Les Missions Jésuites de la Chiquitania
On a passé la frontière entre le Brésil et la Bolivie à pied, sacs au dos, par le pont et la centaine de mètres qui séparent les deux postes frontières, le tout en moins de 30mn chrono, il n'y avait pas foule pour les formalités de douane dans le sens Brésil-Bolivie. A la petite ville frontière bolivienne de Puerto Quijarro le contraste est saisissant. Seule la route principale est asphaltée, mais chaque véhicule qui passe soulève un nuage de poussière, on se croirait dans un décor de western. Le moins que l'on puisse dire c'est que ça ne respire pas la richesse de ce côté du canal de Tamengo qui sépare ici les deux pays. Il n'y a pas grand chose à voir à Puerto Quijarro et comble de malchance il n'y aura q'un train la lendemain après-midi pour continuer vers San José de Chiquitos et la Chiquitania, la région des Missions Jésuites que l'on veut visiter. Halte et repos forcé donc.
L'église de la Mission de San José de Chiquitos.
San José de Chiquitos est une toute petite ville et est la base de départ pour visiter les Missions Jésuites. Celle de San José est la seule construite en pierre, les autres l'étant en bois et en torchis. Ces Missions ont été construites au milieu du XVIIIème siècle et contrairement à celles des pays voisins, elles sont toujours en service pour les offices et les cérémonies religieuses. Elles ont été construites par un prêtre jésuite, musicien et architecte suisse et ironie de l'Histoire, elles ont été restaurées par un autre prêtre jésuite architecte suisse deux siècles plus tard. Les intérieurs des églises sont d'une grande richesse et le travail des artisans sculpteurs sur bois est remarquable dans toutes les missions que nous avons pu visiter. On a raté d'un jour le Festival de Musique Baroque de réputation mondiale qui se tenait à la Mission de San Ignacio de Velasco. Comme dans les pays limitrophes, le développement de ces Missions Jésuites, "Républiques de Dieu", avait débouché sur la création d'un modèle social communautaire unique et presque utopique. Elles constituaient une entrave politique et idéologique à l'exploitation à outrance de ces pays par les colonisateurs espagnols et portugais. Après l'expulsion des Jésuites de toute l'Amérique du Sud par décrets royaux (espagnol et portugais), les indiens Chiquitanos ont continué à faire vivre les Missions en Chiquitania bolivienne et aujourd'hui encore ils y sont très attachés. C'est à travers elles qu'ils ont préservé leur culture et développé leur art de sculpture sur bois et de fabrication d'instruments de musique.
Les ménnonites chargent le bus.
Pour visiter les Missions de la Chiquitania, il faut faire de la piste, les routes entre les différents villages ne sont pas goudronnées, cela se fait en
bus, et on avale notre compte de poussière mais cela en vaut la peine. Le dépayesement est total. Adieu les bus Pullman, maintenant c'est un véhicule
brinquebalant, chargé avec
les passagers, les poules, les bagages sur le toit! On charge même de la viande de vache fraîchement abattue et dépecée au bord de la route. On voyage
avec des fermiers ménnonites qui vont au village voisin pour vendre leur production d'oeufs, de poules et de gâteaux. Ils vivent en communauté à
l'écart de la modernité, un peu hors du temps, mais sont de bons agriculteurs et commerçants.
Voyager en bus nous permet de voir la vraie vie de la population
locale et de se rendre compte de la précarité de leur situation dans les villages que nous traversons et des difficultés rencontrées du fait du manque
d'infrastructures, surtout pour les déplacements, mais aussi pour l'accès à l'eau et à l'électricité.
Finalement on a mis 6h pour faire les 207 km entre San José de Chiquitos et San Ignacio de Velasco, 35°C sans clim, fenêtres ouvertes, a avaler la poussière soulevée par les véhicules qui nous croisaient ou nous doublaient. Le trajet San Ignacio-Conception était à l'avenant, celui de Conception à Santa Cruz de la Sierra via san Xavier était un peu plus relax car sur route goudronnée mais tout aussi haut en couleurs.
La Muela del Diablo de Chochis.
On a fait ainsi le tour des sept principales Missions de la Chiquitania sur une boucle de près de 1000 km. Dans la dernière, San Xavier, on a la
chance d'assister à un concert de musique sacrée et des danses tradiionnelles Chiquitano.
