Carnets de Campagne 14-18 (suite)Commandant Jean Maurice ADDE |
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Photo : collection personnelle François
Darriet. Etat-Major du 142ème
RTI. Photo : collection personnelle François
Darriet. A cheval sur
« Rainette » JM.ADDE accompagne la colonne du 142ème RTI
que l’on aperçoit en contrebas de la route. Photo : collection personnelle François
Darriet. Louise LEBEGUE. Photo : collection personnelle François
Darriet. François DAMESTOY. Le 28
mars 1917 alors que les Coloniaux du Général MARCHAND seront à proximité il
se fera «barboter» son portefeuille avec photos, papiers et 120 francs. Photo : collection personnelle François
Darriet. Ballon de type Zeppelin. Source Internet Né à Bar Le Duc en 1860,
décédé en 1934 il fut avocat, député de la Meuse, homme politique puis
Président de la République de 1913 à 1920. Président du Conseil et ministre
des Affaires Etrangères de 1922 à 1924. Membre de l’Académie Française. Photo : collection personnelle François
Darriet. Source : L’Illustration Keystone- ADenizot « Bataille de la Somme » Général JOFFRE avec le
Président Raymond POINCARE. Source : l’Illustration Keystone. Citation de GAVINI. Photo : collection personnelle François
Darriet. Capitaine RAMOND. Photo : collection personnelle François
Darriet. Lieutenant GESTAS. Photo : collection personnelle François
Darriet. Louise LEBEGUE en mai
1902 dans la propriété du Colombier. Photo : collection personnelle François
Darriet. Docteur BROUDIE du CHR
au 142ème RTI. Source : l’Illustration Keystone. Citation du Général
BALFOURIER Chef du XX ème Corps d’Armée dont le régiment de JM.ADDE dépend. Photo : collection personnelle François
Darriet. Gare de Pauillac Photo : collection personnelle François
Darriet. Sergent Gaillard Photo : collection personnelle François
Darriet. Témoignage du Caporal
Emile SOURD à JM.ADDE le 26 juin 1915 suite à l’offensive de Bruay en Artois. Photo : collection personnelle François
Darriet. Lieutenant OLIER portant
la Médaille Militaire. Sera promu Capitaine en 1917. Louis Camille Noël PAUL né en 1876 Président
Poincaré Général Maurice Balfourier: chef de la 11 division (I),
puis chef du 20 corps "corps de fer" (II), puis chef du 36 corps. Colonel puis Général Maurice-César-Joseph Pellé: chef d'état-major du général Lyautey (I), puis
deuxième aide major-général du théâtre des opérations du Nord et du Nord-Est
(II), puis premier aide major-général du théâtre des opérations du Nord et du
Nord-Est (II), puis major-général du théâtre des opérations du Nord et du
Nord-Est (II), puis major-général pour le théâtre des opérations extérieures,
puis major-général des armées françaises puis devient major-général des
armées du Nord et du Nord-Est (I), puis chef de la 153 division (III), puis
chef du 5 corps (V). Photo : collection personnelle François
Darriet. Lieutenant PAGE promu
Capitaine le 21 mai 1916, confirmé le 17 juillet. Photo : collection personnelle François
Darriet. Capitaine RAMOND. Photo : collection personnelle François
Darriet. Ballons d’observations
surnommées « saucisses ». Photo : collection personnelle François
Darriet. Gare de Pauillac. |
Chapitre trois
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contained in this site 1916 1er JANVIER Visite au colo.
Réception de mes officiers. 2 JANVIER Promenade à Mirecourt.
J’écris à Louise (NDR : Louise LEBEGUE épouse de JM Adde) de venir. 3 AU 30 JANVIER Séjour à Diarville. Repos et bonheur. Louise vient pendant 17 jours. Excursion à Sion,
Mirecourt. Déjeuners et dîners. Le 27 Louise repart ; je vais
l’accompagner à Toul.
En rentrant le soir j’apprends que nous déménageons le 30. 30 JANVIER Départ pour Saint
Germain. Je commande la colonne ;
le Colonel marche en auto sans s’occuper de son régiment. J’ai toutes les
nuiseries possibles avec le PC. Installation rudimentaire à Saint Germain.
Nos hôtes de la popote sont plutôt alcooliques. 31 JANVIER 6 Heures du matin,
départ de la colonne que je commande encore pour Domptail. Village ravagé par nos 75 lors de la
reprise par les Français. Le soir, Neumeyer a une crise de folie.
Expédition au poste. 1er FEVRIER 1916 Je fais affecter Neumeyer
à la 4ème Compagnie. Visite du patelin au Colonel et Général.
Allemands ont été tués, bombes, maisons en dentelle. 2 au 17 FEVRIER Séjour à Domptail.
Visite à Baccarat, Gerbevillers,
ruines partout. Rambervillers
pas abîmé ; vu les usines de grès flammés à Rambervillers et les
cristalleries de Baccarat. Peu d’incidents pendant le séjour, la remise des
Croix au colon à Lapeyre, Dulain, Dumont, grand déjeuner rasoir chez
le colon. Départ demain pour Morivillers et
Blainville. 18 FEVRIER Etape de Domptail à
Morivilliers. Je commande la colonne, le colo est en voiture, très froid.
Nous revoyons les champs parsemés de tombes et traversons les villages
démolis. Arrivés à midi, cantonné face à la rue en bout de la côte. Joli
point de vue. 19 FEVRIER Départ à 6 heures pour Blainville, vue sur Lunéville qui est à 10
kilomètres. Billet de logement, popote à côté : bien installé. 20 FEVRIER Dimanche, messes. Ordre
d’aller reconnaître demain le camp de Saffais
où je dois faire manoeuvrer le Bataillon mardi. A9 h1/2 du soir Maurel
me porte le contr’ordre qui me laisse supposer un départ prochain. 21 FEVRIER Dès le matin Damestoy
me demande si j’ai entendu les bombes dans la nuit. Je me rappelle avoir rêvé
à un bombardement mais je n’ai pas dû me réveiller. A9 heures j’apprends que
nous partons demain par la gare d’Einvaux. Le Corps d’Armée est alerté. La 153ème Division avec qui nous sommes
est partie subitement hier soir. A8
h1/2 pendant qu’on chante à la cuisine
une bombe éclate pas très loin. Nous sortons immédiatement et
entendons 3 éclatements à une seconde d’intervalle. Zeppelin (NDR : cf photos). Plusieurs
le voient, je n’y ai pas réussi ; on le canonne. 22 FEVRIER Au réveil neige
formidable ; on se prépare pour l’embarquement. Départ à 2 heures,
arrivée Einvaux
à 5 heures. Mon train de combat n’a pas pu suivre, tout est gelé. J’envoie
des attelages de renfort. A 7 heures en gare. Je commence l’embarquement par
un froid terrible. Nous apprenons que le Zeppelin que nous avons vu la veille
a été détruit. Pendant la nuit un froid terrible ; DR et moi en 1ère( ?)
