Carnets de guerre sur la campagne 1918

Commandant Jean Maurice ADDE au sein du Corps Expéditionnaire Américain

              

 

Préambule : les Lettres à Louise :

Depuis la Mobilisation d’août 1914 et durant ses 4 années de campagne, mon arrière grand père Jean Maurice écrira très régulièrement à sa femme Louise et leurs 3 enfants, en parallèle à ses carnets de guerre retranscrits dans les chapitre du site. Bien que soldat Territorial, il n’a pas été ménagé avec son régiment ; après ces longues années, il souhaite comme tant d’autres quitter le front pour une affectation en retrait. En 1917, cinq lettres à Louise mentionneront son projet d’affectation en arrière ; ce sera auprès des forces américaines en France ; adieu le 142 RTI, affectation au Service des Chemins de Fer et des Etapes :

 

Lettre du 17 mars 1917 :

« … le colonel Bouché me communique une lettre du Général Mazillé qui dit textuellement  ceci à mon sujet : « je n’ai pas encore eu le temps de prendre contact avec tout le monde mais je prends note de vos renseignements sur le Commandant Adde du 142 et s’il y a possibilité vous pouvez compter sur moi ». Tu me demandes quand je pense être fixé, je n’en ai pas idée mais cela ne sera guère avant la fin du mois à mon avis. Soies bien tranquille ma chérie, j’attends patiemment et je n’en parle à personne … »

 

6 mois plus tard, lettre du 11 septembre 1917 :

« … tu as eu une petite déception me dis tu, de ne pas me voir sauter de joie en pensant que j’étais réclamé par les Américains, certainement j’en suis ravi et encore bien plus que tu ne peux le supposer mais je suis tellement habitué aux affaires militaires et aux lenteurs administratives, sans compter la grosse difficulté de faire retirer quelqu’un de la zone des Armées pour l’envoyer à l’intérieur, que je reste encore sceptique sur la réussite de ce beau projet…. Pour gagner du temps j’écrierai moi même demain matin au Colonel de Chambrun …. »

 

2 mois plus tard, lettre du 16 novembre 1917 :

Jean Maurice est en Lorraine, dans la maison de gauche ci-dessous à Giriviller en Meurthe-et-Moselle, secteur franco américain de Luneville-Ramberviller-Charmes- Bayon- Baccarat :

            

Collection personnelle François Darriet

« Le bruit court que nous resterions ici en soutien des Américains qui ont pris le secteur en avant de nous et qui depuis hier font pas mal de bruit avec leurs canons dans la forêt de Parroy… Je n’ai bien entendu aucune nouvelle de la Base Navale et je commence à croire sérieusement que je n’en aurais pas. Je vais toujours attendre la réponse du Colonel de Chambrun pour me faire une opinion mais tout cela me laisse sans grand espoir. Tant pis, c’était trop beau pour nous ? … »

 

Lettre du lendemain 17 novembre :

« … je n’entends rien dire au sujet de la Base Navale et je suis obligé d’attendre la lettre de Chambrun pour savoir si j’ai une chance ou non … »

 

Lettre du 21 novembre 1917 :

« Ma chérie,

Il y a du nouveau pour mon affaire mais cela va t’étonner, je ne sais pas encore au juste quoi ; voici ce que je sais : à midi le vaguemestre revenant de la Division qui est à 15 kilomètres d’ici est venu me dire : «  Mon Commandant le Sergent Hazera qui est commis à la Division vient de me dire qu’il y avait une demande pour vous affecter à l’encadrement des troupes anglaises à La Rochelle et si le Chef de Corps donnait son approbation vous partiriez. » Evidemment ce n’est pas exactement cela mais c’est un racontar d’employé qui a vu mon nom à la Division, par conséquent il y a quelque chose d’arrivé. Je suis allé aussitôt trouver le Colo, lui faire part de ce que je venais d’apprendre et je lui ai fait lire la copie de la lettre du Lieutenant Colonel Dhé ; la phrase qui dit que « s’il survenait quelque difficultés on n’a qu’à le prévenir » a produit l’effet que j’attendais et le Colo m’a dit devant Larrodé textuellement ceci : « Si réellement on me demande mon avis je mettrai ceci… ».

