Introduction
Les élèves en difficulté
d’apprentissage ont souvent des problèmes de motivation. Leurs
difficultés à apprendre, leurs nombreux échecs et
l’image qu’ils ont aux yeux des autres élèves
amènent bon nombre d’entre eux à se démotiver et à
perdre tout intérêt à apprendre en contexte
scolaire. Que pouvons-nous faire pour les aider à
reprendre goût à l’apprentissage?
Par cette conférence, nous
aimerions proposer un cadre de référence afin d’aider les enseignants
qui travaillent auprès des élèves en
difficulté d’apprentissage à mieux analyser les problèmes
motivationnels que ces élèves rencontrent et à
intervenir plus efficacement sur les facteurs liés à
la classe qui influent sur leur dynamique
motivationnelle. Trois questions guideront notre démarche dans le cadre de
cette conférence.
|
Quelles sont les
principales sources de démotivation des élèves en difficulté
d’apprentissage ? |
|
Quels sont les facteurs
externes qui influent sur leur dynamique motivationnelle et quels
sont ceux sur lesquels les enseignants ont du pouvoir ? |
|
Comment faire en sorte que
les activités en classe, l’évaluation et l’enseignant lui-même
suscitent la motivation des élèves en difficulté
d’apprentissage ? |
Intervenir auprès des élèves
afin de susciter leur motivation est souvent une tâche ardue. Il est
donc légitime qu’avant de répondre à ces
questions, nous nous demandions pourquoi les
enseignants doivent se préoccuper de la motivation des
élèves en difficulté.
Pourquoi se préoccuper
de la motivation de l’élève en difficulté
d’apprentissage ?
Plusieurs raisons peuvent
être invoquées pour se convaincre de l’importance de se préoccuper de
la motivation à apprendre de tous les
élèves y compris ceux qui sont en difficulté
d’apprentissage. Voici celles que nous
considérons les plus importantes.
Dans bien des cas,
l’enseignant est le seul modèle « d’apprenant » que l’enfant peut
observer
Dans le passé, tous les
adultes se donnaient la tâche d’éduquer les enfants en étant pour eux
des modèles à suivre. Or, dans nos
sociétés occidentales modernes, les différents acteurs sociaux (politiciens, hommes de loi, gens des
communications, etc.), délèguent cette
responsabilité aux enseignants.
De plus, les parents sont
de moins en moins présents dans le processus d’éducation de leurs
enfants. En effet, ils sont devenus rares les enfants
qui ont la chance d’observer leurs parents
en train d’apprendre et surtout de prendre plaisir à
apprendre. Pour plusieurs enfants,
l’enseignant est le seul adulte dans leur vie qu’ils
peuvent observer apprendre et surtout
aimer apprendre.
Pour apprendre, il faut
pouvoir et il faut vouloir
Les plus récentes recherches
en psychopédagogie confirment que la motivation est une
condition nécessaire à l’apprentissage et ce, pour
tous les élèves. L’analyse de WANG, HAERTEL et WALBERG (1993), de plus de 260 textes
scientifiques, les amène à conclure que la
motivation, tout comme des stratégies d’apprentissage
efficaces, font partie des sept éléments
les plus importants à considérer pour expliquer le
succès scolaire. Pour apprendre, il faut
donc pouvoir, c’est-à-dire avoir de bonnes stratégies
et il faut vouloir, c’est-à-dire être
motivé.
Apprendre à l’école
n’est pas toujours intrinsèquement motivant, il faut le support et les encouragements de
l’enseignant
On ne peut espérer que
l’enfant trouve toujours en lui la motivation intrinsèque qui l’amène à
s’investir et à persévérer dans ses
apprentissages à l’école. Les plus récentes études sur la
motivation intrinsèque (SANSONE et HARACKIEWICZ, 2000)
démontrent que l’on doit bien sûr viser à
ce que les élèves soient motivés intrinsèquement, mais que cette motivation
demande généralement d’être initiée et
maintenue par des incitatifs tels que le support et les
encouragements des enseignants.