serons gelés, nos chaussures le matin cassent comme de la glace. 23 FEVRIER A 7 heures du matin en
gare de Neufchâteau le thermomètre marque –11°. Arrivée en gare de Longeville à 11h 1/2 ; cantonnement à Tannois chez le curé,
très gentil. 24 FEVRIER Excellente nuit, nous
attendons des ordres ; les communiqués nous annoncent qu’il y a eu une très grosse affaire sur
Verdun ; c’est ce qui nous a fait alerter, certainement. Après midi
promenade. 25 FEVRIER A 4 heures du matin je
reçois l’ordre de tenir mon Bataillon prêt à partir à 10 heures. A 8 heures
réunion au château où est le colo. Il nous donne l’itinéraire jusqu’à Lisle en Barrois 24 kilomètres. Etape
très dure à cause du froid et du vent. A l’arrivée 3 lits dans le
village ; je couche chez de bons propriétaires mais tous les autres
officiers sont à la paille. 26 FEVRIER Nous partons à 11 heures
pour Souhesmes la Grande
30 kilomètres. Encombrement des routes par les convois ; nous arrivons à
la nuit. Mêmes conditions que la veille ; Lapeyre et moi avons une
chambre à 2 lits ; les officiers subalternes tous à la paille. 27 FEVRIER Départ à midi pour Belleray à 1 kilomètre au Sud de Verdun.
Encombrement des routes inimaginable. J’ai le cœur très gros de repartir aux
marmites. Je pense à tous les miens que j’aime. Arrivée à 6 heures du
soir ; mal installés mais j’ai un lit. Le bombardement fait rage autour
et sur Verdun. Nous allons certainement attraper. 28 FEVRIER A 8 heures le colo nous
fait appeler les 3 chefs de Bataillon ; il s’agit d’envoyer un Bataillon
aux travaux , c’est le tour du 1er (NDR : 1er
Bataillon) pour aller de l’avant mais le tour du 3ème (NDR :
3ème Bataillon) d’aller aux travaux d’arrière. Je pars à 10 heures
pour Lemmes ; au moment
du départ un taube ( ?) nous envoie deux bombes à 100 mètres ; nous
filons rapidement. Je me sens tout autre depuis que je sais que je vais
travailler aux doutes et en sécurité. Après une longue attente à Lemmes nous
repartons en autos. 9ème à Lemmes, 10ème
à Heippes, 11ème à Erize la Brulée. Je reste à Chaumont.
(NDR : JMA doit donner là les lieux de cantonnements des trois
compagnies du Bataillon) 29 FEVRIER Je m’occupe du
ravitaillement du Bataillon puis vais à Lemmes en auto. C’est formidable ce qu’il
passe d’auto sur la route Bar le Duc à Verdun. 1er MARS 1916 Je vais à Erize voir la 12ème. Poincaré,
Joffre etc viennent à Souilly ; après midi je vais à Heippes où je
trouve Feur qui s’est fracturé le péroné la veille au soir. 2 MARS Je vais à Bar le Duc
voir la DES (NDR : Direction des Etapes et Services) ; en rentrant un EM
m’a délogé (NDR : un membre de l’Etat Major sûrement). 3 MARS Visite à Lemmes ; les Corps d’Armée s’accumulent dans
la région. Je rencontre le Capitaine Bardet, ami de Berlier de
Pauillac. 4 MARS Mal d’oreilles toutes la
nuit ; à 6 heures l’abcès perce. Je reste dedans, le pus coule de mon
oreille toute la journée. Le soir un médecin et un Lieutenant du 87 en
panne viennent dîner avec nous (NDR : du 87ème Régiment). 5 MARS au 12 MARS Séjour à Chaumont ;
navette par auto entre mes Compagnies. La bataille fait rage du côté de
Verdun. J’apprends que d’Andurain est blessé mortellement par une
bombe d’aéro. Tous les jours ce ne sont que va et vient de troupes et de
munitions en auto. 13 MARS Nous sommes embarqués en
auto pour Robert Espagne ; je vais avec le Capitaine chef de groupe voir
à Lemmes et Heippes et nous arrivons à midi à Robert Espagne après avoir fait
environ 100 kilomètres en auto. 14 MARS Installation à Robert Espagne. Le 1er Bataillon arrive
à 16 heures ; il était en avant de Verdun où ils ont été très marmités
mais n’ont eu que 4 morts et une vingtaine de blessés. Il paraît que les
Boches sont tombés en masse compacte et que chez nous nos artilleurs ont eu
des hécatombes de chevaux. Le 39ème en a perdu 400 et le 60ème
800 (NDR numéros de Régiments). 1 5MARS J’attends le Colonel
aujourd’hui avec le 2ème Bataillon. 16 au 27 MARS Séjour à Robert Espagne
. Promenade à Bar le Duc et
à Saint Dizier.
Rencontré Feur, Larabetie, Seignouret, etc. Assisté à une revue à Combles (en Barrois)
passée par le Prince de Serbie, Poincaré, Joffre, etc. Visite à Jean
d’Heurs avec Gaillard, vu Mme Fould,
invitation à déjeuner à Jean d’Heurs.
Propriété merveilleuse. Le 27 nous recevons ordre de partir le lendemain en
auto. 28 MARS Départ de Robert Espagne
à 6 heures en autobus. Arrivée à Dombasle en
Argonne à 1 heure. Pluie battante ; à notre arrivée
4 marmites tombent à 200 mètres ; c’est le commencement. Départ pour la
boue liquide à pied pour les bois de Bethelainville.
Dès l’arrivée ordre de partir pour Montzéville.
Les Compagnies viendront la nuit. Voyage plutôt rapide, marmites à droite et
à gauche de la route. A 6 heures reconnaissance du secteur ; Capitaine
Savatie du 70ème charmant ; PC en tôle. Canonnade
terrible de part et d’autre ; nous sommes en face d’Esnes en Argonne. Compagnies arrivent
vers 9 heures ; la relève finit à 10 heures. Toute la nuit canonnade
épouvantable , nous sommes sur une ligne de batteries. Nuit blanche
évidemment. 29 MARS A 5 heures canonnade redouble ; évidemment il y a attaque. Nous sommes bombardés par intermittence . Journée dans mon PC, réunion des Capitaines, je donne mes ordres et organise mon secteur. A 5 heures ½ le colo me fait appeler ; contr’ordre ; nous passons à la 11ème Division ; tout ce qui était réglé est démoli. Retour au PC pendant un bombardement terrible. Belly a été légèrement touché au menton. Maurel est évacué à cause de sa blessure à la figure par suite de sa chute de bécane. 30 MARS Nuit calme. Matinée
relativement calme mais à partir de 11 heure marmitage effroyable sur toute
notre ligne ; 3 morts et 2 blessés à la 10ème Compagnie.
