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7 avril 2008



Elbow : The Seldom Seen Kid


Titres

Starlings
The Bones Of You
Mirrorball
Grounds For Divorce
An Audience With The Pope
Weather To Fly
The Loneliness Of A Tower Crane Driver
The Fix
Some Riot
One Day Like This
Friend Of Ours
We're Away


Cette semaine, Je vous parle d'un disque qui n'a pas trouvé de distributeur en France. Par ces temps de récession économique et de frilosité artistique, ça devient malheureusement de plus en plus fréquent. On ne peut pas dire que ce soit toujours dommage, mais quand ça tombe sur des disques d'exception comme celui là, c'est carrément triste.

Pour tous ceux (nombreux j'imagine) qui ne les connaitraient pas, Elbow (ça veut dire coude...) est à ranger dans la catégorie des groupes inclassables. Je sais, ça n'arrange pas les présentations mais pour moi, c'est toujours un critère qui compte. Quand on ne sait pas où ranger un disque, c'est qu'il a quelque chose de différent. C'est la hantise des chefs de rayon de tous les magasins de " produits culturels ", mais c'est surtout l'assurance d'écouter autre chose, autrement. Mais dans le genre différent, Elbow n'a rien à voir avec Silver Mt. Zion chroniqué aussi cette semaine. Autant l'album des canadiens demande un temps d'adaptation et un minimum d'investissement, autant Elbow demande juste qu'on tende l'oreille. Leur musique n'est ni complexe, ni avant-gardiste. Elle est juste au centre de plusieurs tendances sans faire partie d'aucune en particulier. Déjà, la voix du chanteur Guy Garvey est juste entre celle d'un Sting et d'un Peter Gabriel. On se situe au centre de deux univers bien différents. Idem pour la musique. On y retrouve un peu des Nits, pour la classe mélodique et la recherche de la perfection du détail. On y retrouve aussi certaines atmosphères pas si éloignées de The National par exemple. Juste pour vous donner une petite idée du niveau d'exigence de l'ensemble. On sent qu'Elbow est en permanence à la recherche du mieux, sans jamais se contenter du bon. Elbow vise toujours plus haut. Et le plus beau, c'est qu'il y parvient. Sans effort apparent.

The Seldom Seen Kid est de ces albums de Pop à l'anglaise, comme les habitants de ce pays (ils sont de Manchester) savent si bien les faire . Mais eux y apportent aussi autre chose, des petits plus qui font toute la différence. Il y a d'abord le jeu de batterie de Richard Jupp, tout en nuances et en subtilité. C'est un vrai régal de l'entendre. Et puis il y a ces échappées légères vers une Pop plus lettrée, voire même par instant vers le Jazz. Les membres d'Elbow sont avant tout de remarquables musiciens et c'est sûrement ça qui fait toute la différence. A la première écoute, The Seldom Seen Kid parait beau et agréable. Après une dizaine d'écoute, il parait simplement magnifique. Et pour tout dire, indispensable.

Tout ici se fait en douceur, avec doigté et distinction. La Pop d'Elbow est classe, c'est indéniable. Vous pourrez chercher la faute de goût sans jamais la trouver. Et au fil des écoutes, on découvre de plus en plus de beautés cachées jusque là. Parmi les perles les plus brillantes, on trouve Mirrorball avec sa rythmique quasi Trip Hop et ses cordes délicates. Dans ce genre de chanson en clair obscur, la voix doucement voilée de Guy Garvey fait merveille. Dans un style plus classiquement Pop, An Audience With The Pope est d'une limpidité étonnante. Mais le plus beau reste encore à venir avec un The Loneliness Of A Tower Crane Driver à la profondeur insondable, un Some Riot où se confrontent cette atmosphère pesante et cette voix légère. Et puis surtout, il y a ce One Day Like This, subtil popsong qui se transforme progressivement en un grandiose mouvement pour cordes et piano sur lequel vient s'ajouter un choeur hypnotique. Ambitieux, mais aussi totalement maîtrisé et incroyablement brillant. Un peu à la manière de ce que propose Guillemots sur le très beau Through The Windowpane. Ce titre là justifierait presque à lui seul l'achat du disque.

Comme d'habitude dans ce genre de cas, j'espère que The Seldom Seen Kid finira par être distribué chez nous et qu'il trouvera sa place. En attendant, je ne saurais trop vous conseiller l'écoute de cet album là. Un des plus beaux qui nous soit venu d'Angleterre cette année.


Pour plus d'nformations, le site officiel :
www.elbow.co.uk

Et la video de Grounds For Divorce : ICI




Silver Mt. Zion : 13 Blues For Thirteen Moons

Titres

1.000.000 Died To Make This Sound
13 Blues For Thirteen Moons
Black Waters Blowed / Engine Broke Blues
Blindblindblind


Godspeed You! Black Emperor est bel et bien mort. C'est Efrim Menuck, qui le dit. Devenu une trop grosse machine qui à elle seule personnifiait presque le Post Rock, Godspeed était devenu trop encombrant, trop codifié aussi pour continuer à exister. Il était devenu une référence, ce que détestent par-dessus tout les membres de ce collectif. Eux, ce qu'ils souhaitent, c'est la liberté. Silver Mt Zion (de son nom complet Thee Silver Mt. Zion Memorial Orchestra & Tra-La-La Band) a progressivement pris sa place. Avec ce nouveau groupe, le but d'Efrim Menuck et ses acolytes a toujours été de repousser encore les limites, de laisser libre cours à ses émotions et de ne jamais se laisser enfermer dans un genre. Jusqu'à maintenant, Silver Mt Zion a toujours respecté cette règle d'or. Parfois au risque d'être inécoutable ou trop cérébral pour convaincre. Tout le contraire de ce 13 Blues For Thirteen Moons.