11 heures du soir. Je reviens de chez le Colo : la note est arrivée, on peut considérer la chose comme faite, je partirai d’ici dans quelques jours pour … La Rochelle. Voici ce qu ‘elle dit :

« Le Président du Conseil, Ministre de la Guerre au Général Commandant en Chef ; je vous prie de mettre à ma disposition le Chef de Bataillon Adde du … si vous n’y voyez pas d’inconvénients. Cet officier qui était agent de compagnie de navigation est très qualifié pour l’organisation d’un port et serait Délégué Français auprès de la Base américaine de La Rochelle.

Signé le Général Major Général des Armées Françaises ».

La réponse sera demain à 9 heures du matin à la Division et je crois que d’ici 8 jours je serai en route pour La Rochelle mais pas sans passer par Bordeaux et Pauillac. Toute la note porte « urgent » donc cela ne va pas traîner…. Enfin ma chérie on va se revoir bientôt, te dire que je suis heureux ce n’est pas assez, je ne sais trouver le mot pour exprimer la joie que j’éprouve, tout en ne pouvant m’imaginer que le fait est exact. »

 

Cette décision du GQG (Grand Quartier Général) au 30 novembre 1917, et les jours qui suivirent son départ en permission changèrent le destin du Chef de Bataillon Jean Maurice ADDE dans le conflit. En effet, par sa position d’officier supérieur, son activité professionnelle au sein de la Compagnie Maritime des Chargeurs Réunis, et son rôle de Vice Consul d’Angleterre à Pauillac qui lui vaut de parler anglais, mon arrière grand père Jean-Maurice sera bien détaché par l’Etat Major Français à la Mission Militaire Française auprès de l’Armée américaine ; ceci afin de préparer l’arrivée des forces américaines en France.

I - Une phase d’observation politique et de neutralité :

 

Les Américains étaient jusqu’à présent des observateurs neutres du conflit opposant l’Allemagne aux forces de l’Entente. L’opinion publique américaine devint progressivement favorable aux Alliés, prenant position politiquement pour eux ; l’affaire du naufrage du paquebot « Lusitania » en mai 1915 contribua à sortir les USA de cette réserve. De plus en février 1917, les relations diplomatiques entre Etats Unis et Allemagne tombèrent  au plus bas depuis qu’Arthur Zimmerman, secrétaire d'État allemand aux Affaires étrangères se rapprocha en secret de son homologue mexicain pour reprendre la guerre sous-marine contre l’Entente (USA compris) et s’allier avec le Mexique (ennemi des USA) pour prendre pied au Sud des Etats-Unis.

Pour toutes ces raisons l’entrée des USA dans le conflit devint évidente. Le 4 avril 1917 le congrès américain vota l’entrée en guerre des USA en Europe (82 sénateurs contre 6 votent OUI) ; puis un Corps Expéditionnaire Américain fut mis en place après le vote de conscription du 18 mai au congrès ; l’AEF (American Expeditionary Forces) fut donné au commandement du Général John Joseph Pershing, progressivement dès août 1917, les troupes US allaient traverser l’Atlantique pour débarquer dans les ports de la côte Ouest de la France préalablement aménagés. Les premiers convois arriveront dès l’été.

C’est dans ce cadre que mon arrière grand père Jean Maurice a été affecté à la base américaine n°7 de La Rochelle ; la US HeadQuarter Base était l’annexe de la Base US n°2 de Bordeaux auprès de la Mission Française Régionale de La Rochelle.