Les élèves qui ont des
difficultés d’apprentissage sont plus susceptibles que les autres d’avoir une motivation faible ou
une motivation « fragile »
Les nombreux échecs qui
façonnent leur histoire scolaire les amènent souvent à abdiquer et
se dire que quoi qu’ils fassent, le succès n’est pas à
leur portée. L’école n’est pas un endroit
où ils peuvent s’épanouir comme les autres élèves,
mais un lieu qui leur envoie constamment
une image de soi négative.
Quelles sont les
principales sources de démotivation des élèves en difficulté
d’apprentissage ?
Pour répondre à cette
question, on doit connaître les différentes composantes de la dynamique
motivationnelle qui animent un élève
lorsque celui-ci accomplit une activité en classe. La figure 1 présente le modèle sur lequel nos travaux sont fondés
(VIAU, 1999, 1998). Issu des recherches
d’approche sociocognitive, ce modèle de la dynamique
motivationnelle implique que la
motivation de l’élève a pour principales sources trois
perceptions : la perception de la valeur qu’il
accorde à l’activité, la perception qu’ il a de sa
compétence à l’accomplir et sa perception de
contrôlabilité, c’est-à-dire du degré de contrôle
qu’il a sur son processus d’apprentissage et sur
les résultats de celui-ci. Le modèle spécifie
également que les principales conséquences de la
motivation sont le choix
qu’il fait de s’engager cognitivement dans l’activité, sa persévérance et
sa performance.
FIGURE 1:
UN MODÈLE DE LA DYNAMIQUE
MOTIVATIONNELLE
Les trois sources de la
dynamique motivationnelle se définissent de la façon suivante :
La perception de la
valeur d'une activité est le jugement qu’un élève porte sur l’utilité et
l'intérêt de celle-ci en vue d’atteindre
les buts qu’il poursuit (ECCLES, WIGFIELD et SCHIEFELE,
1998).
La perception de sa
compétence est une perception de soi par laquelle un élève, avant
d’entreprendre une activité qui comporte
un degré élevé d’incertitude quant à sa réussite, évalue
ses capacités à l’accomplir de manière adéquate
(PAJARES, 1996).
La perception de
contrôlabilité se définit comme étant la perception qu’a un élève du degré
de contrôle qu’il peut exercer sur le
déroulement et les conséquences d’une activité pédagogique
(DECI, VALLERAND, PELLETIER et RYAN, 1991). On
rencontre souvent chez les élèves en difficulté
d’apprentissage la forme la plus aiguë du sentiment de
perte de contrôle qu’un élève puisse
ressentir : l’impuissance apprise. Il s’agit d’une
réaction d’abdication de la part de l’élève, qui en
vient à croire en son incapacité à réussir, quoi qu’il
fasse. Par exemple, dans le cadre d’un cours
de français, langue seconde, un élève souffrira
d’impuissance apprise si, à l’égard d’activités
d’écriture, il croit qu’il sera toujours un mauvais
scripteur; il a beau essayer d’écrire sans faire
d’erreurs, ça ne marchera
jamais.
Ces trois sources
motivationnelles influencent trois comportements d’apprentissage
:
L'engagement cognitif
correspond au degré d'effort mental
que l'élève déploie lors de l'exécution
d'une activité d'apprentissage (SALOMON, 1983). Cet
engagement se traduit par l’utilisation
systématique et régulière de stratégies
d’apprentissage. Un élève démotivé utilise sur une base
régulière des stratégies d’évitement. Ces stratégies
consistent en des comportements qu’il adopte pour éviter de s’engager dans
une activité ou pour retarder le moment où il doit
l’accomplir.
La persévérance
se traduit par le temps que l'élève
consacre à des activités d’apprentissage, alors
que la performance désigne les résultats de
l’apprentissage, c’est-à-dire un ensemble de
comportements indiquant le degré de réussite à une
activité.