Il faut aussi dire que la région compte d'autres sites naturels intéressants comme les
sources chaudes et les sables mouvants d'Aguas Calientes, le monolithe de la Mola del Diablo et un sanctuaire à Chochis, les moyennes montagnes de la
cerrania environnante.
Pour ce qui est de la mise à jour de notre site, j'ai beaucoup de mal car les connections sont très lentes et les pages
mettent un temps infini à s'ouvrir et les photos à se charger. J'en suis à regretter le Népal! On va reprendre le bus pour rallier Santa Cruz de la
Sierra, au centre du pays.
Santa Cruz de la Sierra
Santa Cruz de la Sierra est la plus grande ville de Bolivie, la plus peuplée, la plus "moderne" et la plus riche mais n'est que la capitale de la province de Santa Cruz. Elle se targue quand même d'être la capitale économique du pays. Il n'y a pas ici de très vieux monuments et la visite du centre-ville est vite bouclée. Seuls les bâtiments autour de la Plaza 24 de Septiembre rappellent la période coloniale. L'imposante cathédrale construite en briques rouges a une décoration très sobre à l'intérieur.
La Plaza 24 de Septiembre.
La Plaza est très animée tout au long de la journée et on a ainsi l'occasion d'assister à une manifestation anti-corruption au son des fanfares de la police et des habitants des quartiers. Il faut savoir que la Bolivie connaît des troubles sociaux récurrents, chaque catégorie de citoyens de gauche ou de droite saisissant l'occasion de manifester et quelquefois cela peut dégénérer. Toutes les banques et les établissements financiers sont sous la "protection" de gardes armés, vigiles ou policiers. L'époque de Butch Cassidy et Sundance Kid, qui ont fini tragiquement leur carrière d'outlaws en Bolivie, pas morte?
Samaipata
On sort donc de Santa Cruz pour monter à 1960 m vers le village de Samaipata et les ruines du site pré-inca de El Fuerte. Il y a là le plus grand rocher du monde, 220m x 60m, taillé, creusé et gravé. C'est l'oeuvre des indiens Mojocoyas et Chanés, puis des Guaranis et Chiriguanos, et pour finir des Incas avant la conquête espagnole au XVIème siècle. Le rocher servant pour les rites et cérémonies religieuses était le centre d'une cité prospère.
El Fuerte de Samaipata.
Un système hydraulique performant permettait l'irrigation des terres cultivées autour du site. L'art rupestre et la poterie étaient aussi développés
comme l'attestent les fouilles des archéologues. C'est l'occasion d'une superbe ballade dans cette partie de la Cordilliera et d'être au contact de cette
nature encore sauvage et des paysages dont on ne se lasse pas.
On va aller à Cochabamba et on prépare notre départ en bus pour une longue journée de route.
Cochabamba
Cochabamba est pour moi un nom avec une résonance exotique. On y fait étape d'abord pour s'acclimater à l'altitude avant d'attaquer l'Altiplano. La ville est située à 2500 m et s'étage sur les sommets environnants. Autour de la Plaza 14 de Septiembre ont été conservés les immeubles à arcades qui abritent pour la plupart les bureaux gouvernementaux. La Plaza est toujours très animée et occupée par les marchandes ambulantes vêtues de costumes traditionnels. En guise d'attraction, on a l'occasion d'assister à une manifestation pacifique des paysans contre un plan d'urbanisation qui les priverait de terres agricoles et le défilé est haut en couleurs, c'est le moins que l'on puisse dire.
Défilé de manifestation paysanne.
Le marché de La Cancha, le plus grand de la Bolivie paraît-il, réunit des centaines de boutiquiers et de marchands de fruits et de légumes.
On y trouve tout ce qui peut se vendre et s'acheter. Cochabamba est célèbre pour ses fêtes religieuses et les pélerinages qui s'y tiennent régulièrement
tous les ans, ainsi que pour son carnaval qui attire les foules du fin fond de la Bolivie. La ville possède son Christ de la Concorde qui la domine
et la protège du haut des 2800 m de la colline et de ses 34 m, soit un peu plus grand que le Christ Rédempteur de Rio. On zappe les 1350 marches pour
grimper sur la colline et on y monte par le
téléphérique. On s'épargne aussi les 150 marches pour monter à l'intérieur de la statue. De la plateforme du piedestal, on jouit d'une superbe vue panoramique à
360° sur la ville et ses environs.