       

Source Internet :1917, vote du congrès pour l’entrée des Usa dans la Grande Guerre ; en mai le congrès vote la conscription qui constituera le CEA (ou AEF)

 

Avant d’évoquer précisément le rôle que tint mon arrière grand père avec l’AEF, revenons plus en détail sur le Commandant en Chef de cette armée américaine qui vient d’être mobilisée, le Général Pershing:

 

                               

 

II - John Joseph PERSHING est né dans le Missouri le 13 septembre 1860 à Laclede dans le Linn County. Il est le fils d’un responsable des chemin de fer locaux ; ses origines sont alsaciennes et l’orthographe de son patronyme d’origine est « Pfirsching ». Pershing se mariera en janvier1905 au Willard Hotel de Washington avec Frances Warren (fille d’un sénateur du Wyoming) avec qui il aura 4 enfants ; il vivra un terrible drame peu avant l’entrée en guerre des USA lorsqu’à San Francisco un incendie au Presidio tua son épouse et ses 3 filles. Il décèdera le 15 juillet 1948 à Washington DC et sera enterré au Arlington National Cemetery. En 1932 il écrira “My Experience in World War“ qui aura le prix Pulitzer.

Parcours : en 1877 il enseignera à Negro School de Laclede- de 1880 à 81 il sera Instituteur à Prairie Mound School Missouri- 1881 il rentrera à l’académie militaire de West Point et y sera surnommé ultérieurement « Black Jack » suite à son passage - en 1886 il sort « graduated »- de 1886 à 1890 il est en mission à la frontière Ouest contre les indiens Sioux et Apaches- de 1891 à 1895 il devient instructeur à l’université du Nebraska. Pendant son parcours militaire il continuera à enseigner comme professeur d’université au Nebraska et demeurera instructeur assistant à West Point.

Affectations :

1891 -6th cavalry à Fort Bayard (New Mexico)

1898 – affectation à la frontière mexicaine pour la guerre américano-mexicaine

1899 à 1903– en poste aux îles Philippines au 8ème Corps d’Armée

1904 à 1906– observateur en Mandchourie de la guerre russo-japonaise et affectation éclair à Tokyo en février 1905

1909 à 1913 – retour aux Philippines avec entre autre le poste de gouverneur de la province de Moro

1914 et 15 – Commandant du Presidio de San Francisco puis du Corps Expéditionnaire Américain au Mexique

1916 retour aux USA où il reste en poste dans le sud à la poursuite des bandes de Pancho Villa à la frontière mexicaine

1917 à 1919 – nommé le 26 mai 1917 puis envoyé en France comme Commandant en Chef du Corps Expéditionnaire Américain ; il sera nommé en 1919 général en chef des forces américaines. Pershing ne parle pas français, tout comme Joffre ne parle pas l’anglais. Le13 juin 1917, il débarque à Boulogne sur Mer avec son petit Etat Major (177 hommes) et les premiers soldats. Le 16 juin il rencontre Pétain à Paris ; l’Etat Major descendit à l’hôtel Crillon, Place de la Concorde. Le 28 juin il est à Saint Nazaire pour accueillir les premiers convois de « Sammies » de la 1ère DIUS soit 14.500 hommes.

                      

Sources : «La Première Guerre Mondiale» chez nov’édit JPV & «Armes Militaria Mag» n°62 page16 :

A gauche, Généraux Foch et Pershing- au centre les troupes US défilent devant les Généraux Pershing et Liggett- à droite Généraux Pershing et Harbord

(cliquez sur le logo tricolore pour accéder au site consacré aux « Doughboys », les poilus américains.

III - Le Corps Expéditionnaire Américain (CEA) ou American Expeditionnary Forces (AEF) :

                                                        

Avant de s’engager dans le conflit européen, l’armée américaine est seulement constituée de 200.000 hommes répartis aux quatre coins du pays dans la surveillance des frontières : à l’Ouest avec les tribus indiennes et le Sud avec la guérilla du Mexique. La conscription qui suivra va enfin donner naissance à la grande armée dont le pays avait besoin ; elle ne cessera alors d’enrôler les hommes qui viendront combattre en Europe aux côtés des forces alliées. On peut dire que 1917 est l’année de naissance de la grande armée amé&ricaine que nous connaissons aujourd’hui.