Une meilleure connaissance
des sources de la dynamique motivationnelle nous permet
maintenant de répondre à la question pourquoi bon
nombre d’élèves en difficulté d’apprentissage
sont démotivés en classe, alors que d’autres demeurent
motivés.
Ils sont démotivés, car
ils … |
|
Ils sont motivés, car ils
… |
jugent inutiles ou
inintéressantes la matière et les
activités d’apprentissage qui leur sont proposées ; |
|
jugent utiles ou intéressantes la matière et les
activités d’apprentissage qui leur sont proposées ; |
et/ou |
|
et/ou |
se sentent incapables de
faire ce qu’on leur demande ou craignent
de ne pas posséder les capacités nécessaires ; |
|
se sentent capables de faire ce qu’on leur demande ; |
et |
|
et |
ont l’impression de n’avoir
aucune responsabilité dans ce qu’on leur
demande de faire et croient que leurs
succès ou leurs échecs ne dépendent pas
d’eux. |
|
ont l’impression d’avoir une certaine part de
responsabilité (contrôle) d ans le
déroulement de leurs apprentissages et
croient que leurs succès comme leurs
échecs dépendent en grande partie d’eux. |
Bien sûr, d’autres causes
peuvent être à l’origine de la démotivation des élèves en difficulté
d’apprentissage à accomplir des activités
en classe, mais selon l’état de la recherche, on peut
affirmer que les principales raisons résident dans
l’absence ou le faible niveau de l’une ou l’autre
des perceptions qui sont à la source de la dynamique
motivationnelle de l’élève.
Quels sont les facteurs
externes qui influent sur leur dynamique
motivationnelle et quels sont ceux sur lesquels les
enseignants ont du pouvoir?
La dynamique motivationnelle
d’un élève est un phénomène complexe qui est influencé par une
foule de facteurs externes. Pour mieux juger de
l’importance de ces facteurs, nous les avons
regroupés en quatre catégories (voir figure 2): les
facteurs relatifs à la société, à la vie personnelle
de l’élève, à l’école et relatifs à la
classe.
FIGURE 2 :
LES FACTEURS QUI INFLUENT SUR LA DYNAMIQUE MOTIVATIONNELLE DE L’ÉLÈVE
Un enseignant a peu de
contrôle sur les facteurs relatifs à la société, à la vie personnelle de
l’élève et à l’école. Son rôle demeure
cependant crucial, car les facteurs reliés à la classe ont une
influence prépondérante sur la dynamique
motivationnelle des élèves. À cet égard, ces facteurs
sont pour l’enseignant la « porte d’entrée » pour une
intervention auprès de ses élèves qui
éprouvent des difficultés
d’apprentissage.
Comment faire en sorte que
les activités en classe, l’évaluation et l’enseignant
lui-même suscitent la motivation des élèves en
difficulté d’apprentissage?
1
Dans le cadre de cette
conférence, nous nous attarderons sur trois facteurs : les activités en classe,
l’évaluation et l’enseignant
lui-même.
Les activités en
classe
Pour bien comprendre les
effets que les activités en classe ont sur la motivation des élèves, il
importe de distinguer les activités
d’enseignement des activités d’apprentissage.
Les activités
d’enseignement
Dans les activités
d’enseignement, l’enseignant constitue l’acteur principal; il a pour rôle de
communiquer la matière à l’élève (VIAU,
1998). L’exposé magistral est l’activité d’enseignement
la plus connue et sûrement la plus répandue. Les
enseignants du primaire font généralement des
exposés relativement courts qui prennent la forme
d’échanges avec les enfants. Quant aux
enseignants du secondaire, ils ont souvent recours à
des exposés magistraux qui occupent une
place prépondérante dans un
cours.
