Petites Histoires de Grimpeurs....
Nous avons tous eus, lors d'une ascension de voie, une immense frayeur, un extraordinaire bonheur, ou tout simplement, une petite anecdote amusante qui nous est arrivée... Ces histoires, on a parfois envie de les partager mais avec qui ? Cette page est donc destinée à ces récits...Le principe est simple, vous m'envoyez votre histoire tapée sous bene.bibi@evc.net, ainsi que votre prénom. Je publierai alors mot à mot votre récit, afin que tout le monde puisse le lire...J'y mettrai aussi quelquefois, des récits de "grands grimpeurs"... A présent, à vous la parole !
"Dénivelée:environ 600m
Horaire:5 à 6 heures
Date : Samedi 15 mars 1997
Parcours : Réalisation du Couloir en Y, Face Nord de la Peña Telera, avec un groupe de 6 personnes. (sans skis, mais avec piolet, crampons et corde, difficulté : Peu Difficile) départ 6 h 30 de Pau. A 8 h 30 nous quittons les voitures (1400 m) et remontons la piste sur quelques kilomètres. A droite du grand dièdre central de la face nord, nous remontons un cône de déjection évident sur 150 m avant de tirer à droite par un petit ressaut et prendre pied dans un couloir peu raide (40 °) que l'on remonte, toujours vers la droite. Après un partie plus raide dans laquelle nous tirons 2 courtes longueurs (deux pitons en place sous un auvent), nous débouchons à une brèche (2650 m environ), à droite (ouest) du sommet à 14 h. Descente : par le couloir en Z. Depuis la brèche, marcher à flanc vers l'ouest, (à droite) en contrebas de la crète durant environ 5 à 10 mn. Lorsque çà remonte vers la pointe suivante, le couloir en Z plonge vers le nord. Deux pitons permettent de tirer un rappel ou de poser une main courante pour la partie la plus raide. Nous y mettons 120 m de corde, ce qui nous évite le second rappel 50 m plus bas à droite. Nous finissons la descente décordés dans le même couloir. Retour au véhicules à 17 h.
Total 180 km en voiture."Face nord de la Peña Telera par Pierre Puiseux
"[...]Je garde mes crampons aux pieds. Ça ne facilitera pas l'escalade du mur sur les premiers quarante mètres, mais, plus haut, je retrouverai la glace et là, ils seront indispensables. Je commence l'escalade de la fissure verticale. Je pensais la suivre sur toute sa longueur. Au bout de quinze mètres, elle devient légèrement surplombante, me rejette dans le vide, puis disparaît au-delà d'un léger surplomb. J'hésite à la franchir, car sur ma droite la deuxième fissure montant en diagonale me semble, à ma hauteur, sans problèmes. L'atteindre en traversant horizontalement à droite ne devrait pas être bien difficile. Quelques prises très en relief indiquent le passage: un pied là, une main là, plus loin encore une autre prise...
Je fais part de mes impressions à Serge et m'engage dans la traversée. Tout se passe bien. Lorsque je rejoins ladite fissure, je pousse quand même un soupir de soulagement; avec les crampons ce n'était pas tellement facile.
Le mur s'incline, devient moins raide. Derrière moi, les cordes forment un angle droit. Les mètres suivants sont encore difficiles. Je ne prends aucun risque et plante un piton auquel je fixe un anneau de corde et, par l'intermédiaire d'un mousqueton, une des deux cordes. Une seule, afin qu'elle coulisse mieux. Malgré tout, les cordes me freinent. Serge doit les agiter, leur imprimer de longues ondulations pour faciliter leur glissement dans les mousquetons. Enfin, assez vite, en suivant une ligne ascendante vers la gauche, je trouve, à l'aplomb de Serge, un emplacement de relais.
Le sac grimpe sans peine, il ne touche pas le rocher , semble plus léger. En montant, mon compagnon récupère les pitons.
Le mur que nous venons de franchir est bien, comme je l'avais supposé, le début des grandes difficultés: le bouclier d'une haute et raide rampe formée de plans déversés sur la gauche et extrêmement redressée dans le sens vertical; quatre cents mètres plus haut, un épaulement de la paroi en marque la fin. Au-delà de cette épaule, la paroi change de configuration. Peut-être une faiblesse de l'armure... D'ici, rien n'est évident.