Mon PC est arrosé tout autour par de 130 ; un obus devant la porte à 2
mètres. Je vais reconnaître des boyaux avec le Génie pendant le
marmitage ; miracle d’en sortir. 31 MARS Nuit bonne. A 6 heures
je pars avec le Génie reconnaître la ligne à Esnes-Avocourt qui va être mon secteur. Schrapnells, marmites et
asphyxiants nous saluent. Rentré au PC du colo je me trouve mal et m’évanoui
à moitié. A 15 heures j’envoi mes Capitaines de Compagnies reconnaître ce
même secteur ; je ne puis les accompagner étant trop fatigué. Gavini
et Olier ont pu faire leur reconnaissance mais ont manqué d’y laisser la
peau ; Vesseron et Page ont arrêté en chemin et feront leur
reconnaissance demain matin. 1er AVRIL 1916 Bombardement intensif
vers minuit sur nous sans casse. La 11ème Compagnie va prendre le
secteur avoiné. Matinée de bombardement avec 210 sur la batterie qui est à 50
mètre à droite, 150 marmites finissent par en avoir raison après nouveau
bombardement. Si cela continue nous finirons par y rester. Rencontre le Capitaine
de Vesins qui commande les batteries autour de mon PC. 2 AVRIL Nuit bombardée sans
interruption. Vers 9 heures je vais le colo en rentrant à mon PC ; une
grosse marmite éclate à 20 mètres ; j’ai juste le temps de m’allonger,
ensuite je saute dans le boyau et j’attends que la rafale finisse. Il en
tombe une dizaine tout autour de moi. Après déjeuner bombardement sur toute
la ligne, autour de mon PC ; un obus tombe sur la butte de mes
plantons ; pas de couac. 3 AVRIL Nuit très mauvaise. Levé
à 3 h 1/2 pour aller aux lignes en avant de Esnes en Argonne, mais le
bombardement nous empêche de partir. Esnes est en flammes, un dépôt de
munition saute. A 7 h 1/2 je pars avec Ramond ; nous suivons
toutes les lignes avancées et rentrons vers midi morts de fatigue et un peu
de l’émotion subie par les différents marmitages. Je reste couché l’après
midi mais vers 4 heures commence le marmitage. Je décide de me faire faire
une sape contigüe à mon PC qui est de trop grande dimensions, par suite trop
vulnérable malgré son blindage. 5 AVRIL Nos batteries qui nous entourent n’ont pas cessé de tirer toute la nuit. La matinée les Boches ne tirent pas trop, je vais voir le Colonel. En rentrant j’arrive à temps pour m’abriter, la grêle commence mais ne dure pas. A 4 h 1/4 commence le plus violent marmitage avec obus de gros calibre qui se puisse voir, tout tombe dans un rayon de 150 mètres autour de mon PC. Je me réfugie dans ma sape en construction bien qu’elle ne soit pas encore fini d’étayer. Jamais je n’avais subi un bombardement pareil. Enfin à 6 h 1/2 cela se calme je suis rompu. Nous dînons avec des conserves, notre cuisine est en l’air, les obus en sont tombés à 5 mètres. A 8 heures je me couche et m’endors quant à 10 heures on me réveille, il y a alerte, je fais prendre les positions de combat à mon Bataillon et moi même me porte aux tranchées avancées de H à IK à l’Ouest de Esnes. Mon Bataillon est sur le plateau ; j’arrive à H à 1 h 1/2 du matin trempé comme une soupe ; nous avons marché dans l’eau jusqu’au genou pendant ½ heure. 6 AVRIL Nuit blanche. Nous
sommes gelés. Matinée relativement calme. Vers 4 heures les bombardements
réciproques redoublent de violence. Il paraît qu’hier soir les Boches ont
refoulé les nôtres hors de Haucourt
et que c’est pour cela qu’on nous a alertés. 7 AVRIL Les batteries n’ont pas
arrêté toute la nuit, malgré cela j’ai dormi. Matinée relativement calme mais
à partir de midi on prend quelque chose ; cela va crescendo jusqu’à 6
heures du soir , c’est terrifiant, schrapnells, marmites, asphyxiants, lacrymogènes :
le grand jeu. A 7 heures c’est calme et ce n’est pas trop tôt, je suis
abruti. A 9 heures du soir je vais m’endormir quand on me porte l’ordre
d’alerte pour être prêt à toute éventualité. A partir de 3 heures du matin
nos 1 ères lignes vont reprendre l’ouvrage
Palavas à Haucourt. 8 AVRIL Depuis 3 h 1/2 la
canonnade marche à répétition il est impossible que le coup de main n’ait pas
réussi après un assaisonnage pareil. A partir de 9 heures calme presque toute
la journée. 9 AVRIL A 5 h 1/2 je pars avec
le Capitaine Beaumont visiter mes lignes, quelque peu de marmitage
mais vers 9 heures cela commence à gronder et nous refilons vite à travers
champs pour faire 1500 mètres au lieu de 4 heures de boyaux ; quelle
trotte, j’ai cru que nous y restions dans ce sacré champ. A partir de 9 heures les
Boches commencent un marmitage sur toute la ligne mais quel marmitage ;
c’est effroyable rien que de l’artillerie lourde. A 1 heure ils commencent
leur attaque puis ce sont les nôtres et après les Boches ainsi 4 fois dans la
journée sans arrêt. C’est horrible. Je n’ai eu qu’un tué, 12 blessés y
compris le Lieutenant Gestas. Mes tranchées sont comblées en partie. 10 AVRIL Nuit très orageuse, on
répare les dégâts du bombardement.
Nous sommes encore sérieusement marmités ; mon ancien PC a été comblé
aux deux extrémités, ma cuisine démolie et mon cuistot Lartigue ½ HS
sans parole. Heureusement tout s’est bien terminé, pas de casse sauf dans la
vaisselle. A 10 heures du soir les nôtres commencent à bombarder sans doute
quelque nouvelle attaque qui est en marche. 11 AVRIL Matinée assez calme.