Plusieurs chercheurs,
dont PARIS et TURNER (1994), mettent en doute cette forme d’enseignement
qui, selon eux, se limite, pour l’élève,
à recevoir passivement de l’information. FISHER et HIEBERT (1990) affirment avec un grain de malice que « si la
majorité des activités est dictée par les
professeurs, est peu exigeante sur le plan cognitif et
consiste à faire ce qui est dicté par
l’enseignant ou à l’écouter faire un monologue, on
devrait se demander pourquoi tant d’élèves
restent à l’école, plutôt que de se demander pourquoi
il y a tant d’abandons » (p. 15).
Est-ce que des exposés
peuvent susciter la motivation d’élèves en difficulté d’apprentissage? Le
charisme naturel d’un enseignant, le ton
de sa voix, son talent de comédien, son humour et sa
réputation sont des caractéristiques susceptibles de
rendre aux yeux de ses élèves les exposés
captivants. Mais il n’est pas donné à tous les
enseignants de posséder ces talents. Pour
minimiser les effets souvent démotivants de l’exposé,
on peut organiser les différents éléments
qui le composent de façon à ce qu’il soit: (a)
signifiant, du point de vue des élèves, (b) clair et
accessible, et (c) dynamique, c’est-à-dire qu’il
suscite des questions et des échanges.
Voici
quelques recommandations pour rendre des exposés moins
démotivants.
|
Commencer son enseignement
par une anecdote ou un problème à solutionner qui suscitera et éveillera l’intérêt et la curiosité des
élèves |
|
Présenter le plan de l’exposé
(p. ex. : sous forme de questions ou d'objectifs) |
|
Avant d’expliquer un concept ou un phénomène, faire
appel à leurs connaissances antérieures en les interrogeant pour savoir comment, eux, se
l'expliquent |
|
Illustrer les relations entre
des concepts par des schémas, des tableaux ou des dessins |
|
Donner des exemples issus de
leur quotidien ou de leurs intérêts |
|
Demander de proposer
eux-mêmes des exemples qui soient tirés de leur quotidien |
|
Faire des analogies ou des
métaphores avec des domaines qui les intéressent |
|
S'offrir comme modèle en
faisant devant eux chaque étape qu'on leur demande de
franchir |
|
Utiliser différents moyens
pour enseigner (supports audiovisuels, affiches, etc.) |
Les activités
d’apprentissage
Dans les activités
d’apprentissage, l’élève devient l’acteur principal; son rôle n’est plus de
recevoir de l’information, mais de se
servir de la matière apprise pour résoudre des problèmes, ou
encore, de réaliser les exercices proposés par
l’enseignant (Viau, 1998).
Les activités
d’apprentissage comprennent des exercices que l’élève
réalise seul ou en équipe, des lectures, des
projets de recherche, des jeux éducatifs, des
présentations devant la classe, etc.
Pour qu’elle puisse favoriser
la motivation des élèves, une activité d’apprentissage, qu’elle soit
accomplie en mode individuel ou en
groupe, doit répondre à plusieurs critères. Voici, sous forme
de recommandations, les neuf critères les plus
couramment invoqués par les chercheurs (STIPEK, 1996 ; AMES, 1992 ; BROPHY, 1987).
|
Proposer des activités qui
tiennent compte des intérêts des élèves ou qui soient à l’image du métier
ou de la profession à laquelle ils aspirent
(p. ex. faire faire un journal de classe avec des sections pour la musique, la mode, le sport,
etc.) |
|
Suggérer des activités qui
nécessitent l’utilisation de stratégies d’apprentissage diverses (p. ex.
planification, classification,
organisation, autoévaluation) |
|
Favoriser des activités qui
nécessitent l’utilisation de connaissances acquises dans des domaines
diversifiés (p. ex. une activité sur la
météo où l'on doit utiliser ses connaissances en mathématiques et en géographie) |
|
Des activités dans lesquelles
les rétroactions (feedback) sont fréquentes |
|
Proposer des activités qui
résultent en un produit « fini » ou utile (p. ex. : des affiches, des
annonces, des clips, une pièce de théâtre,
etc.) |
|
Privilégier des activités qui
représentent un défi pour l’élève (p. ex. : organiser un débat sur un
thème donné comme ceux que l’on voit à la
télévision) |
|
Offrir aux élèves l’occasion
de faire des choix (p. ex. : choisir leurs sources documentaires, la
façon de présenter leur travail,
etc.) |
|
Allouer une période de temps
suffisante pour l'accomplissement de l'activité |
|
Donner des consignes
claires |
Au primaire, le caractère
ludique d’une activité se révèle également un atout
important.
