Extrait de presse sur la démolition par vérinage.

Démolition par vérinage : l'atout sécurité
ARCHITECTURE TECHNIQUE  
N° 5136 du 03/05/2002 - page 60 Magazine Le Moniteur.



 

La limitation des périmètres de sécurité a plaidé pour la technique de démolition par vérinage, dans deux opérations récentes de l'office public départemental d'HLM (OPDHLM) du Territoire-de-Belfort : une tour R + 10 de 41 logements, abattue à Offemont en février dernier, et une barre R + 16 de 260 logements, démolie en 5 phases au printemps 2000.

Inventeur du procédé protégé par un brevet, l'entrepreneur alsacien Dominique Ferrari a accumulé, depuis 1997, une quinzaine d'expériences, toutes concluantes, aux côtés du bureau d'études Ceder.

En 1999, un avis technique de la Socotec a conforté cette méthode douce qui a prouvé, dans l'agglomération de Belfort, son adéquation aux démolitions en zone urbaine dense : « Les spectateurs les plus proches se trouvaient à 30 m de la tour d'Offemont lors de son effondrement. Pour les bâtiments situés à moins de 20 m, nous n'avons procédé à aucune évacuation », témoigne Daniel-Henri Ponthuer, directeur technique de l'OPDHLM. La démolition a même épargné une rangée d'arbres situés à 6 m de la tour haute de 33,50 m.

Un seul niveau affaibli avant la poussée

En ce qui concerne les travaux préparatoires, la principale spécificité du vérinage par rapport à l'explosif tient dans leur concentration sur un seul niveau : le cinquième sous la toiture dans le cas d'Offemont. Pour assurer la poussée de 170 t nécessaire à l'effondrement des quatre étages supérieurs, deux vérins de 120 t ont atteint la pression hydraulique de rupture à 200 bars, soit trois fois moins que le potentiel de la centrale hydraulique mobilisée par l'entreprise Ferrari. Dans le sens opposé à la poussée, deux vérins de 20 t ont garanti le contreventement provisoire de l'ouvrage. Tracté par une pelle mécanique, un dispositif de mouflage a complété la pression hydraulique jusqu'au basculement, obtenu au bout de trois minutes. « En mouflage, comme en pression hydraulique, nous prévoyons toujours 150 % de la force calculée », précise Claude Siegel, P-DG de Ceder.

Moins spectaculaire que lorsqu'il résulte d'une explosion, l'effondrement par vérinage s'appuie sur la masse de l'immeuble : tout en cédant à la pression, la partie inférieure a amorti les 1 550 t de charges concentrées dans les 4 étages supérieurs.

Cette capacité d'amortissement a joué un rôle important dans la première expérience de démolition par vérinage menée l'an dernier par l'OPDHLM : « Sous les 17 niveaux de la barre de la Locomotive, nous devions éviter d'abîmer un câble coaxial », indique Dominique Ferrari. L'absence d'impact sismique décelable a joué en faveur de la technique retenue.

Pour cette première expérience, le maître d'ouvrage avait demandé à Othem, maître d'oeuvre, une étude comparative entre grignotage, explosif et vérinage. « Il existe peu de pelles adaptées à des tours de 30 m de hauteur : les solutions mécaniques se sont vite révélées peu compétitives. Dans ce quartier dense, la proximité entre la cheminée de la Locomotive et un bâtiment voisin rendait délicate l'hypothèse de l'explosion. Au contraire, le mode constructif de la barre facilitait le recours au vérinage : dans les immeubles construits selon la méthode des ..coffrages à tunnel'' , courante dans les années 60 et 70, l'alignement des refends facilite l'effondrement de l'ouvrage sur lui-même », analyse Jean-Pierre Beckmann, chef de projet à Othem.

Les immeubles carrés ou rectangulaires de 6 à 19 niveaux

Ajoutée aux spécificités de la Locomotive, l'argumentation liée à la sécurité a joué un rôle majeur dans l'adhésion du maître d'ouvrage : « Dans le cadre de l'analyse comparative, nous avons mesuré l'importance des coûts de mise en sécurité non pris en compte dans les appels d'offres de démolition », témoigne Daniel-Henri Ponthuer. L'opération d'Offemont, plus accessible que la Locomotive à des procédés mécaniques, a néanmoins confirmé l'avantage comparatif des vérins du point de vue de la sécurité : « Pour un prix équivalent, le grignotage présentait des risques de chutes intempestives d'acrotères. Cette solution me paraît plus adaptée à des hauteurs de type R + 4 », estime Jean-François Bayle, directeur de l'agence mulhousienne d'OTE, maître d'oeuvre de cette démolition.

Certes, l'inventeur du procédé reconnaît lui-même ses limites : « Le vérinage s'applique surtout aux immeubles carrés ou rectangulaires, dans des hauteurs comprises entre R + 6 et R + 18, un marché que nous estimons à environ 9 500 logements par an », annonce Dominique Ferrari.

Pour développer son argumentation sur le thème de la sécurité, l'entrepreneur entend profiter des nouveaux guides des bonnes pratiques de la démolition en gestation à l'Office public de prévention du BTP. Au-delà des opérations de renouvellement urbain, Ferrari et Ceder, associés au sein de la société Innovation Démolition Déchets (IDD) défendent la place du vérinage dans le démantèlement d'immeubles industriels et d'ouvrages d'art.

L'ouverture du nouveau Code des marchés publics aux variantes proposées par les entreprises devrait leur faciliter la tâche.

PHOTOS :

OFFEMONT. Décomposition chronologique de la démolition de la tour, par poussée horizontale hydraulique actionnée par un vérin situé quatre étages sous le sommet du bâtiment.

MAITRISE D'OUVRAGE : Office public départemental d'HLM du Territoire-de-Belfort.

MAITRISE D'OEUVRE : OTE pour la tour d'Offemont, OTHEM pour la barre de la locomotive.

ENTREPRISE : FERRARI (démolition par vérinage).

BUREAU D'ETUDES : Ceder.

CALENDRIER : juin 2000 pour la locomotive, février 2002 pour la tour D'Offemont.


LAURENT MIGUE


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