Pluie à partir de midi. Je reçois l’ordre d’envoyer mes 4 Capitaines de
Compagnie à 6 heures au Moulin d’Esnes
pour qu’ils aillent reconnaître avec le génie les travaux à faire à la cote 304. Je me dispose à y aller moi même mais le
mauvais temps et les marmites m’entraînent à y rester. A 7 heures du soir le Lieutenant
Levy vient me voir très gai et il part avec sa section. 12 AVRIL Nuit bombardée à 5
heures du matin ; j’apprends que le Lieutenant Levy a été tué,
j’ai eu plusieurs sergents caporaux et hommes tués et blessées à la cote 304. Je suis navré de la mort de Levy
qui était très courageux et charmant. C’est une perte pour le Bataillon. Vers
5 heures du soir on me donne ordre de faire revenir mes Compagnies dans les
réduits. 13 AVRIL Nuit mauvaise. L’eau
monte dans ma cagna ; nous en partons à 6 heures du matin pour revenir
au PC de RG. Page m’a tout chambardé, impossible d’y faire ce que je
voulais. Matinée calme mais bombardement très près du PC après déjeuner. Je
fais continuer ma sape car tous les trous de marmites se touchent ici depuis
mon départ en alerte. 14 AVRIL Nuit calme. D’ailleurs
dans ce PC blindé on n’entend que les marmites qui tombent très près de nous.
Après midi très bombardée ainsi que sur Montzéville.
J’ai un tué à la 9ème (Compagnie) à côté de mon PC. 15 AVRIL Nuit agitée ; tirs
de barrage par nos artilleurs. Matinée calme. Après midi une quinzaine d’obus
de gros calibres tombent dans les environs de mon PC. Vers 9 heures du soir
une grosse attaque doit se faire vers Dommartin,
tout l’horizon est en feu, c’est superbe. 16 AVRIL Nuit agitée ; à 3
heures du matin réveil par des grosses marmites tombant près de nous. Un
hommes de la 9ème (Compagnie) est tué dans son abri. C’est Dimanche des Rameaux
aussi recevons nous la ration d’obus d’un jour de fête. A 19 heures au départ
à l’ouvrage 3 marmites éclatent sur la 11ème (Compagnie) tuant 3
hommes et en blessant seize autres. Vers 20h30 une grosse marmite tombe à
toucher mon PC sans éclater ; c’est miraculeux que Etchegaray qui
était dehors s’en soit sauvé ; elle est tombée à moins d’un mètre de
lui. Tout notre PC a tremblé et elle n’a pas éclaté, qu’eut ce été si elle
avait fonctionné. 17 AVRIL Nous sommes bombardés
toute la journée maos nous apprenons que les artilleurs sont relevés ;
cela nous donne espoir que bientôt notre tour arrivera. 18 AVRIL A partir de 5 h 1/2 du
matin bombardement jusqu’à 6 heures du soir. C’est à devenir fou. Lent le
matin, et crescendo jusqu’au feu rapide le soir. Le matin j’ai manquer
hériter. 19 AVRIL Matinée calme.
Bombardement dur après déjeuner. Nous
apprenons qu’on nous relève demain. 20 AVRIL A 9 heures du matin le Commandant
de Chaumont Quitry du 141ème Territorial vient me
relever ; il passe la journée entière avec moi. Le soir à 10 heures
départ à cheval ; au moment du départ un 105 tombe à côté de nous sans
éclater c’est une vraie (veu ?). Arrivée à 1 heure du matin à Brocourt (NDR : en Argonne). 21 AVRIL Départ à 4 heures pour
Blercourt. Attendu les autos jusqu’à 7 heures du soir ; eng. avec le
colo (NDR : engueulade ?). Abri dans Blercourt, coucher sur le carreau de la cuisine. A
minuit lever. 22 AVRIL Départ en autos à 3
heures du matin pour arriver à Raucourt
à 9 heures du matin. Installation et repas. 23 AVRIL Pâques. Repos. Messe.
Remise de Croix de Guerre. On repartira après demain. 24 AVRIL 1916 Promenade en auto à Bar
le Duc avec Lapeyre ; après déjeuner retourné à Bar avec le Dr
Puig. 25 AVRIL Nous devons partir la
nuit prochaine, je vais dans la matinée reconnaître les voies d’accès à la gare de Revigny.
Retour par Sermaize les Bains.
Beau travail de la Kultur, mais pas cependant aussi impressionnant que
Gerbevillers. Après midi on se prépare au déménagement. 26 AVRIL Dormi de 9 heures à 11 h
1/2 du soir. Départ à minuit pour la gare de
Revigny. Pendant le trajet tous les projecteurs sont en
marche : j’apprends en arrivant que les Zeppelins sont signalés. Nous
commençons à embarquer à 3 h 1/2 du matin, départ 6 h 1/2 pour la 1ère
gare Pantin où je recevrais des
ordres. Tous les tuyaux sont pour le camp retranché de Paris ou environs de
Chantilly. En traversant Nogent c’est l‘enthousiasme des populations qui nous
réconforte. A Pantin j’apprends que nous débarquerons à Breteuil (Oise) vers 4 heures du matin.