L’évaluation
Il existe un lien étroit
entre les modes d’évaluation des enseignants et la motivation des
élèves.
Plusieurs auteurs (AMES,
1992, COVINGTON, 1992) s’accordent pour dire que les modes
d’évaluation axés sur la performance de l’élève plutôt
que sur son processus d’apprentissage
peuvent, dans certains cas, le motiver à réussir, mais
font généralement obstacle à sa motivation.
La motivation des élèves en
difficulté d’apprentissage est particulièrement touchée par l’effet
négatif des modes d’évaluation centrés sur la
performance. Voyons pourquoi.
Dans une évaluation axée sur
la performance, on considère que l’élève a appris parce qu’il a
obtenu de bons résultats. Ainsi, ceux qui ont les
notes les plus élevées du groupe sont considérés
comme les meilleurs de leur classe et souvent comme
les plus intelligents. Ce mode d’évaluation
amène les élèves à se comparer aux autres et à entrer
en compétition les uns avec les autres.
Ces
tendances se révèlent particulièrement fortes dans
les classes où l’enseignant annonce
publiquement les résultats ou les affiche à la vue de
tous. De telles actions réduisent la
motivation des élèves qui n’ont aucune chance de se
retrouver parmi les premiers, tels les élèves
en difficulté d’apprentissage. Se voyant, et étant vu,
toujours « au bas de l’échelle », ces élèves
se diront qu’ils ne seront jamais capables d’être
parmi les meilleurs et ne seront nullement
motivés à s’engager dans d’autres activités qui sont
susceptibles d’être évaluées. Tout cela pour
préserver la perception qu'ils ont de leur compétence
et celle que les autres ont à leur égard.
Les chercheurs proposent que
les pratiques évaluatives soient plus centrées sur le processus
d'apprentissage, c'est-à-dire sur le progrès accompli
par l'élève. Dans les pratiques évaluatives
centrées sur l’apprentissage, le progrès accompli
devient le principal critère d’appréciation. Le
portfolio ou le dossier d’apprentissage, dans lequel
sont colligés les travaux importants des
élèves, est considéré comme un outil plus adéquat que
l’examen pour évaluer le processus
d’apprentissage. Dans ce contexte, l’élève en
difficulté d’apprentissage peut voir qu’il apprend.
Il sait que, s’il travaille,
il peut réussir. Sa perception du niveau de contrôle qu’il exerce sur
ses apprentissages en est ainsi
favorisée.
Il faut cependant admettre
que même ces pratiques évaluatives n’empêchent pas certains élèves
de se mesurer aux autres. L’évaluation de l’enseignant
n’est pas le seul facteur susceptible de
modifier les perceptions des élèves et leurs
comportements. La valeur que la société accorde à la
compétitivité et à l’excellence, les attentes parfois
irréalistes de certains parents et « l’atmosphère évaluative » qui règne dans
plusieurs établissements scolaires influent inévitablement sur la
représentation que les élèves se font du rôle de
l’évaluation en milieu scolaire.
Faire de l’évaluation une
composante de l’enseignement qui favorise la motivation de tous les
élèves, y compris ceux qui ont des difficultés
d’apprentissage, se révèle un défi de taille pour un
enseignant, d’autant plus qu’il doit souvent se plier
aux règles et aux normes édictées par son
établissement scolaire.