Par organisation, l’armée US est composée de 3 modes de recrutements : l’armée régulière comprenant 300.000 hommes répartis entre la 1ère et la 10ème Division US, la garde nationale comprenant 600.000 hommes répartis entre la 26ème et la 42ème Division US, l’armée nationale comprenant 500.000 hommes répartis par conscription entre la 76ème et la 91ème Division US.

Néanmoins l’Etat Major américain prendra soin de préciser que ses troupes sont « aux côtés » des Français comme forces « associées » et pas incorporées sous un commandement allié ; ceci afin de garantir une certaine indépendance vis à vis des forces alliées déjà engagées.

L’objectif initial de l’intégration des troupes US était de leur faire prendre les fronts secondaires calmes et les garder, car l’expérience et la formation n’y sont pas déterminants. Parallèlement à cet allègement de certains fronts, les Anglais et les Français se re-concentraient sur les fronts actifs et chauds où l’expérience était de mise. Les forces de l’AEF est considérée comme une relève fraîche pour renouveler les troupes alliées décimées par l’abrutissement des généraux, lasses et fatiguées par quatre années de guerre sans concessions.

En avril 1917 les USA amènent donc un espoir dans la fin de ce conflit qui dure depuis déjà 4 ans ; les forces des principales puissances sont figées dans des guerres de positions sans fins et coûteuses en vies ; à ce moment là les Français sont bloqués au Chemin des Dames, les Italiens tombent à Caporetto, Lénine est à Petrograd. En s’associant aux forces françaises, les USA gardent leur indépendance et refuse la mixité des unités. Pétain présente les USA comme une force rassurante, qui prendra la relève des secteurs nécessiteux ; c‘est aussi un pays aux ressources économiques et militaires énormes. Pétain présenta l’arrivée des USA comme une bouffée d’air pour les troupes alliées, des hommes en grand nombre qui ont un moral fort et un équipement neuf en quantité. Pour l’Etat Major Français, la restauration du moral des troupes est primordial, d’autant que les hommes sont en pleine lassitude et incompréhension comme lors des mutineries d’avril 1917. A l’inverse, ces renforts providentiels auront pour objectif d’affaiblir le moral des Allemands qui n’ont pas de forces neuves sur lesquelles compter.

Néanmoins, face à l’inexpérience de ces troupes fraîches que Joffre voit déjà remplacer les poilus fourbus, un immense travail préliminaire est nécessaire ; le CEA une fois monté doit gérer 3 soucis majeurs :

1- La formation des divisions américaines aux USA puis en France et en Angleterre

2- La logistique avec le transport par voix maritime sur le front européen des hommes et du matériel à travers l’Atlantique.

3- L’emploi des troupes et la répartition sur les différents fronts ; mais nous verrons que la crise des transports limitera largement les renforts d’hommes et de matériel dans les premiers mois de leur arrivée

 

En 1917, l’Etat-Major Français crée la Mission Militaire Française près l’Armée Américaine sous la responsabilité du Général de Brigade Camille Ragueneau. Localement des Missions Françaises voient le jour dans les différents points stratégiques du pays, dont à Bordeaux et son annexe de La Rochelle sous la responsabilité du Colonel Colonna–Ceccaldi. C’est fort probablement par la base US n°2 de Bordeaux que Jean Maurice est affecté comme Chargé de Mission à La Rochelle puisqu’elle en dépend.

 

La côte Ouest se voit donc confier les bases US pour débarquer hommes et matériel, le SOS et le QuaterMaster se chargeant d’acheminer l’ensemble sur les différents points de stationnements au front comme en arrière.

