surprenants. Imaginez un endroit où toutes les musiques traditionnelles d’Europe pourraient se rencontrer, se côtoyer et finir par fusionner et vous aurez une petite idée de ce peut être Wig A Wag. Les instruments utilisés sont toujours exclusivement acoustiques ( à part la basse parfois) et de toutes origines. On retrouve bien sûr la bombarde qui donne cette couleur si évidemment bretonne, les violons tantôt celtes ou plus tziganes et accordéons multiformes. Mais à mon sens, ce qui fait la force de Wig A Wag, en plus de ce savant mélange des couleurs et des genres, c’est la section rythmique, carrément impressionnante, et plus particulièrement les percussions, toujours imaginatives et baladeuses. Dans Kannen Kanak, il est vraiment impossible de définir un style dominant ou même une origine : percussions orientales, violons tziganes, guitare jazz et accordéon dans le style tango argentin. Et je ne parle même pas de la voix superbe Loïc Chavigny qui vous emballe tout ça dans un superbe paquet cadeau. Tout ça parvient à créer un morceau génial, complètement nouveau, qui vous fera voyager partout sans jamais vous laisser nulle part en particulier. La maîtrise musicale et instrumentale de ce groupe m’impressionne depuis leurs débuts, mais sur ce troisième tome, ils ont encore franchit un palier supplémentaire. Leurs influences bretonnes en deviennent presque anecdotiques, tellement ils ont réussit à inventer une autre musique qui n’a presque plus rien à voir avec celle de leur début. Wig A Wag n’est pas (n’est plus) un groupe de musique traditionnelle bretonne en particulier (bien que le chant soit toujours exclusivement en breton), c’est un groupe qui a réussi à réinventer une musique qui les contient toutes. S’il existait une musique traditionnelle européenne, elle pourrait ressemble à ce qu’on trouve dans cet album.
Comme je vous l’ai déjà dit, ce disque est globalement d’un très haut niveau, mais on trouve pourtant des chansons qui dépassent encore les autres, comme le très tendu et très dense Brest Bombezet (Brest Bombardé), le très breton An Inkane Gwenn (La Haquenée Blanche), Kannen Kanak (Chanson Kanak) cité plus haut, Ann Purcell qui ressemble à un des sommets du groupe, Sarah qui balance entre les deux bouts de l’Europe que sont la Bretagne et les confins de l’Europe centrale. Le Fourmilier est aussi un des beaux moments de ce disque lumineux. Le disque se termine avec une reprise finalement très logique reprise du Va Ou Le Vent Te Mène d’Angelo Branduardi, lui aussi explorateur musical dont les Wig A Wag sont un peu les héritiers.
La difficulté avec Wig A Wag, c’est que leur musique est tellement personnelle et inhabituelle qu’il faut un temps d’adaptation avant d’y trouver ses marques. Il faut d’abord se créer de nouveaux repères, de nouvelles références, avant d’apprécier ce groupe à se pleine mesure. Tout ça pour vous dire qu’une seule écoute ne suffit pas, encore moins un court extrait. Wig A Wag vaut le détour, mais comme tous les inventeurs ou les précurseurs, quel que soit le domaine, il faut se donner la peine d’essayer de les comprendre avant de les accepter. Leur monde musical est tellement fabuleux et unique qu’il mérite votre curiosité.


Pour plus d'nformations, le site officiel :
www.wigawag.com



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