Les six recommandations
générales qui suivent pourraient aider les
enseignants à relever ce défi.
|
Choisir des critères
d'évaluation sur a) les apprentissages réalisés, b) le progrès accompli, c)
l'effort déployé, d) les améliorations à
apporter
|
|
Formuler des commentaires sur
les travaux plutôt que se contenter de les noter
|
|
Donner la possibilité à
l’élève de savoir non seulement ce sur quoi il a échoué, mais aussi ce qu’il
a bien réussi et ce qu’il doit
améliorer
|
|
Utiliser un objet
d'évaluation qui démontre le processus d'apprentissage et le progrès accompli
par l'élève (p. ex. : le
portfolio)
|
|
Fournir à l’élève des outils
qui lui permettront de s’autoévaluer
|
|
Adopter une pratique
évaluative qui élimine le plus possible la compétition et la
comparaison
|
Ces recommandations ne
résoudront sûrement pas tous les problèmes motivationnels que
l’évaluation provoque chez un grand nombre d’élèves.
Elles montrent cependant qu’il est
possible d’amener l’élève à considérer l’évaluation en
classe non pas comme un simple instrument
de sanction ou de sélection, mais aussi comme un moyen d’apprécier
plus adéquatement ce qu’il a appris et ce
qu’il lui reste à apprendre.
L’enseignant
Le niveau de compétence de
l’enseignant, sa motivation à enseigner, ses conceptions et d'autres
traits qui le caractérisent peuvent
favoriser, tout comme nuire, à la motivation de ses
élèves.
Mais un enseignant influence
particulièrement la motivation de ses élèves par la relation
interpersonnelle qu'il entretient avec eux. Par son
sens de l’honnêteté et d’équité, son humour, son respect
des différences individuelles (p. ex. : le sexe) et culturelles (p. ex. : la
religion) et son empathie, il influence
la motivation de ses élèves à s'investir et à persévérer dans leur
travail.
Les recherches démontrent
que certains enseignants ont des comportements discriminatoires
envers les élèves qu'ils perçoivent faibles ou
démotivés, tout particulièrement les élèves en
difficulté. En effet, plusieurs enseignants vont, par
exemple, les critiquer plus souvent que les
autres, les faire s'asseoir loin d’eux, limiter leurs
contacts avec eux, se contenter de réponses
inadéquates de leur part et manifester de la pitié
lorsqu’ils échouent.
Ces comportements prennent
souvent leur origine dans les perceptions négatives et le manque
d’attente que les enseignants entretiennent envers ces
élèves. Par exemple, des enseignants
jugent qu’il n’y a rien à faire avec certains élèves,
car ils se disent que leurs difficultés sont
infranchissables et que, finalement, ils ne sont pas
assez « brillants » pour réussir.
À la lumière de ces
considérations, nous sommes amenés à proposer les recommandations
suivantes aux enseignants qui se retrouvent face à des
élèves qu’ils considèrent faibles ou
démotivés.
|
Être confiant qu’ils peuvent
apprendre et leur exprimer |
|
Créer des situations où ils
peuvent réussir et éviter de toujours les mettre dans des situations
compétitives dans lesquelles ils peuvent
difficilement sortir gagnants |
|
Les valoriser auprès de leurs
camarades et éviter de les réprimander devant ces derniers |
|
Avoir des attentes réalistes
et éviter de leur exprimer de la pitié devant un échec (« Ce n'est pas
grave, tu as fait de ton mieux
») |
|
Leur donner autant
d'attention (les interroger, répondre à leurs questions, les regarder, leur
sourire, etc.) qu’aux autres
élèves |
|
Démontrer de l'enthousiasme à
leur enseigner et de l'intérêt pour leur réussite |
Conclusion
Nous avons vu que les
enseignants doivent continuer à se préoccuper de la motivation de leurs
élèves car ils sont de plus en plus les
seuls modèles que les enfants et les adolescents peuvent
observer en train d’apprendre et d’aimer
l’apprentissage.
Nous nous sommes donnés
également un cadre de référence qui nous permet de mieux connaître
les perceptions des élèves en difficulté
d’apprentissage qui sont à l’origine de la démotivation
d’un bon nombre d’entre eux.