C’est la désillusion chez tous, adieu les beaux rêves. 27 AVRIL Arrivés à Breteuil à 3 h 1/2. Nous prenons la route de Hardivillers à 5 heures. C’est la vraie purée comme
cantonnement : on s’installe tant bien que mal. 28 AVRIL J’écris à Louise de se tenir prête à venir me rejoindre ; on parle aussi beaucoup de la reprise des permissions. Promenade à cheval à Froissy. 29 AVRIL L’ordre est donné de
reprendre les permissions mais le colo n’a pas l’intention de faire commencer
le 3ème tour des officiers. J’écris à Louise d’attendre un télégramme et de venir
aussitôt qu’elle le recevra. Je suis tout joyeux à l’idée de la revoir
bientôt. 30 AVRIL Messe superbe avec grand
discours de Monseigneur Ruch aumonier du 20ème Coprs d’Armée ;
à l’entrée à la messe je vois défiler Mme Ramond,
Mme Cantau, Mme Broudie. Après déjeuner je vais à cheval à Crêvecoeur (NDR : à priori Crêvecoeur le
Grand p21D2) et me décide à télégraphier à Louise de venir de
suite ; bureau fermé, mon télégramme partira seulement demain. 1er MAI 1916 Le télégramme est parti
avec pas mal de difficultés ; je pense aller chercher Louise mercredi à Beauvais. Reconnaissance en
voiture de Fontaine Bonneleau
avec Lapeyre et le Dr Broudie. Après midi visite du Général
Balfourier qui sur notre demande autorise le colo à faire partir le 3ème
tour des officiers. 2 MAI Je vais avec le
Bataillon aux douches à Fontaine Bonneleau,
en rentrant je reçois un télégramme qui me parvient grâce à l’obligeance du
Maire de Crêvecoeur, Louise
télégraphie de Margaux qu’elle ne peut arriver mercredi sans autre détail. 3 MAI Je visite mon
cantonnement et remplis mes fonctions de Major de
cantonnement quand Landouard me porte de Crêvecoeur un
nouveau télégramme, de Pauillac celui ci me demandant des explications sur ma
date de permission etc. C’est là je crois ma plus grosse contrariété de la
Campagne. Louise hésite à venir
parce que ce ne serait que pour quelques jours et cependant parmi ces jours
là se trouve le 6 mai (NDR : c’est l’anniversaire de mariage de Jean
Maurice et Louise le 6 mai ; union célébrée en 1905 à Cantenac,
Gironde). Je souffre beaucoup de cette affaire. Evidemment les conseils ne
lui ont pas été ménagés à Margaux (NDR : la belle famille de Jean
Maurice est à Margaux, la famille de Jean Maurice demeure à Pauillac) et pour
lui faire économiser 100 fr. de voyage, on me prive de 8 jours de joie. Je ne
méritais certainement pas cela après toutes les souffrances endurées depuis 6
mois. Je me dispense de commentaires. Le colo m’annonce que je partirai le 1er
pour le 3ème tour càd vers mercredi prochain. Je télégraphie à Louise qu’elle n’a pas besoin de se déranger. 4 au 29 MAI Après explications
reçues j’ai eu bien tort de ma fâcher au sujet du retard de Louise mais j’étais si contrarié. Depuis j’ai eu
ma permission 8 jours à Pauillac.
Pendant mon séjour Gaillard m’a télégraphié qu’on changeait de place.
Louise ne pourra donc venir me raccompagner mais pourra sans doute me
rejoindre. Je repars le 17 mai de Pauillac ; le rapide a 5 heures
de retard par suite d’un déraillement
à Angoulême. Le soir je vais coucher à Rouen. Arrivée le lendemain à 9h1/2 à Abancourt où je trouve le colo qui part. Je prends le commandement du Régiment.
Nous sommes cantonnés à Carroix près de Romescamps (Oise).
Comme nous croyons partir d’un instant à l’autre j’attends 3 jours pour
télégraphier à Louise de venir, et juste elle se trouve d’avoir la rougeole.
C’est la guigne complète. Je suis inquiet ; télégrammes. Enfin le 29
nous recevons ordre de partir le 30 au matin pour Croixrault Nde Poix (NDR : Picardie,
Somme 80). 30 MAI Parti à 5 h 30 de
Carroix, je commande la colonne ;
arrivés à 10 heures à Croixrault. Nous repartons demain matin à 5 heures pour
Pont de Metz au Sud d’Amiens. 31 MAI Départ 5 heures, arrivés
Pont de Metz 10h30. Cantonnement de luxe. Promenade à Amiens après déjeuner. Dîner et soirée épatants
avec Gaillard. 1er JUIN 1916 Départ 5h30 arrivée Aubigny à 11 h 1/2 ; attendu entrée au cantonnement jusqu’à 4 heures. 2 JUIN Départ 5 heures arrivée
à Froissy
à midi. Bivouac le long du canal jusqu’à 10 heures du soir. Puis logement en
baraques. 3 JUIN Très pris pour mettre
bon ordre dans le cantonnement dont je suis Major, secteur tranquille
jusqu’au soir. Soirée bombardement à quelques kilomètres sur les Anglais. 4 JUIN Toujours organisation du
cantonnement ; on fait de très gros préparatifs en vue de
l’offensive ; grosse bataille navale entre Anglais et Boches le 3
mai qui nous fait beaucoup causer. Le Génie construit un pont en face de ma
baraque, je décide de changer de baraque. 5 JUIN au 23 JUIN Séjour à Froissy baraque n°6 aménagement assez confortable.
Rencontré Sourd, qui est fourrier à la 4ème Compagnie du
140ème Territorial avec comme Capitaine Poyanne de Bordeaux et
Sergent Major Braquessac d’Avensan. Sourd me rend le service d’aller
porter des lettres à la maison en allant en permission et en rentrant me
porte les réponses. Puis vu Pinon, téléphoniste d’artillerie au 118ème
avec de Bethemann qui est son Caporal. Secteur calme,
promenades le matin, après déjeuner bridge avec Belly et les Docteurs.
Cafard terrible le 22, jour de la 1ère communion de Néné
(NDR : son fils René). Vu Chauveau et Clémenceau de Lesparre à Laneuville les Bray. 23 JUIN Le Corps d’Armée demande
des officiers connaissant l’anglais, je me propose mais le Colonel ne
transmet pas et remet un état néant. 24JUIN Mon Bataillon
est désigné pour être affecté à la 11ème Division pendant la
Grande offensive. Visite au QG à Méricourt
(NDR : Méricourt sur Somme ou l’Abbé aussi à proximité ?).
Organisation du service. 25 JUIN Bombardement lent mais
intensif. Visite au QG à Méricourt.
Je reçois une lettre de ma mère me donnant tous les détails de la 1ère
communion et une lettre de Néné et d’Isabelle.
(NDR : Isabelle Contal
peintre et amie de la famille). Le très gros cafard me prend ; je ne suis pas
à prendre avec des pincettes ; attrapade avec Olier. Le soir je
vais voir Sourd et Braquessac. 26 JUIN Départ à 5 heures pour Suzanne, bivouac au Sud du canal ; à 7 heures
à midi parcouru les boyaux, le bombardement est effrayant. Visite au QG de la
Division. Après midi installation ; le soir je vais à bord d’une
canonnière causer avec le Commandant Challet et assister au tir sur
Péronne 15 kilomètres. 27 JUIN Je vais reconnaître une
ligne de tranchées pour la police pendant la bataille. Visite au QG de la
Division. Bombardement de plus en plus intense ; rentré au bivouac à
midi éreinté. 28 JUIN Reconnaissance de tout
le secteur avec mes officiers. Visite à la Division ; monté à l’observatoire du Bois de Vaux. Vue
merveilleuse sur Curlu et Péronne
dans le lointain. Installation de tous mes postes ; à la Division on
m’annonce que l’attaque doit se faire le lendemain matin. Il y pleut à
torrent. 29 JUIN L’attaque a été renvoyée
pour 48 heures certainement à cause de l’état du terrain ; tous mes postes
restent en place. Le bombardement marche plus fort que jamais. Je viens de
m’installer à Suzanne. 30 JUIN La Division me fixe
l’heure de l’attaque pour 7h30 demain. Je vais revoir tout mon monde. 1er JUILLET 1916 A 4 heures du matin je
vais sur un pont culminant tâcher de voir les opérations. Il fait un temps
superbe mais avec le soleil arrive une brume intense. Nous restons quand même
à notre poste d’observation jusqu’à 8 heures sans rien voir. Je pars de là
voir tous mes postes, j’organise le service des prisonniers ; la
Division a très bien marché mais elle a échoué devant Curlu ; nous avons 400 prisonniers environ.