On va prendre un bus de nuit pour Sucre, toujours dans le but de s'habituer à l'altitude.
Sucre
Sucre, la ville blanche, est à 2780 m d'altitude. C'est la capitale constitutionnelle du pays et aussi sa capitale culturelle. Y arriver par un trajet de nuit en bus a été épique. La moitié des 350 km est une route pavée de galets et sans une portion de ligne droite de plus de 300 m, bonjour les cahots! Donc nuit quasi blanche, Sucre se mérite et elle le vaut bien. C'est la ville qui a gardé le plus de vestiges de son passé colonial, et pas seulement autour de la plaza principale. Il y a bien sûr une pléthore d'églises toujours en activité avec des décorations intérieures baroques d'une grande richesse.
Vue sur la ville depuis le toit de l'église San Felipe de Neri.
On y trouve aussi un grand nombre de musées, la plupart sous la responsabilité du clergé. C'est un fait que l'église catholique a une influence
prépondérante dans le pays et qui passe par le système d'éducation quasi monopolistique depuis le primaire jusqu'à l'université. Il y a quantité de
célébrations religieuses qui donnent lieu à des processions et à des occasions de faire la fête en musique, chose que les boliviens ne dédaignent pas
de faire. Ici, comme dans les autres pays d'Amérique du Sud visités jusqu'ici, le côté sombre est la condition sociale des indigènes qui est visiblement
bien inférieure à celle des métis et surtout des hispaniques d'origine.
On va monter à Potosi, encore un trajet en bus éprouvant pour nos dos
mais combien enrichissant sur le plan de la découverte du pays.
Potosi
Perchée à 4090 m, Potossi est la ville de plus de 100000 habitants la plus haute du monde, plus haute que La Paz ou Lhassa. Elle est dominée par le Cerro Rico, la Montagne Riche qui culmine à 4800 m. C'est cette montagne qui a fait la richesse de Potossi, d'abord par l'argent puis par l'étain extraits de ses flancs. L'argent a coulé ici à flots pendant près de trois siècles de même que la sueur et le sang des mineurs indigènes pour le plus grand profit des colonisateurs espagnols et du capitalisme européen. A la fin du XIXème siècle, quand les mines d'argent se sont taries et n'étaient plus rentables, c'est l'étain qui a fait la fortune colossale de Simon I. Patino. Aujourd'hui, ce sont des mineurs indépendants et leur famille, regroupés en coopératives qui s'échinent à arracher le minerai pauvre en métaux à la montagne sous la protection d'El Tio, le dieu censé leur assurer prospérité et sécurité, mais la rentabilité n'est plus ce qu'elle était.
Le Cerro Rico.
Les conditions de
travail sont désastreuses, les accidents fréquents, les maladies endémiques dues à la poussière et à la pollution omniprésentes. Mais les mineurs n'ont pas
le choix, ils sont 15000 à continuer à exploiter des veines peu rentables qui leur permettent juste de gagner les quelques bolivianos nécessaires pour
survivre en mâchant des feuilles de coca toute la journée, ce qui les aide à lutter contre la faim et la fatigue. C'est Germinal au XXIème siècle. On
a pu s'en rendre compte en allant visiter une mine, on en est ressorti bien vite, tout en sachant que nous étions privilégiés en n'étant que des
touristes visiteurs.
De sa richesse passée, il ne reste à Potosi qu'une multitude d'églises baroques dont certaines sont richement décorées,
des bâtiments de l'époque coloniale comme la Casa de Moneda où l'Espagne a fait battre les Réals de sa monnaie jusqu'en 1825, et des maisons de style
de riches commerçants.
Participantes à une fiesta de rue.
Il est difficile de circuler dans cette ville aux ruelles en pente, et étroites pour couper la route au vent glacial d'hiver. Plus que l'altitude,
c'est la pollution générée par les pots d'échappement des microbus qui recrachent les gaz à 2 m de hauteur qui est gênante pour la respiration. L'état
et les villes boliviennes étant pauvres, ces microbus ont été achetés d'occasion aux chinois dont la préoccupation n'était visiblement pas la
pollution.
En attendant, on prend tout à bonne hauteur dans le nez en marchant sur les trottoirs.
Mais tout cela n'empêche pas les habitants de Potosi de
s'amuser à la moindre occasion, tout étant prétexte à des défilés, des processions religieuses ou des fêtes dans les rues ou sur les places publiques.