 

IV - Problématique de la Logistique :

 

Les Forces britanniques ayant pris la main sur les ports de la Manche, il restait aux forces américaines les ports de l’Atlantique, du Pays Basque à la Bretagne. Trois zones se présentaient : BREST – Basse Loire (SAINT NAZAIRE) – BORDEAUX. Des ports permanents sont désignés : Brest, Saint Nazaire, La Pallice ; puis des ports d’urgence : Nantes, Bordeaux et Pauillac. Les bases locales de l’AEF sur la côte Atlantique sont alors : US Base n°5 à Brest pour la Bretagne, US Base n°1 Saint Nazaire pour l’Ouest de la France, US Base n°7 Bordeaux pour le Sud Ouest dont les annexes de La Pallice-La Rochelle, Pauillac (fief familial de Jean Maurice) et Bassens. Les autres bases de l’ouest et Brest possédant aussi leurs annexes.

 

L’ampleur de la tâche est énorme. Sur un certain nombre de sites français, les ports furent trop petits ; il fallut prendre le temps et les moyens pour les aménager « à l’américaine » c’est à dire avec stations-magasins, entrepôts géants, ateliers de fabrications de baraques, stockages divers de volumes imposants. Mais avant d’arriver à ce résultat, les petits moyens disponibles fin 1917 début 1918 vont limiter l’afflux rapide des troupes US en France, et donc retarder leur engagement en relève des Français sur les divers fronts. Ces problèmes de capacité de transport et de stockage expliquent le fait qu’il n’y avait en novembre 1917 que 4 divisions US en France (la 1ère la 2ème la 26ème et la 42ème ). Il en reste encore 40 en formation aux USA. A partir de décembre 1917 jusqu’en février 1918 il arrivera par axe maritime près de 30.000 hommes par mois ; ce qui correspond à une capacité de transport de 3 divisions US par mois en 1917. En revanche une fois l’organisation bien en place et les installations mises sur pied, la cadence sera de 250.000 hommes par mois à partir de juillet 1918. Outre le matériel, l’effort de guerre des USA se chiffrera à plus de 2 millions d’hommes pour la Grande Guerre.

                                     

Sources : «La Première Guerre Mondiale» chez nov’édit JPV & «l’aventure des soldats de 14-18» chez Hachette collections 2004 :

débarquement et acheminement d’Américains et leur matériel.

 

Comptabilité progressive des arrivées des troupes US en France :

au 30 juin 1917 : 16.220 hommes (soit 0,8% du total final)

au 30 novembre 1917 : 129.623 hommes (6,3%)

au 30 janvier 1918 : 224.655 hommes (11%)

au 31 mars 1918 : 329.005 (16%)

au 30 mai 1918 : 667.119 (32%)

au 31 juillet 1918 :897.293 (44%)

au 31 juillet 1918 : 1.210.703 (59%)

au 30 septembre 1918 : 1.783.935 (87%)

 

V - Engagement des troupes américaines :

 

Une fois sur place et entraînées en Angleterre et en France par des officiers des deux pays de l’Entente, Pershing et Pétain s’accordent pour que le front lorrain soit le front désigné des unités US qui rentreront dans le conflit, sans contacts avec les forces britanniques ; l‘idée est de déléguer des secteurs US autonomes en Lorraine. L’objectif est d’y installer 10 divisions US ; mais avant de les envoyer au front, les Français fourniront des pièces d’artillerie de tous types pour l’artillerie de campagne et l’artillerie lourde. En octobre 1917 les divisions US sont envoyées de part et d’autre de la Moselle. En mars 1918 les premières troupes sont envoyées au combat, en juin elles auront des interventions majeures lors de la deuxième bataille de la Marne (Vaux- Belleau Wood- Château Thierry), puis en juillet 1918 la relève de la 6ème armée française sur la Marne s’effectuera par les 2 armées US qui s’intercaleront entre la 2ème armée et la 8ème armée française. Sur le terrain, le constat participa à regonfler le moral des troupes françaises ainsi que les espoirs forgés par l’Etat Major français : la qualité des troupes américaines, faite de combativité et de robustesse, en plus d’une grande quantité d’équipement.