Vers 4 heures on lance sur Curlu 800 obus de gros calibre et 4000 de 75
en 1/2 heure. A 5 heures on rentre dans le village la canne à la main et
l’arme à la bretelle. 2 JUILLET Les communiqués sont
parfais. Les Anglais et les Coloniaux ont également bien marché. Le marmitage
continue quand même sur les 2èmes positions ; je fais ma
tournée comme chaque jour. 3 JUILLET Ce matin en allant à Maricourt j’ai eu juste le temps de sauter dans un
boyau pour laisser éclater un 105 sur la route à 5 mètres de moi. Tournée
fatigante. 4 au 10 JUILLET Le canon ne cesse pas de
tonner furieusement ; on se bat ferme ; la 11ème
Division enlève Hem,
la 39ème Division enlève Hardecourt ;
on déplore que les Anglais ne puissent pas avancer comme nous, qui par
suite sommes obligés de marquer le pas. Le 10 juillet je suis avisé que nous
serons relevés 2 compagnies le 11 et 2 compagnies le 13. Ce même jour le Général
Vuillemot remet la médaille militaire à des militaires du 37 (NDR :
37ème Régiment) dans la cour de la maison où j’habite. La musique
et le canon autour de nous rendent la cérémonie plus imposante que
d’habitude. 11 JUILLET 9ème et 10ème
partent pour bivouaquer à Froissy. Je vais visiter Curlu repris aux Boches ; on marmite dur. 12 JUILLET Séjour à Suzanne à faire la partie de bridge. 13 JUILLET Départ à mon tour,
visite à la Division. Rentrée par Laneuville
avec Le Gall en auto, chez Lapeyre je trouve le Lieutenant
Bourely de Toulon, cousin de Noël (NDR :
beau frère de JMA). Le soir les journaux donnent la liste des Croix mais pas
celles de Chevalier ; y suis je ? je suis très perplexe. 14 JUILLET Cagna dans le marais de
Froissy ; mauvais temps. Il me tarde de voir les journaux de ce soir
pour savoir si je suis dans les décorés. Déjeuner à Laneuville avec Lapeyre, Bourely, La Gall
etc ; rentré à Froissy ;
le soir promenade le long du canal ; au moment où je rentre à 9h1/2 un
cycliste vient me chercher pour parler au colo de suite. J’y vais avec la
conviction que c’est pour m’annoncer ma décoration quand patatras !
c’est l’ordre de partir le lendemain matin pour Suzanne et les marmites. Je
reviens bien déprimé. 15 JUILLET Installation à Suzanne avec 5ème, 6ème,
11ème et 12ème (Bataillons) ; nous allons
travailler à la voie ferrée pour relier les batteries lourdes. 16 JUILLET Reconnaissance des travaux puis arrivent 9 et 10 (Compagnies?). Toujours rien dans les journaux. 17 JUILLET 9 et 10
(Bataillons) sont à la disposition de la 153ème Division.
On doit faire une grande attaque demain. Rien dans les journaux si ce n’est
les décorations de la marine. Vers 6 heures pendant que nous jouons au bridge
j’ai une émotion que je n’ai laissée paraître à personne mais qui a été
vive ; j’entends lire au téléphone un message du colo au Commandant Adde
disant que par décret du Président de la République … le Capitaine Page
est Capitaine à titre définitif. J’ai eu un certain frisson au début de
la phrase mais à la fin j’avoue que j’ai été désillusionné. 18 JUILLET L’attaque est ajournée
certainement c’est à cause du mauvais temps. Toujours rien. 19 JUILLET Nuit assez agitée ;
je me lève en sursaut pour courir à la sape. Journée assez calme. 20 JUILLET Nuit excellente, oui
j’ai dormi comme un loir, à mon réveil j’apprends qu’on a marmité toute la
nuit et très près ; je n’ai rien entendu. Journée calme. 21 JUILLET A 9 heures Ramond
m’annonce que nous allons déloger de Suzanne, le 7ème
Corps d’Armée venant à notre place et nous obliquant à
gauche. Nous allons à Bois Billon entre Suzanne et
Maricourt. Nous déterminons les secteurs. 22 JUILLET L’ordre de s’en venir au
bois est arrivé hier soir ; à 7 heures je pars pour le bois après avoir
fait mes adieux au Commandant de Panafieu, homme charmant.
Installation dans le bois, j’ai un abris blindé, on n’a pas l’air de trop
marmiter par ici, mais on n’entend sérieusement le canon. 23 JUILLET Ribes
vient s’installer, on se case tant bien que mal. Le colo viendra demain. Les
grosses pièces qui sont derrière nous tirent à nous casser la tête et les
oreilles. 24 JUILLET Je vais avec Bouchau
et Aygueparne voir les pièces anglaises ; ce sont des 305 et
un 380 ; c’est formidable. Les obus sont des monstres. A 15 heures
arrive le colo, il me fait appeler : je me rends et rencontre le Commandant
de Les Cazes du Corps d’Armée ; à ce moment quelques belles marmites
tombent dans le bois, nous pouvons nous abriter des éclats mais tout juste.
Le colo m’a l’air bien fatigué moralement. 25 JUILLET Nuit épouvantable, nous avons eu un marmitage très
sérieux toute la nuit sur le bois ; j’ai eu des tués et des
blessés : 34 chevaux ou mulets atteints dans le TC du Régiment
(?) ; Rainette (NDR : nom du cheval de JMA depuis sa mobilisation)
est toute sur nerf et me paraît le matin fatiguée, arquée comme si elle avait
fait 100 kilomètres. Le matin c’est un peu l’affolement, enfin on se retasse
(?), on réorganise le bivouac. La 9ème a eu 4 tués par
asphyxie et une dizaine d’évacués ; 10ème à Maricourt
perd Lescarret son cycliste coupé en quatre par une marmite 26 JUILLET La nuit a été moins
tourmentées mais j’ai eu la migraine, enfin cela a l’air de se calmer un peu.