Pour ces évènements, ils sortent dans leurs plus beaux atours et les habits aux couleurs chatoyantes des femmes brillent de toutes leurs paillettes.
La ville compte aussi un grand nombre de musées et celui
de la Casa Monéda nous a particulièrement intéressé mais la palme revient au musée de l'église-couvent de Santa Teresa qui nous a enchanté tant par
son architecture que par la richesse de son contenu et l'histoire de ses pensionnaires. Pour notre part, on va continuer vers Uyuni, toujours en bus.
Au Salar de Uyuni
Notre arrivée à Uyuni est apocalyptique, dans une tempête de poussière attisée par un vent glacial. Le temps d'arriver à l'hôtel, on a les dents qui crissent avec la poussière avalée. Il nous faut ressortir cependant pour organiser notre sortie au Salar de Uyuni avec un tour opérateur. Uyuni n'a vraiment aucun charme à faire valoir, ses rues sans cesse balayées par le vent, froid de surcroît puisqu'on est encore en hiver. Mais c'est la porte d'entrée au Salar qui porte son nom. Cerise amère sur le gâteau, l'hôtel annoncé avec chauffage ne le met que chichement de 22h à 6h du matin. Pas de chauffage non plus dans les restaurants où on dîne avec les anoraks. On va se consoler car dans la journée il y a un beau soleil avec un superbe ciel bleu. En route dès le lendemain matin pour ce Salar dont on a tant entendu parler et qu'on a tant vu dans des reportages à la télé. Passage obligé, le cimetière des anciens trains à vapeur qui ont été utilisés pour le transport du minerai extrait dans les mines de Pulacayo près d'Uyuni. Il y a là des tonnes de ferraille qui rouillent sur une voie desaffectée. Et on bifurque de la voie de chemin de fer qui va vers le Chili et l'Argentine pour aller à l'ouest vers le Salar. Ce Salar de Uyuni, à 3650 m d'altitude et qui couvre 12500 km² sur une épaisseur moyenne de 40 m, est le plus grand désert de sel du monde.
Sur le Salar de Uyuni.
Peu à peu, la piste de poussière laisse place à un mélange d'argile et de sel qui crisse sous les roues de notre 4x4. Au fur et à mesure qu'on avance, la piste s'éclaircit et s'aplanit. Après une vingtaine de kilomètres, on n'a plus devant nous qu'une mer de sel à l'infini, d'une planéité parfaite. On traverse une petite zone de récolte de sel non iodé où se dressent des cônes de sel raclés à mains d'hommes sur la croûte du Salar et que des hommes chargent péniblement à la pelle sur des camions, le tout sous un soleil devenu ardent. Bientôt on n'a plus que le volcan Tunupa qui se dresse au milieu du Salar comme point de repère. Plus loin, une curiosité unique en son genre: un hôtel entièrement construit avec des blocs de sel mais qui n'est plus en service pour cause de défaut d'hygiène et qui a été transformé en musée. Cela nous fait penser aux igloos construits en pains de neige et de glace des Inuits. Puis on arrive à une oasis en plein désert de sel, un îlot de rocher volcanique sur lequel poussent des cactus géants. C'est encore l'occasion d'une grimpette pour atteindre le sommet et jouir d'un extraordinaire panorama à 360° sur le Salar sous un ciel d'azur et un soleil au zénith. Après un pique-nique bienvenu, on met le cap sur le volcan Tunupa. A ses pieds, près du village de Coqueza, on peut observer des flamants roses et des lamas qui se partagent une étroite bande de prairie. Puis c'est le retour vers Uyuni, avec toujours ce désert blanc scintillant à perte de vue sur les côtés duquel semblent flotter des îles de roches tels des mirages. Cet endroit a aussi définitivement quelque chose de magique, dû sans doute à son immensité plate et sa blancheur immaculée. Le volcan Tunupa était (est) un lieu sacré pour les indiens. Au musée Archéologique et Anthropologique on peut voir des momies qui y ont été trouvées ainsi que des objets en céramique pour des cérémonies rituelles. On va continuer vers notre prochaine étape, La Paz.