Un des précédents opus de Silver Mt. Zion s'intitule This Is Our Punk Rock. Dommage que le titre soit déjà pris parce qu'il irait comme un gant à ce nouvel album. Jusqu'ici, jamais le groupe n'était allé si loin dans l'exploration des tréfonds de sa propre musique. Jamais il n'était allé fouiller aussi profondément dans l'âme de ses chansons. En ce sens, cet album mérite bien son titre. En mettant son âme à nu, Silver Mt Zion est proche de l'esprit originel du Blues. Je parle bien d'esprit, parce qu'évidemment, on est ici bien loin du Blues classique sur 12 mesures. Et si je faisais allusion au Punk un peu plus haut, c'est parce que ce disque me fait beaucoup penser aux premiers essais du Public Image Limited de John Lydon. On y retrouve cette même recherche de l'accord ou de la note suprême. On y retrouve aussi un étonnant mimétisme vocal avec ce chant plaintif et déchirant. Efrim Menuck a réussi sur cet album à faire la synthèse de tout ce que John Lydon a désespérément cherché pendant des années sans jamais l'atteindre : une musique nue et vitale.

Puisqu'il est dit que ce groupe là ne fera jamais rien comme les autres, la première particularité de l'album est qu'il ne contient que quatre vraies chansons, qui démarrent à la treizième. Les douze premières plages ne durent en fait que quelques secondes et l'album ne démarre vraiment que par 1.000.000 Died To Make This Sound. Et puisqu'il n'y a pas de barrières pour restreindre l'espace, chaque chanson dure environ 15 minutes, juste le temps suffisant pour installer un climat, de le développer, d'en explorer toutes les possibilités et tous les recoins. Quand le morceau s'achève, c'est qu'il n'a plus rien à donner, qu'il a déjà livré toute sa substance.

Une fois encore, cette recherche de l'émotion vitale accouche d'éclairs d'une beauté rare, comme ce 1.000.000 Died To Make This Sound qui vous ballotte entre griffures de guitares mal dégrossies et chants entrecroisés. Comme d'habitude, la première écoute est toujours un peu déstabilisante. Il faut prendre le temps d'entrer et de s'installer, même si l'intérieur des Silver Mt Zion n'est pas des plus chaleureux. Ici, pas de canapé douillet, pas de fauteuil accueillant. Chez eux, on reste debout ou au mieux on se voit offrir un vieux tabouret bancal pour se reposer les guiboles. C'est rude, c'est spartiate, certes. Mais je ne connais aucun autre groupe capable de donner d'aussi belles décharges d'énergie, d'aussi courageux coups de pieds au cul du ron-ron du Rock business. Les quatre chansons de cet album sont toutes de lentes et inexorables montées en puissance. Les instruments d'abord bien tenus en laisse finissent toujours par rompre les amarres et à se déchainer. Quand le tempo s'accélère et que les guitares et violons sont malmenés, on ne peut s'empêcher de penser à Led Zeppelin et à toute cette liberté de ton des 70's. On est là dans le même esprit, même si les temps ont bien changés et que le propos aujourd'hui est nettement moins optimiste et coloré. Le deuxième morceau, 13 Blues For Thirteen Moons, est celui qui me rappelle le plus les élucubrations de Public Image Limited. Le ton est encore une fois acide et tranchant, passant tour à tour de l'apaisement à de brutales montés d'adrénaline furieuses. L'émotion est partout, écorchée et à fleur de peau. Jusqu'à cette conclusion où la voix solitaire et désespérée d'Efrim Menuck vous colle le frisson. Black Waters Blowed est un morceau nettement plus déconstruit et chaotique où on se raccroche à cette voix qui surnage, juste avant que la mélancolie des violons de Engine Broke Blues viennent apporter un peu de réconfort. Quant à Blindblindblind, c'est le titre le plus classique dans sa forme, presque tranquille. C'est surtout une magnifique progression mélodique qui nous entraine du murmure de départ vers un final inoubliable où tout s'entremêle, juste avant un dernier contrepied en forme de chorale a capella qu'on n'a pas envie de voir s'éteindre.

13 Blues For Thirteen Moons est une démonstration éclatante de ce que pourrait être le Rock s'il arrêtait de se regarder le nombril et de copier plus ou moins discrètement sur le voisin. La liberté, ça se paye forcément, mais ça peut surtout permettre d'avancer, d'oser, d'inventer autre chose. Ca peut même être passionnant à écouter. Ca peut même faire naitre l'émotion là où on ne l'attend pas. Ca pourrait même vous plaire au delà de tout ce que vous imaginez.


Pour plus d'nformations, le site officiel (aussi hors norme que le reste...) :
www.tra-la-la-band.com





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