Nous attendons toujours les attaques qui sont retardées pour des raisons que
j’ignore. J’ai encore des asphyxiées à ma 9ème (Cie).
Quelle sale invention que ces gaz. 27 JUILLET Des marmites éclatent
pendant la nuit tout près de mon abri ; on se prépare pour une attaque.
Il y a bombardement réciproque. 28 JUILLET Les ordres arrivent pour
l’attaque qui aura lieu demain matin. 29 JUILLET Je me lève vers 3
heures, il y a un brouillard à couper au couteau ; sera ce un bon ou un
mauvais pour l’attaque ? l’expérience a prouvé que c’était mauvais, on a
avancé mais pas comme on aurait dû. Les mitrailleuses Boches ont fait de la
besogne et ont arrêté en bien des points. 30 JUILLET Nous avons été marmité
encore cette nuit ; mais la 9ème a encore souffert en revenant
du travail : 2 morts et une dizaine de blessés. Le Sergent
Sallaberry, cité au Corps d’Armée il y a 3 jours a disparu, on le
recherche. Ce n’est vers 10 heures qu’on le retrouve déchiqueté à 30
mètres de l’endroit où il s’était couché. Les journaux annoncent la promotion
de la Légion d’Honneur de la Réserve et de la Territoriale ; le journal
donne les officiers mais pas les chevaliers, y suis je ? il me tarde
d’être à demain pour savoir. A 7 heures du soir arrive Maurel ;
je le fais coucher dans ma cagna ; tant mieux je vais avoir un ami avec
moi, cela me changera un peu. 1er AOUT 1916 Nuit calme. Matinée à
attendre impatiemment les nouvelles. Vers 2 h 1/2 je suis dans ma cagna, les
journaux arrivent mais ne donnent aucune liste de Chevaliers ; vers 3
heures un cycliste du colo descend l’escalier, je crois qu’il vient me
chercher, c’est tout simplement une lettre pour Maurel. Le courrier
est donc arrivé et on ne me fait pas appeler ; je commence à craindre un
échec. Vers 4 heures je fais demander à Gaillard si l’officiel est
arrivé. Il n’a pas pu le voir. A 5 heures Dubourg revient du bureau du
colo et Gaillard me fait dire qu’il n’y a aucune Croix pour le Régiment.
Quelle déception ! j’en suis abruti comme si on m’avait assommé. J’y
comptais trop. 2 AOUT Tous les camarades ont
l’air navrés de mon échec. Tant pis, je vois l’officiel ; il n’y a que
quelques Territoriaux et tous les autres font partie de Régiments de Réserve
ou d’Active. 3 au 8 AOUT Période de bombardement
intermittents mais je ne peux me remettre de ma déception. Enfin j’arrive à
me remonter, mais c’est dur. 9 AOUT Aujourd’hui 43 ans
(NDR : Jean Maurice est né à Pauillac-Gironde le 9 août 1873), calme
relatif sur nous. 10 au 19 AOUT Période rasoir au Bois
Billon. Parties interminables de bridge chaque après midi. Promenade plutôt
courtes et dangereuses le matin. Visite à Maricourt
et aux Compagnies. Enfin le 18 on apprend qu’on va être relevé par le 86ème
(Régiment). Le 19 au lieu d’arriver à midi, ils arrivent à 6 heures
du soir ; quels veinards ces gens là, ils ne savent vraiment pas encore
ce que c’est que la guerre. Ils n’ont jamais vues de
« saucisses » , ils en sont encore au sphérique. Dire que
depuis 8bre 1914 je n’ai plus vu de sphériques ; ils vont trouver du
changement. Je quitte le bois Billon le 19 heures à 7 heures du soir, arrive
aux autos à Bray à 8
heures ; nous embarquons et nous démarrons enfin à ….. 5 heures du matin
le 20. Charmante soirée ! 20AOUT Arrivés à 10 heures à Neuville sous Loeuilly . Logement au château.
Bien. 21 AOUT Visite au colo à Plachy-Buyon, ensuite promenade à Pont de Metz et Amiens. Rentré à 7 heures. 22 AOUT Départ pour la gare de Conty à 10 heures. Vu Marc Mortagne à
Loeuilly ; arrivée à Conty à midi. Embarquement en chemin de fer. Départ
à 4 heures. En cours de route un homme tombe du train. Arrivée à Dieppe à 10 heures du soir. 23 AOUT Marche jusqu’à Vassonville près de Saint Martin en campagne,
arrivée à 4 heures matin vanné, éreinté. Installation et dispositions pour
recevoir Louise dans 3–4 jours. 24 AOUT Installation au
cantonnement, promenade à pied à Berneval. 25 AOUT Après déjeuner nous
attelons Rainette avec beaucoup de peine. Orage avec pluie diluvienne. 26 AOUT Nous allons en voiture à
Eu et au Tréport ; rentrée le soir à 10 heures par
pluie battante. 27 AOUT Dimanche. Grand
messe ; je pars à 11 heures pour Dieppe
chercher Mme Maurel et Louise
qui n’arrivent pas. Nous attendons le train de 4 heures du soir ; à 5
heures passent à Saint Martin Poincaré, Briand les Généraux Joffre,
Roques, Pellé etc. Compliments au Régiment. 28 AOUT A 10 heures je suis au
bureau du colo quand arrive le Colonel Hallier, puis le Général
Balfourier ; retour en vitesse au cantonnement pour recevoir Balfourier,
puis départ à 11 h 1/4 pour Dieppe : 12 kilomètres en 33 minutes arrivée
juste à temps, Mme Maurel
n’a pas pu venir, accident de voiture. J’en suis navré pour Maurel,
mais je suis ravi d’avoir Louise.
Enfin cela va me changer un peu et avoir un peu de rose après avoir tant
broyé de noir. 29 AOUT au 7 OCTOBRE 1916 Mois de bonheur complet.
Séjour de Louise à Vassonville et à Arques la Bataille. Permission à Pauillac.
Bonheur sur toute la ligne. 7 OCTOBRE Je suis rentré depuis
quelques jours et je profite de l’occasion pour aller passer 24 heures à Paris. Parti le vendredi soir. Dimanche je
reçois un télégramme me rappelant sans délai. 8 OCTOBRE Départ par le train
omnibus de Paris à Dieppe ;
arrivée à Arques à 5h30 le soir.
Le Bataillon est parti depuis le matin. Je pars à cheval pour Etrimant, hameau de Bailly en rivière ;
arrivée à 8 heures du soir assez fatigué par 7 heures de train et 20
kilomètres à cheval. 9 OCTOBRE Départ à 5 h30 pour Saint Pierre des Jonquères à 15 kilomètres environ.