La Paz
Le cauchemar du piéton et de l'architecte urbaniste que cette ville. Capitale administrative de la Bolivie, elle s'étage entre 3000 et 4000 m et plus, le centre étant dans une cuvette entourée de montagnes. C'est la capitale la plus haute du monde et la seule où il faut monter, à El Alto en l'occurance, pour aller dans les bas-quartiers, les habitants aisés préférant l'altitude la plus basse du Prado au climat plus doux. En plus de l'altitude à laquelle nous nous sommes bien adaptés progressivement, il faut subir une pollution atmosphérique infâme due à la circulation automobile. Le traffic étant intense, il faut voir les voitures, bus et camions rouler quasi continuellement en 2ème, démarrer aux feux en 1ère dans les rues en pente à 45° et lâcher à chaque fois un nuage de fumée noire. Le parc automobile n'est pas de première jeunesse. Dès que cela monte, c'est le chaos des rues et ruelles qui se croisent et s'entrecroisent, toutes ayant pour but d'aboutir sur l'avenue centrale du Prado.
Vue sur la ville.
Sinon le Prado, le centre de La Paz, recèle quelques joyaux baroques de la période coloniale et comme dans les autres villes, des églises toujours en grand nombre dont celle de San Francisco très richement décorée, et des bâtiments officiels du plus beau style néoclassique. Il y a aussi un grand nombre de musées pour la plupart regroupés dans le quartier de la Calle Jaén qui compte encore pas mal de maisons de l'époque coloniale restaurées avec bonheur. Pour le reste, dès qu'on lève les yeux, on a l'impression que tout la ville est en construction car les maisons qui montent à l'assaut des pentes ne sont pas crépies. On apprend que c'est pour payer moins de taxes, car elles sont ainsi considérées comme non finies. Du Mirador Killi Killi des hauteurs d'El Alto, on a une vue impressionnante de la ville et des montagnes alentour. Mais le spectacle est dans les rues grouillantes de monde, les "chuletas", femmes indiennes en costume traditionnel avec chapeau melon et couverture-baluchon bariolé de couleurs vives sur le dos, servant souvent de porte-bébé, vont et viennent pour faire leurs courses dans les petites échoppes de rue tenues par leurs homologues. Au bout du compte, La Paz ne nous laissera pas un souvenir impérissable, excepté pour nos mollets endoloris.
L'Altiplano, les Andes et Tiwanaku
On sort bien vite de la ville de La Paz pour aller sur l'Altiplano, immense plateau à 4000m d'altitude, à la végétation pauvre et quasi sans arbre.
Pourtant des paysans indigènes cultivent la terre dans ces paysages qui pour nous semblent désolés, faisant pousser des pommes de terre, du quinoa,
de l'avoine et élevant du bétail, des lamas, des moutons et des cochons. Ça et là, quelques fermes éparses aux murs en pisé et toits de chaumes, du
bétail au maigre
pâturage et de petites parcelles cultivées. La vie doit être dure pour ces paysans, dans un environnement ingrat, battu par le vent glacial d'hiver.
Ce côté de l'Altiplano est bordé par la chaîne enneigée et majestueuse de la Cordillière Royale avec ses sommets à plus de 6000m.
La route de l'Altiplano nous mène à Tiwanaku (Tiahuanacu), un village où ont été mis à jour des vestiges de temples d'une civilisation avancée qui a
précédé celle des Incas.
Il apparaît que les Incas semblent s'être fortement inspirés des techniques de construction des temples de ce peuple de Tiwanaku, de même que de
leur croyances et rites religieux. Mais ces ruines recèlent plus de mystères qu'ils n'en résolvent et les archéologues en sont encore à se poser des
questions sur l'origine de ce peuple et à émettre des hypothèses sur les raisons de la disparition de cette civilisation.
La Porte du Soleil.
Tiwanaku était la capitale d'un empire aymara qui a duré près de 2000 ans, avec son apogée au IXème siècle et sa fin au XIIème siècle. Ils maîtrisaient les mathématiques, l'astronomie, le traitement des métaux et surtout l'ingéniérie hydraulique et l'agronomie. Il n'y a pas de réponses non plus sur l'énigmatique Porte du Soleil et la galerie de têtes de pierre du petit temple semi-enterré. On a appris tout cela et plus grâce aux explications très documentées et intéressantes de notre guide Gonzalo. L'autre curiosité accessible depuis La Paz et qu'on avait beaucoup vu dans des reportages et dont on avait beaucoup entendu parler, c'est la fameuse Route de la Mort. On la prend donc en voiture, mais elle est moins fréquentée donc moins dangereuse depuis la construction de la nouvelle route asphaltée.