Ce que je sais (pour l'avoir observé aux jumelles de différents points du glacier) des pentes supérieures du Linceul, laisse envisager, dans cette partie, pour le moment invisible, une possibilité d'itinéraire qui ne devrait pas être d'extrême difficulté. Mais je sais aussi par expérience qu'il serait imprudent de se fier à quelques apparences. Dans une paroi immense comme celle des Jorasses, un homme n'est rien, tout juste une fourmi, sans les moyens dont dispose l'insecte pour escalader les rochers. [...]"Demaison, 342 heures dans les Grandes Jorasses.
" La descente vers le pied de l'arête des bosses est légère et nous amène au pied de l'arête des bosses sous les deux refuges Vallot que nous distinguons à peine dans le jour naissant. C'est ici que beaucoup de cordées font le point et que beaucoup d'alpiniste renonce au sommet. Daniel pose la question: "Ça va, la tête ne cogne pas trop, ok?" Je lui réponds que tout va bien envahit par le sentiment qu'aujourd'hui nous irons au sommet. Quelques cordées s'étirent doucement sur l'arête des Bosses alors que le ciel rosit doucement et que le soleil s'annonce là-bas vers l'est. Je pensais que nous serions à quelques minutes du sommet une fois les deux premières bosses gravit, mais mon impatience laisse place à une longue et interminable arête effilée. Ces moments sont délicieux, le sommet est à quelques mètres, le but ultime se découvre, le Mont Blanc projète son ombre sur les hautes vallées, ça y est, l'Europe est à nos pieds 4808m!
On se félicite, Christian verse des larmes de bonheur alors que nous savourons la vue sur 360 degrés. J'ai tout de même du mal à retrouver mon souffle alors que j'entends mon cur battre. Nous reconnaissons au loin des sommets familiers au fur et à mesure que le jour se lève et que les reliefs s'affirment. Nous restons 20mn au sommet avant de nous consulter pour choisir l'itinéraire de la descente. Nous optons pour les trois monts (Mont Blanc; Mont Maudit; Mont Blanc du Tacul) qui à l'avantage d'être entièrement glacière et surtout d'être moins exposé que l'itinéraire des Grands Mulets. Nous dévalons les premières pentes sous le sommet et la montagne de la cote avant de prendre pied au col de la Brenva."
Held Philippe, lors de son ascension du Mont-Blanc.
"Nous sommes partis le 19 Juillet 1996.Il me manquait uniquement mon épouse Ewa,auteur silencieux de mes succès.Cette fois tout avait été préparé minutieusement; les plans du trajet,les camps de base,la nourriture et surtout l'argent au cas où le mauvais temps nous oblige à prolonger notre séjour dans un gîte.Connaissant la piste, je savais ce qui m'attendait.Nous sommes donc arrivés facilement au Dôme du Gouter.Nous étions à 4304m quand le temps a commencé à changer.Le brouillard s'approchait.Il restait 30 m jusqu'à Vallott.Vers le chalet un groupe de gens se tassaient.Chacun voulait se retrouver le plus vite possible à l'intérieur.Mariusz et moi, nous nous approchions doucement vers l'entrée quand nous nous sommes retrouvés à côté d'une jeune femme Française.Me voyant avec des béquilles elle a voulu me laisser passer le premier.Soudain alors que je montais difficilement à l'échelle,une série brutale de coups de tonnerre a éclaté.On a entendu des hurlements.Derrière mon épaule,j'ai vu Mariusz tomber.Les mains de Maciek m'ont entraîné à l'intérieur.Personne n'est sorti pour aider les autres.Mariusz n'était pas avec nous.Je pensais qu'il était mort.Je réfléchissais ce que j'allais dire à sa femme et soudain il est rentré.Il a été électrocuté.Dans le refuge on a amené la jeune Française.On l'a allongée par terre.Deux guides Français se sont occupés d'elle.Grâce à Dieu elle a repris conscience.L'hélicoptère a été envoyé.Nos regards se sont croisés.J'ai été content d'être vivant."
Krzysztof Gardas, handicapé à l'âge de 21 ans, il gravit avec ses béquilles les plus hauts sommets du monde, ici l'ascension du Mont-Blanc.