Enfin, nous avons examiné
brièvement les facteurs relatifs à la classe que l’enseignant a le
pouvoir de modifier et d’aménager afin qu’ils influent
de façon positive sur la dynamique
motivationnelle des élèves en difficulté
d’apprentissage. Parmi ces facteurs, l’enseignant lui-même
est probablement le plus
important.
Il doit se donner pour rôle
d’être un modèle aux yeux des élèves en difficulté d’apprentissage,
c’est-à-dire un adulte qui aime apprendre, qui aime
faire apprendre et qui a la ferme conviction
qu’ils peuvent apprendre.
NOTES
-
De larges extraits du texte qui suit ont été adaptés du
livre de Viau, R. (1999). La motivation dans
l’apprentissage du français
. Montréal : Éditions du Renouveau
pédagogique. retour au
texte
RÉFÉRENCES
Ames, C. (1992). Achievement
goals and the classroom motivational climate. In J. Meece, & D.
Schunk (Eds.), Students'
perceptions in the classroom (pp. 327-348). Hilldale (NJ): Lawrence
Erlbaum.
Brophy, J. (1987). Synthesis of
research on strategies for motivating students to learn.
Educational
Leadership , 45, 40-48.
Corno, L., et Rohrkemper, M. M.
(1985). The intrinsic motivation to learn in classroom. In C. Ames, & R.C. Ames (Eds.), Research on
motivation in education vol 2 : the classroom milieu (pp. 53-90).
New York: Academic
press.
Covington, M. V. (1992).
Making the Grade : a self-worth perspective on motivation and school
reform. New York : Cambridge University
Press.
Deci, E. L., Vallerand, R. J.,
Pelletier, L. G., & Ryan, R. M. (1991). Motivation and education : the
selfdetermination perspective. Educational
Psychologist, 26, 325-346.
Eccles, J. S., Wigfield, A.,
& Schiefele, U. (1998). Motivation to succeed. In W. Damon (Ed.),
Handbook
of Child Psychology vol
3, (pp. 1017-1095). New York: J.
Wiley.
Fisher, C. W., & Hiebert, E.
H. (1990). Characteristics of tasks in two approaches to literacy
instruction. The Elementary School
Journal, 91, 3-18.
Pajares, F. (1996).
Self-Efficacy beliefs in academic settings, Review of Educational Research,
66, 543-578.
Paris, S. G., & Turner, J. C.
(1994). Situated motivation. In P. R. Pintrich, D. R. Brown, & C.
E. Weinstein (Eds.), Student
Motivation, Cognition, and learning (pp. 213-237). Hillsdale (N. J.) : Lawrence
Erlbaum.
Salomon, G. (1983). The
differential investment of mental effort in learning from different
sources. Educational Psychologist,
18, 42-50.
Sansone, C. & J. M.
Harackiewicz, J. M. (2000). Intrinsic and extrinsic motivation. New York:
Academic Press.
Stipek, D. J. (1996),
Motivation and instruction, dans D. Berliner & R. Calfee (dir.), Handbook
of educational
psychology. (pp. 85-113). New York :
MacMillan inc.
Viau, R. (1999). La
motivation dans l’apprentissage du français. St-Laurent (Québec) : Éditions
du Renouveau Pédagogique.
Viau, R. (1998). La
motivation en contexte scolaire. Bruxelles : Éditions Deboeck (2e
édition)
Zimmerman, B. J. (1994).
Dimensions of academic self-regulation: a conceptual framework
for education. In D. H. Schunk, & B. J. Zimmerman (Eds.), Self-regulation of learning and
performance (pp. 3-21). Hillsdale (N. J.):
Lawrence Erlbaum.
Wang, M. C., Haertel, G. D.,
& Walberg, H. J. (1993). Toward a knowledge base for school
learning. Review of Educational
Research, 63(3), 249-294.
|