 

           

Source Internet et «Des Poilus aux Doughboys» de A.Denizot chez NEL 1998

 

nb : en général, une division US est plus imposante en homme et matériel que son homologue française ; elle se compose de 2 brigades de 2 régiments d’infanterie à 3 bataillons et d’1 RIMA soit 27.000 hommes. Le bataillon est formé à 3 compagnies de 250 hommes chacune et d’une compagnie de 12 mitrailleuses.

VI - La base de Jean Maurice - US AEF BASE n°7 La Rochelle- La Pallice –(SOS -Service of Supply) :

 

Le SOS-Service Of Supply a été commandé par les officiers suivants :

Colonel David S.Stanley (5 au 24 juillet 1917)- Major General Richard M.Blatchford (25 juillet au 1er novembre 1917)- Brigadier General Mason M.Patrick (1er au 27 novembre 1917)- Major General Francis J.Kernan (27 novembre 1917 au 29 juillet 1918)- Major General G.Harbord (29 juillet 1918 au 26 mai 1919)- Brigadier General William D.Connor (26 mai au 31 août 1919)

 

                  

 

Sources Internet :diverses installations portuaires et baraquements de La Rochelle La Pallice

et Chief Of Staff Major General G.Harbord Chef du SOS

      

 

La base 7 de l’AEF était l’annexe de la base 2 de Bordeaux, dédiée au SOS de l’AEF c’est à dire le Service Of Supply, équivalent du Service du Matériel et du Train pour l’armée française. Mise en place le 7 novembre 1917, suivie par celle de La Rochelle le 17 janvier 1918, elle fut initialement sans commandement américain ; Jean Maurice s’est vu confié le poste de commandant de base pendant 7 mois de fin novembre 1917 (date de son départ du front et du 142ème RTI) et juin 1918 (ordre n°4708/AT :32 du 28 juillet 1918 du Commissariat Général des AGFA (Affaires de Guerre Franco-Américaines). A l’arrivée de Jean Maurice, seulement 6% des forces totales américaines sont déployées dans le pays soit 129.623 hommes. Puis le « Brigadier General » Charles A.Gerhardt pris le commandement du 9 juillet 18 au 15 octobre 1918, suivi par le Colonel William Kelly d’octobre 1918 à avril 1919, enfin le Colonel Charles Brooks Clark pris ses fonctions d’avril 1919 jusqu’à sa fermeture fin 1919. Parallèlement les « Chiefs of Staff » de la base étaient le Colonel Charles Brooks Clark d’octobre 1918 à avril 1919, puis le « Major » Stanley Piasecki.

 

Les missions de la base n°7 :

Ø      Toutes opérations portuaires concernant la réception des bateaux cargo en provenance des USA, stockage de charbon, pétroles et huiles moteurs. La base pouvait compter jusqu’à 12.000 hommes.

Ø      La base reçu 1,5 million de tonnes de marchandises diverses entre 1917 et 1918 à La Pallice-Rochefort. Utilisant 15 points de mouillage et prenant en charge plus de 300 navires.

Ø      La base de Rochefort Camp Pullman permettait l’assemblage des véhicules reçus « en kit » par les navires. En 1918 plus de 15.000 ont été montés.

Ø      Le service construction comprenait le montage des voies de chemins de fer mais aussi le montage des entrepôts, les baraquements, le « terminal » des moteurs et l’assemblage des véhicules.

Ø      La base pouvait gérer la présence de 2.500 prisonniers.

Ø      D’autres fonctions de la base étaient la gestion des 2 hôpitaux avec une capacité de 755 lits.

Ø      Capacités : Le dépôt de remonte pouvait gérer 15.000 animaux, la cimenterie avait une capacité de 94 tonnes, le parc auto a pris en charge près de 9000 véhicules, le centre de réfrigération pouvait stocker 800 tonnes de marchandises fraîches, le stockage du pétrole (essence) et l’huile (moteurs) atteignait 5 millions de gallons (x 4,5 en litres). Les docks représentaient près de 200.000 pieds carrés de surface de stockage ; les installations (baraquements) avaient une capacité de logement de 18.000 personnes.

