Cracovie
Une journée entière de train car il n'y a qu'un Berlin-Cracovie direct, et ce n'est pas un express. En plus il a plu presque toute la journée, ce qui vu les circonstances, était un moindre mal. Les paysages traversés étaient plutôt verts et humides pour ne pas dire marécageux. Beaucoup d'usines désaffectées et de mines abandonnées, les villes et villages traversés ne traduisent pas l'opulence, loin de là. Arrivée dans une auberge de jeunesse où nous allons expérimenter le dortoir 8 places, mixte qui plus est. Ce sont vraiment des jeunes, même les gérants et nous devons accuser au minimum 35 ans de plus par rapport à la moyenne d'âge. Il y a un français musicien-chanteur, Siméon Lenoir, un peu plus âgé qui anime la soirée avec un autre ami musicien. Nous passons vraiment une très bonne soirée à laquelle nous ne attendions pas.
Soirée musique au Giraffe Hostel.
C'est plutôt sympa, "cool" comme ils disent; il y a un patchwork de nationalités représentées, avec une majorité de français! Où il se confirme que Cracovie est une ville très touristique et qui bouge et fait bouger. Connection internet rapide, je vais pouvoir enfin charger mes photos, et gratuite qui plus est, ce qui n'était pas le cas à Berlin!
Enfin un pâle rayon de soleil qui nous a permis de visiter la vieille ville de Cracovie avec un peu plus d'entrain. L'ancienne capitale des rois de Pologne possède de beaux monuments miraculeusement préservés grâce au fait que le Gauleiter nazi de Pologne en avait fait le lieu de sa résidence. La place du marché, centrale, est très animée et les touristes s'y pressent en rangs serrés, nous ne faisons pas exception. La principale animation consiste à écouter à chaque heure les notes du Hejnal, mélodie jouée à la trompette depuis le clocher de l'église Sainte Marie, et sensée rappeler la mort au XIIIème siècle, par une flèche Tartare, du guetteur qui était chargé de sonner l'alarme en cas d'attaque ennemie.
Rynek Glowny, la place du marché.
Il y a aussi beaucoup d'églises, de cures, de séminaires, car la vocation pour devenir prêtre ne souffre pas d'une certaine désaffection comme chez nous. Un parc de verdure très agréable entoure la vieille ville, remplaçant en partie les anciens remparts.Nous avons visité l'Université Jagellon où étudièrent Copernic et le pape Jean-Paul II, entre autres. Il s'y déroulait une remise de diplôme de fin d'études très traditionnelle et joyeuse. Nous avons poussé jusqu'à la colline du château Wawel mais devant l'affluence du week-end, nous en avons repoussé la visite à lundi, qui devrait être plus calme en terme de fréquentation. Pour demain, nous avons un programme baucoup plus sérieux.
Oswiecim (Auschwitz)
Journée triste placée sous le signe de la mémoire et aussi d'un temps exécrable marqué par une pluie dense et glaciale, mais nous n'oserons pas nous en plaindre après avoir vu, je ne peux pas employer le mot "visité", le camp de concentration et d'extermination le plus connu et le plus meurtrier conçu, construit et utilisé par les nazis. Dès le fronton de la porte d'entrée portant la fameuse devise connue de tous et dont le vol récent défraya la chronique (c'est une réplique qui est en place actuellement), on est saisi par l'atmosphère étrange du lieu, comme si tout le monde avait une responsabilité dans les atrocités qui se sont déroulées ici.
L'entrée du camp d'Auschwitz.
Et cela malgré toutes les photos, les films que nous avons vus et les livres lus qui ont porté témoignage de l'incroyable cruauté des bourreaux et de l'indicible souffrance des victimes. Les chiffres donnent le vertige, plus d'un million de déportés sont morts ici, victimes de l'industrie de la mort, exploitée au sens propre du terme par les nazis. En réalité, il y a eu le premier camp d'Auschwitz où a été initiée la "Solution finale", suivi par la construction et l'exploitation du camp de Auschwitz II-Birkenau à 3km du premier, où les nazis sont passés à une échelle très supérieure. C'est trempés et transis que nous avons regagné notre bus pour le retour vers notre auberge, en pensant que le nom d'Auschwitz hantera longtemps la mémoire de l'humanité.
Cracovie
Décidément, le dieu des voyageurs n'est pas avec nous, pour le moment. Un temps aussi pourri sinon plus que hier, pluie et froid conjugués.
L'occasion d'étrenner nos ponchos imperméables: test réussi pour l'étanchéité, mais le froid est tenace.
La visite du château royal de Wawel que nous avions différée samedi, s'imposait donc, d'autant qu'il y a moins de monde, l'accès journalier est
limité quantitativement, mais gratuit le lundi, ce qui ne gâche rien.
Le château royal Wawel.