Dans la descente de la Death Road.
On emprunte la route N°3 jusqu'au col de Cumbre à 4670m, puis une descente de 2000m de dénivelé sur Cotapata et ensuite la Route de la Mort jusqu'à Yolosa, dans les Yungas, soit encore 2000m de dénivelé par cette fameuse Route de la Mort. Cette route est maintenant un terrain de jeu pour les touristes en VTT avides de vivre la séquence "frisson" comme disait Nicolas Hulot. C'est vrai que les à-pics de 1000m qui bordent l'étroite piste caillouteuse sont impressionnants pour qui a le vertige, c'est pour cela que Chantal a fait le trajet avec la tête tournée systématiquement du côté de la paroi de la montagne. Il y a eu beaucoup d'accidents et des croix parsèment le parcours. Ce qui est remarquable, c'est le changement de climat et de végétation sur ce parcours. Des paysages arides et de la brume de la Cordillière Royale on finit dans une forêt subtropicale tempérée même en hiver, avec des champs de culture de coca. On remonte à 1500m vers le village de Coroico perché sur une colline et c'est seulement dans cette région des Yungas que l'on trouve en Bolivie des noirs descendants des esclaves amenés ici pour travailler dans les mines. On revient sur La Paz par la route asphaltée mais qui est aussi sujette à des éboulements de roches et des glissements de terrain. Prochaine et dernière étape en Bolivie, le non moins fameux lac Titicaca.
Au lac Titicaca
On y est, au lac Titicaca qui est la dernière étape de notre voyage en Bolivie. Après trois heures de bus et 10mn de traversée d'un détroit en bateau on est arrivés à Copacabana, le port d'où on embarque pour l'île du Soleil. Le lac est situé à 3810m d'altitude et le Calvario, le point le plus élevé du village culmine à 4000m. C'est ce village qui a donné son nom à la célèbre plage de Rio de Janeiro. C'est maintenant un centre touristique de première importance car en plus de l'accès sur la partie bolivienne du lac c'est aussi la porte d'entrée en Bolivie pour ceux qui viennent du Pérou et vice versa. C'est sur l'avenue centrale et le port que se concentre toute l'activité et l'animation du village qui a été un lieu de pélerinage pour les Incas avant de devenir celui de la Vierge de Copacabana.
Le lac Titicaca.
C'est en voyant le baptême quotidien des voitures devant la cathédrale que l'on comprend le syncrétisme religieux des boliviens qui ont fait l'amalgame
des croyances païennes des Incas et du christianisme. C'est un peu beaucoup comme en Asie où religion et superstition sont intimement mêlées.
Ce qui fait l'attrait de cet endroit c'est bien sûr le lac avec ses eaux de couleur bleue foncée, et le ciel d'azur et le soleil, avec une frange de
la Cordillière Royale des Andes comme de la crème chantilly sur un gâteau...
Il y a des dizaines de bateaux qui font la navette entre Copacabana et l'île du Soleil, et des dizaines de rabatteurs pour leur trouver les passagers.
Sur l'île du Soleil, bergère avec son troupeau.
On embarque donc pour l'île du Soleil qui est un endroit exceptionnel, sans voiture, sans moto ni même vélo. Symbiose complète avec la nature. On
se rend compte qu'il n'y a même aucune machine sur l'île, tout le travail aux champs se fait à la main, suivant une tradition séculaire. Les indiens
pratiquent la culture en terrasse depuis des siècles et ont modifié le paysage des collines de l'île.
On fait le
tour de l'île par un trek de deux jours, même si on s'était juré de "lever le pied" pour les randonnées. On n'a pas à le regretter malgré les efforts
fournis, tant les paysages sont magnifiques, la nature si calme et si pure, et la vie des habitants si intéressante à observer. En plus, on peut voir des ruines
de la période Inca. Ce premier contact avec le lac Titicaca nous aura bien plu, on espère qu'il en sera de même pour la partie péruvienne. Nous allons quitter
la Bolivie qui est certes un pays pauvre d'après nos standards européens mais qui est très riche sur le plan culturel et la variété des paysages offerts
aux visiteurs. C'est aussi un pays très abordable pour les touristes, ce qui ne gâte rien.
On va passer la frontière pour le Pérou demain après-midi.