 

Après l’Armistice du 11 novembre 1918, la base continua à recevoir du matériel pour l’AEF ; les activités déclinèrent néanmoins peu à peu et les projets de construction furent annulés. Le 25 avril 1919 la base fût fermée, les troupes et le matériel passa sous contrôle de la base n°2 de Bordeaux où mon arrière grand père retrouva son affectation d’origine fin 1917 lorsqu’il quitta son très cher 3ème bataillon du 142ème RTI.

 

D’autres antennes gravitant autour de la base se situaient à proximité : Port de Rochefort sur Mer (28janvier 1918), hôpital de Puvigny (1er mars 1918), port charbonnier de Tonnay-Charente (20 juin 1918), silo à ciment de Mortagne sur Gironde (17 juillet 1918), port de Marans (13 août 1918), assemblage de véhicule à Aytre (1er octobre 1918) et hôpital de l’Algrefeuille d’Aunis (11 octobre 1918).

 

La base n°7 était une énorme dépôt de pétrole, d’huile et d’essence, mais aussi un des ports principaux français pour l’approvisionnement de charbon ; à côté, les ingénieurs du SOS y assemblaient les véhicules qui arrivaient en pièces détachées par bateaux ; on y recensait les unités suivantes (en anglais pour être précis- en vert traduction française) :

 

Air service : 1 sub depot,

Army Service Corps : 1 adm labor co, 1 cement mills co, 2 PWE Cos, 1 depot labor co, (1 compagnie d’ouvriers administratifs, 1 companie à la cimenterie, 2 compagnies de PWE?, 1 compagnie d’ouvrier de dépôt)

Army Transport Service : elements of 2 stevedore bns, (éléments de 2 bataillons de dockers-déchargeurs)

Cav : 4 Troops, (4 unités de cavalerie et leur dépôt de remonte)

Engineer elements of 5 regts and 1 service bn, including forestry, railways construction and railroad shop, (éléments de 5 régiments et un bataillon de service, incluant les forestiers, la construction de chemins de fer, et le dépôt ferroviaire)

Infantery : 1 detachment First Army Hq Regt (1 détachement d’un régiment du Quartier Général de la 1ère Armée)

Marines : 1 co, (1 compagnie)

Medical : 2 camp hosp, (2 hôpitaux de campagne)

Motor Transport Corps : 1 det, 1 mechaics air service co, 2 motor car mos, 1 motor sup tn, 2 motor truck cos, (1 détachement, 1 compagnie de mécaniciens aériens, 2 mos ?unités du service autos, 1 tn ?unité de pièces détachées, 2 cos ?unités du service camions)

Ordinance : 2 dets (2 détachements)

Quartermaster : 1 bakery co, 3 butchery cos, 3 QM details, 4 field remount sqs, 1 fire hose truck co, 1 ice plant co, 1 labor bn co, 1 labor cn less 2 cos, 1 refining co, 1 remount depot, 1 salvage det, (1 companie de boulangers, 3 compagnies de bouchers, 3 détachés d’intendance, 4 escadrons d’infanterie de remonte, 1 compagnie de pompier en camion, 1 companie de réfrigération, 1plusieurs compagnies d’ouvriers, 1 compagnie de ?refining (conditionnement ?), 1 dépôt de remonte, 1 détachement de sauveteurs)

Signal Corps : 1 service co, 1 telegraph bn. (1 compagnie de service de signalisation, 1 bataillon de télégraphistes).