Le colo est à Smermesnil. 10 OCTOBRE Départ à 6 heures du
matin pour Portmort, hameau de Flanets-Frétils,
le colo est à Ronchois. Vraie ferme où nous logeons au milieu des porcs et de
tout le bétail. 11 OCTOBRE Repos à Portmort ; le
colo m’annonce qu’il me propose pour la 3ème fois pour la
Légion d’Honneur mais je crains encore de ne pas réussir, il n’y a que
4 croix pour la Réserve et Territoriale dans le Corps d’Armée. 12 OCTOBRE Lever à 2 h 1/2, départ
à 3 h 1/2 pour Carroix ;
étape dure-27 kilomètres- arrivés à Carroix à midi ; nous reprenons
notre ancien cantonnement d’il y a 4 mois. 13 OCTOBRE Départ à 7h30 pour Equennes ; cantonnement définitif … ?? Revue
du Général Claret de la Touche Commandant le 20ème CA
(Corps d’Armée) à l’entrée d’Equennes qui félicite le 3ème
Bataillon et son brave Commandant pour la citation à l’ordre de l’Armée. 14 OCTOBRE au 14 NOVEMBRE Séjour à Equennes sans incidents si ce n’est le retour de ma
proposition pour la Croix, 3ème échec pour manque d’annuités. 14 NOVEMBRE 1916 13 heures le colo nous avise de nous tenir prêts à partir le lendemain en autos. A 23h30 les ordres arrivent, on partira à 7 heures ; destination Bray. Nuit blanche. 15 NOVEMBRE Voyage en auto jusqu’au camp 16 près du Bois Billon. Installation très
sommaire, impossible de fermer l’œil de la nuit tellement il fait froid. 16 NOVEMBRE A 7 heures nous recevons
ordre de partir pour la halte de Maurepas. Nous passons en plein pays
reconquis. Hardecourt et Maurepas ont complètement disparus il n’y a plus une
seule pierre, tout à été employé aux routes. C’est impressionnant en nous
rendant près de Hardecourt
un de nos beaux avions bi-moteur descend puis à 15 mètres pique du nez et
s’écrase sur le sol. Le pilote avait été blessé grièvement par balle. Il a
lutté pour atterrir mais au but les forces ont dû lui manquer. C’est pénible
à voir ; l’observateur semble n’avoir eu que la commotion. Je m’installe
dans une cagna assez bien faite en tôle ondulée. 16 NOVEMBRE Reconnaissance des secteurs, nous travaillerons entre Combles et Sailly- Salissel. Journée très froide. Nous attendons avec impatience nos bagages et nos vivres. 17 NOVEMBRE Temps affreusement
froid. Ballade au ravin pour voir Lapeyre et le Capitaine Thierry
de la 20/3. Notre quartier a l’air assez calme comme obus. 18 NOVEMBRE Brouillard intense,
impossible de sortir. 19 NOVEMBRE Idem. 20 NOVEMBRE Temps assez beau. Je
vais voir Clermontel dans le ravin à côté du mien. En route trous
d’obus à se toucher, pas mal de cadavres à demi enterrés, notamment un Boche
dont on ne voit que les du bras sortant de sa capote, la main est partie. 21 NOVEMBRE Quelques marmites autour
de notre bivouac. 22 NOVEMBRE Ballade rapide au ravin. 23 OCTOBRE Temps superbe, meeting
d’aviation ; 52 saucisses en vue de mon PC. Les éclats des schrapnelles
contre avions me font courir avec Dubourg. 24 NOVEMBRE au 1er DECEMBRE 1916 Toujours calme dans
notre secteur. Visites au 141 (141ème Rgt), déjeuners,
dîners, bridges avec les voisins Clermontel, Dupouy etc. 2 DECEMBRE une grosse marmite a
éclaté dans la nuit à 100 mètres de ma cagna … je ne l’ai pas entendue. J’ai
dû rêver que c’était un départ. Dernier bridge avec le 141 qui part
demain. 3 DECEMBRE Achat … au prix du front
de mobilier au 141, y compris le fauteuil
du Maire de Combles. Ce soir m’arrive la note annonçant notre
travail du 10 au 15 et la relève pour le 15. 4 DECEMBRE Conférence avec le
Colonel du 209 à Maricourt
pour organiser le nettoyage du secteur que nous allons
quitter. 5 au 10 DECEMBRE Pluie, vent froid,
quelques blessés au Bataillon. Je retourne à Maricourt une fois. Visite à Lapeyre au ravin ;
quelques vagues obus tombent proche de notre bivouac mais il y en a bigrement
de gros qui nous passent par dessus. La nuit des avions s’amusent à nous
survoler très bas et font marcher la mitrailleuse en tirant sur nos cagnas
sans résultat d’ailleurs. .16 DECEMBRE Les Anglais
prennent notre secteur, nous partons pour Bray où nous couchons le soir. Le
colo m’offre de partir en perm en même temps que lui ; Les Compagnies se
rendent pour embarquer en auto le lendemain. 17 DECEMBRE Embarquement en autos
pour Tilloy les Conty
; arrivée à 2 heures ; je loge dans un château plutôt dèche. Je prends
la suite de Mgr Rouch. 18 DECEMBRE Embarquement en chemin
de fer à Conty à 11 heures du
soir. Départ le 19 décembre à 2 heures du matin ; il fait froid ;
le matin à 7 h 1/2 au lieu de me trouver à Pantin je me réveille à Creil ; on nous a changés
d’itinéraire ; nous repassons par Verberie,
Bethisy et tous les pays que nous avions parcourus en
septembre 1914. Voyage sans autre incident notable à Toul on me donne comme gare de débarquement Diarville mais avec cantonnement à Chaouilley. 20 DECEMBRE Arrivée à Chaouilley à
midi, installation bonne. Visite au colo qui est à Praye puis à Diarville à Mme Trévillot et à la vieille Clémence. 21 DECEMBRE Le colo me signera la
permission demain. 22 DECEMBRE J’ai ma permission
à 3 heures du soir, rentrée en vitesse et à 5 h 1/2 départ pour la gare. Le
cheval de la 9ème tombe, je fais seller Rainette. Voyage
avec Belly ; archi complet. 23 DECEMBRE Arrivée Paris à 10 h 1/2 ; télégramme
Pauillac ; courses dans Paris ; départ à 6 heures du soir. 24 DECEMBRE Arrivée Bordeaux, Louise
m’attend, rencontré Colonel quai gare Saint Jean. 25 DECEMBRE au 4 JANVIER Permission avec toutes
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