Le château royal Wawel est situé sur une petite colline au bout de la vieille ville de Cracovie et surplombe une boucle de la Vistule. Le cadre doit être magnifique sous le soleil, malheureusement nous n'en profitons pas. Le château est un résumé de tous les styles d'architecture durant cinq siècles, allant du roman au néo-baroque en passant par le gothique, le renaissance et le néo-classique, le tout très bien conservé et mis en valeur. La cour intérieure est bordée d'une galerie renaissance qui est très belle et harmonieuse. Le palais abrite des collections d'armes, le trésor de la Couronne ou ce qu'il en reste après les pillages successifs par les nations guerrières voisines Prusse, Autriche, Russie et les nazis. Il y a aussi une collection de tapisseries des Flandres de toute beauté.
La cathédrale de style gothique, située dans l'enceinte du château et qui fut le lieu du couronnement de 37 rois de Pologne, abrite les mausolées
de beaucoup d'entre eux, de reines et d'archevêques, ainsi que des reliques vénérées par les polonais. D'autres rois et personnages
historiques célèbres sont enterrés dans la crypte de la cathédrale. Ce lieu est le Panthéon des polonais. Le dernier président de la république,
qui n'a aucune action extraordinaire à son actif, et sa femme, morts récemment dans un accident d'avion, reposent dans un sarcophage de marbre à
l'entrée de la crypte. Une preuve de la peopolisation des esprits!
Nous finissons notre journée par un tour dans le vieux carré juif de Cracovie, situé dans le quartier de Kazimierz, et qui n'a pas encore bénéficié
de rénovation.
Finalement cette journée bien arrosée nous a encore permis de voir plein de choses intéressantes (surtout pour moi, car Chantal n'est pas une fan des
armes, fussent-elles anciennes) C'est à peu près secs mais toujours transis de froid, nous n'avons pas voulu sortir notre équipement d'hiver, que nous
regagnons notre gîte.
Varsovie
Nous partons de Cracovie en train express, sous une pluie toujours dense, pour traverser la Petite Pologne et la Mazovie, régions agricoles. Le train express va à peine plus vite qu'un train normal, et il s'arrête en rase campagne pour attendre on ne sait quoi! Cela nous permet d'admirer le paysage très verdoyant, on sait maintenant pourquoi, de petites collines couvertes de forêts ou de champs pour beaucoup inondées. A l'arrivée à la gare centrale de Varsovie, une dame agée, voyant que nous sommes étrangers et que nous cherchons notre chemin pour trouver un taxi, nous propose dans un excellent français de nous guider et nous appelle même un taxi d'une compagnie "honnête" avec son portable, pour nous éviter de nous faire arnaquer par un chauffeur mal intentionné. La dame a été cantatrice, a beaucoup voyagé, ce qui explique son français impeccable. Nous la remercions en la quittant et il s'avère que le prix de la course est vraiment minime.
Le palais de la Culture et de la Science.
Notre auberge de jeunesse, le OKI DOKI Hostel, tout un programme, est très bien situé dans le centre de Varsovie, à deux pas de l'immense palais de la Culture et de la Science datant de l'époque soviétique. Le seul point noir, et de taille, est que l'Hostel occupe les étages 2, 3 et 4 d'un immeuble sans ascenseur! Il nous faut un petit moment pour reprendre notre souffle après avoir monté nos bagages. Après cela, nous partons à la découverte de la ville.
Varsovie à la particularité d'avoir une "vieille ville" relativement neuve car complètement reconstruite après les ravages de la guerre, les allemands l'ayant quasiment rasée pendant et après l'insurrection du ghetto juif. Ce travail colossal a été mené à bien d'une manière remarquable et seul un oeil averti peut voir que les maisons de la Place de la Vieille Ville ne sont que des répliques de constructions de tous les styles du XVIème au XIXème siècle. Le château royal lui-même a été reconstruit à l'identique, non seulement le bâtiment mais les aménagements intérieurs ainsi que la décoration. Imaginez s'il fallait refaire ne serait-ce qu'un tiers du château de Versailles de fond en comble!
Le palais royal de Varsovie.
Tout le quartier est à l'avenant, avec les palais, les églises et les monuments à la gloire des personnages célèbres de l'hitoire de la Pologne.
Pour ma part, j'ai quand même été étonné de voir une statue équestre de Jozef Poniatowski, qui fut le seul maréchal étranger de Napoléon, en général
romain.
L'histoire de la Pologne est très mouvementée et la galerie de portraits dans les appartements du palais royal en témoigne, comme celui d'Henri de Valois,
élu roi de Pologne à l'insu de son plein gré. Nous avons traversé de beaux parcs, pénétré dans des églises ruisselantes de stucs et de statues dorés,
admiré des édifices de tous les styles. Nous n'étions pas seuls car, l'année scolaire tirant à sa fin, il semble que toutes les écoles ont inscrit
à leur programme une sortie de visite du palais royal ou de la Vieille Ville.