VII – Témoignages sur mon arrière grand père :

 

La base US n°2 de Bordeaux avait un commandement américain auquel était attaché un Délégué militaire Français rattaché au commandement général des AGFA (Affaires de Guerre Franco-Américaines) ; il s’agit pour Bordeaux du Lieutenant Colonel Colonna-Ceccaldi ; la même structure se répétait à l’annexe de La Rochelle où le Délégué militaire Français de la base n°7 était le Lieutenant Colonel de Tuite. Sur leurs relevés de notes les deux hommes semblaient très satisfaits de Jean Maurice :

«Depuis son arrivée à la Mission Française Régionale, le Commandant Adde a continué à montrer les mêmes qualités de conscience, de bon sens, d’attachement à ses devoirs. Proposé pour Lieutenant Colonel. Bordeaux le 8 mars 1918»

 

«Mêmes bonnes notes. Passé à la Mission Française près la base américaine n°7. Bordeaux le 2 août 1918»

«Officier supérieur intelligent rigoureux et actif ; a dirigé la base de La Rochelle (annexe de celle de Bordeaux) pendant sept mois ; y a montré de belles qualités d’initiatives, de décision et de tact qui lui ont attiré l’estime et la sympathie des autorités françaises et américaines ; grâce à la connaissance complète de tous les services de la base, le Commandant Adde est un précieux collaborateur pour le Chef de la Mission Régionale. Il présente toutes les qualités pour diriger les services d’une base. La Rochelle 9 août 1918»

«Mêmes bonnes notes. Passé à la Mission. Affecté Base n°7 le 1er août 1918 en raison de la constitution de la bse 7 à cette date. Affecté à nouveau à la Base de Bordeaux par D.M.10553 6/11 du 1er octobre 1918 Bordeaux les 12 et 13 décembre 1918»

                 

Ci-dessus, en avril 1919, témoignage de gratitude de la part du Colonel Charles Brooks Clark commandant la « Head Quarters Base Section 7 » de l’AEF.

Jean Maurice était déjà démobilisé et en congé illimité à dater du 16 janvier 1919 ; ceci par application des inscriptions de la circulaire ministérielle n°18182D du 17 décembre 1918. Dépôt démobilisateur auprès du 144ème RI à Bordeaux.

Le 17 janvier 1923, Jean Maurice sera rayé des cadres de l’Armée par décision présidentielle ; il y était demeuré en réserve de la Territoriale au 49ème RI à Bordeaux. Par le décret du 5 avril 1915, il gardera la position de Chef de Bataillon de Territoriale honoraire par décision ministérielle en date du 17 janvier 1923 et par application d’avril 1916.

 Sites thématiques en anglais sur les « USA dans la Grande Guerre » :

http://www.firstworldwar.com/

http://www.arlingtoncemetery.net/homepage.htm

http://www.pershingsdoughboys.org.uk/

http://www.worldwar1.com/dbc/

http://www.worldwar1.com/dbc/history.htm

http://www.archives.gov/research_room/federal_records_guide/

http://freepages.military.rootsweb.com/~worldwarone/WWI/AEF.html

http://www.greatwar.nl/

http://www.lib.byu.edu/

http://www.qmfound.com/supply_aef.htm

http://lcweb2.loc.gov/ammem/browse/

http://members.aol.com/veterans/warlib6.htm

http://www.longwood.k12.ny.us/history/upton/seventy.htm

http://www.libertymemorialmuseum.org/index.aspx

http://www.ku.edu/carrie/specoll/AFS/intro.html

http://carlisle-www.army.mil/usamhi/

http://www.scuttlebuttsmallchow.com/wwi.html

http://www.abmc.gov/

http://www.wpafb.af.mil/museum/history/ww1/ww1.htm

http://www.dean.usma.edu/

http://www.wfa-usa.org/new/links.cfm

http://www.wfa-usa.org/new/index2.cfm

http://www.thedigitalbookshelf.com/ww1_units.htm

 

                    

Sources des illustrations : «Affiches 14-18» Remy Paillard 1986

CopyrightÓ darrietadde-f.darriet 2004 -Merci de demander l’autorisation avant d’utiliser tout document issu de ce site.

CopyrightÓ darrietadde-f.darriet 2004 -Please ask before using any element contained in this site

AccueilHome