Enfin un peu de soleil, après un début de journée dans une brume fraîche. Nous avons dévolu la matinée à la recherche des vestiges du mur du ghetto de Varsovie, pas évidents à trouver malgré le Guide du Routard et la carte, puis on a continué par les monuments des Héros de l'insurrection du ghetto, ceux des brigades polonaises libres ayant combattu à Monte Cassino, et enfin la tombe du Soldat Inconnu dans le parc Ogrod Saski. Bon, ce n'est pas la tasse de thé de Chantal alors j'ai compensé en visitant des boutiques de fleuristes et un magasin genre supérette installé dans l'ancienne Halle du Marché. Tout cela nous a ramené vers la vieille ville où nous avons déjeuné dans un restaurant, ou plutôt une cantine, typique polonaise. Le décor est sobre, la caissière guère aimable, mais les cuisinières assez âgées font une cuisine roborative qui devait tenir au ventre des masses laborieuses de l'ère communiste. On a remarqué qu'il est très difficile de trouver des plats traditionnels polonais dans les restaurants, la plupart d'entre eux ayant opté pour une cuisine occidentalisée pour satisfaire maintenant le flot des touristes.
Daguerréotype de Frédéric Chopin.
J'ai pu enfin prendre en photo la colonne du roi Sigismond censé veiller sur les Varsoviens, les photos faites hier étaient sombres et sans
contraste. Nous sommes repassés sur la Place de la Vieille Ville, aujourd'hui noire de monde et je n'ai pas résisté à revoir les remparts
(reconstruits) de Varsovie.
Nous avons continué en allant au musée Frédéric Chopin où j'ai dû parlementer et insister pour que la préposée à l'accueil daigne nous délivrer des
tickets, le nombre de visiteurs étant contingenté. Si ce n'est pas mon charme, ce doit être ma détermination qui a dû la convaincre de nous vendre
les billets soi-disant "sold-out" jusqu'à samedi. On n'a pas eu à le regretter, l'aménagement du musée est superbe dans un palais baroque
et, installés dans des fauteuils très confortables, la musique de Chopin est un must pour ce qui est de nous détendre après une longue journée de
marche harassante. Le musée en lui-même est très intéressant et retrace la courte vie du compositeur à travers l'histoire de la Pologne de son
époque, les lettres de sa correspondance avec les femmes et les autres artistes, les gravures et tableaux , les articles des journaux (français)
célébrant ses concerts et les manuscrits de ses compositions ainsi que des objets personnels. Il y a aussi son portrait, un des premiers
daguerréotypes de l'histoire. Après cette journée très chargée mais ô combien enrichissante, nous rentrons pour un repos bien mérité.
La dernière journéé en Pologne a été très agréable vu le beau temps qui a été enfin de la partie. Nous l'avons consacrée à la visite du Musée National et du Musée de l'Armée. Dans le premier, des peintures religieuses, sculptures sur bois, des rétables richement enluminés, des tableaux de maîtres italiens, flamands, allemands et français et polonais. La section des antiquités possède une très belle collection de vases grecs avec les décors typiques relatant les histoires de la mythologie hellénique. Le Musée de l'Armée n'inspirait pas Chantal, alors est restée dehors à se reposer au soleil sur un banc dans le parc extérieur, et moi je me suis régalé comme d'habitude dès qu'il s'agit d'histoires de faits d'armes des siècles écoulés jusqu'à une période plus récente, d'autant qu' on trouve là des imbrications historiques de tous les pays d'Europe, y compris de la France.
Le rond-point Charles de Gaulle.
Nous terminons en flânant pour revenir à notre Hostel OKI DOKI où nous nous sommes bien plus, en prenant le temps de déguster une glace sur une des terrasses enfin prises d'assaut . On remarquera que les polonais semblent très pressés, très serviables, on nous a proposé plusieurs fois spontanément de nous renseigner quand nous consultions notre carte dans la rue. Il n'y a aucun problème de communication, les jeunes parlant presque tous l'anglais et même les personnes de la génération précédente. Il n'y a vraiment que les anciens qui semblent être réfractaires à la modernité, du moins dans l'esprit. Comme ils occupent beaucoup de postes dans les administrations et les sociétés d'état, ils n'ont pas la culture du client et la productivité laisse beaucoup à désirer. Par exemple à la Gare Centrale, il m'a fallu attendre une heure entière pour arriver au guichet derrière moins d'une dizaine de personnes et pouvoir acheter mes billets pour Vilnius. En France, le préposé doit traiter une cinquantaine de clients durant le même laps de temps et on râle que c'est trop long. On remarque aussi que la maladie du téléphone portable a frappé ici aussi, et il n'est pas rare de voir des personnes avec deux portables à la main. Le polonais s'apparente au russe et il y a beaucoup de mots qui se ressemblent, sauf pour l'écriture qui est ici latine à la place du cyrillique. Du point de vue de la sécurité nous n'avons vu aucun incident, les forces de police étant très présentes dans les rues, du moins à Cracovie et à Varsovie, ainsi qu'aux abords des lieux touristiques. Notre mazurka polonaise s'achève, nous prenons le bus Intercity de nuit pour Vilnius ce soir.